80% des adhérents de la fédération de l’hospitalisation privée ont confirmé leur intention de faire grève suite à un désaccord sur les tarifs les opposant au gouvernement. Aucun patient ne sera pris en charge à partir de cette date.
Le mouvement de fermeture des cliniques privées à partir du 3 juin s’annonce « massif », préviennent ces établissements, qui estiment n’avoir obtenu aucune avancée dans le conflit tarifaire les opposant depuis six semaines au gouvernement.
« Le mouvement sera extrêmement suivi », prévient Lamine Gharbi, président de la FHP, Fédération de l’hospitalisation privée, qui regroupe la totalité des établissements privés.
« 80% des adhérents de la FHP » ont déjà fait part aux Agences régionales de santé « de leur ferme intention de se mettre en grève », a-t-il assuré mercredi, lors d’une conférence de presse conjointe avec plusieurs syndicats représentatifs de médecins libéraux. Et d’ici les prochains jours selon lui, « les 100% seront atteints ».
« Suspension totale et reconductible des activités à partir du 3 juin »
Les cliniques privées à but lucratif, qui représentent 25% de l’activité hospitalière française (médicale, chirurgicale et obstétrique), ont annoncé « une suspension totale et reconductible » de leurs activités à partir du lundi 3 juin. Aucun patient ne sera pris en charge à compter de cette date, à l’exception de certaines activités vitales comme la dialyse.
Les cliniques veulent amener le gouvernement à revoir les tarifs auxquels elles seront rémunérées en 2024, qui doivent n’augmenter que de 0,3% alors qu’ils augmenteront de 4,3% pour les hôpitaux publics. Le manque à gagner pour elles est de 500 millions d’euros, indiquent-elles.
Les cliniques demandent une révision des tarifs
Au contraire de Frédéric Valletoux, le ministre délégué à la Santé, qui a fait part mardi devant l’Assemblée nationale de sa volonté de « trouver des voies de sortie » dans le conflit, les cliniques privées estiment que le dossier n’avance pas. « Il y a un blocage idéologique » du gouvernement au détriment de l’hospitalisation privée, a estimé Lamine Gharbi.
Selon lui, « s’il n’y a pas de révision des tarifs, il y aura un déficit de 800 millions d’euros sur la branche » en 2024.
Cinq des six syndicats représentatifs des médecins libéraux (Avenir Spé-Le Bloc, CSMF, UFML-S, SML, FMF) soutiennent ce mouvement, les cliniques étant pour bon nombre d’entre eux leur « outil de travail ».
Ils participeront au mouvement en suspendant leurs propres rendez-vous et interventions, et ce même s’ils obtiennent satisfaction dans leurs propres négociations tarifaires en cours avec l’Assurance maladie, prévues pour s’achever vendredi, ont-ils averti.
D’ici le 20 mai, les patients seront avertis de la déprogrammation de leurs opérations et consultations, et dès le 1er juin, les urgences seront « transférées vers l’hôpital public », a indiqué le coprésident de la principale organisation de spécialistes, Avenir Spé-Le Bloc, Philippe Cuq.
« Ce mouvement sera extrêmement dur et dangereux » car « si on ferme l’ensemble des établissements privés, dans l’heure qui suit l’hôpital public ne pourra pas faire face », a averti le président du syndicat UFML-S, Jérôme Marty.
Des réquisitions possibles mais peu efficaces
Certes, les autorités sanitaires auront le pouvoir de réquisitionner les personnels des services d’urgence des cliniques privées, ont reconnu la FHP et les syndicats de médecins libéraux. Mais selon eux, les services d’urgence réquisitionnés ne pourront pas réellement fonctionner, puisqu’ils n’auront pas accès aux autres services fermés des cliniques, tels que la radiologie, les analyses biologiques ou d’autres spécialités.
« Le médecin urgentiste ne pourra pas avoir l’avis du chirurgien thoracique, du gastro-entérologue ou de l’urologue, il ne pourra pas garder le patient et devra l’envoyer » à l’hôpital public, a expliqué Lamine Gharbi.
Cette grève sera finalement « un test grandeur nature du scénario où l’hospitalisation privée ne serait plus là », a-t-il résumé.
Côté hôpital public, le syndicat d’urgentistes SAMU-Urgences de France déjà tiré la sonnette d’alarme sur les possibles conséquences du mouvement. « Un report non organisé ni concerté » des patients du privé vers le public « représente un risque majeur tant en termes de désorganisation que de sécurité et de qualité des soins », a averti Charlie Trisse, la déléguée générale du syndicat, dans un communiqué.
Elle a appelé les pouvoirs publics à prévoir des « renforts en personnels » aux urgences, « pour assurer la surcharge d’activité qui sera inévitable ».
AFP