Le dernier grand baromètre, publié à quinze jours des élections, laisse entrevoir un revers important pour les écologistes, le 9 juin prochain. Ecolo ne disposerait plus que de quatre sièges à la Chambre, contre 13 actuellement. Recul aussi pour le parti frère, Groen, qui passe de huit à cinq sièges. Comment expliquer cette chute? Les Verts se sont-ils trompés de stratégie?
“Il s’agit d’un problème structurel. Ce n’est que dans l’opposition que le parti pourra retrouver sa crédibilité”, avance le politologue de l’ULB Régis Dandoy.
Des nuages sombres s’amoncellent au-dessus de la Greenhouse, le siège des Verts situé à proximité du Jardin botanique, au cœur de Bruxelles.
Comme en 2003, les Verts risquent de payer cash leur participation au gouvernement fédéral. En Wallonie, Ecolo jouit de 8,8% des intentions de vote, soit un recul de 6,1% par rapport au dernier scrutin de 2019. Ce n’est pas mieux à Bruxelles, où les écologistes francophones passent de 21,6% à 12,5%. En Flandre, la baisse est moins spectaculaire, de 9,8% à 6,6%.
La transposition en sièges à la Chambre par circonscription du sondage @rtlinfo – @lesoir.
* À Bruxelles: hypothèse où Alexia Bertrand est élue sur la liste libérale.
** À Bruxelles: listes PS-Vooruit, MR-OpenVLD, Engagés-CD&V, Ecolo-Groen pic.twitter.com/Ak3dHtcqkZ— Pascal Delwit (@PDelwit) May 24, 2024
Son de cloche sensiblement similaire chez Groen.
“C’est clair, nous aurions préféré voir d’autres chiffres. Mais nous avons une équipe motivée qui mène une campagne très dure. Les Verts sont une voix unique dans le paysage politique”.
Depuis l’été 2022, les écologistes flamands s’appuient sur un nouveau slogan“Meer dan groen (plus que vert)” et mise sur un éventail plus large de thèmes: outre le climat et l’environnement, le bien-être et les soins de santé. Une ligne revue et corrigée corrélée à l’arrivée à la tête du parti de Nadia Naji et Jeremie Vaneeckhout en mai 2022.
Une stratégie qui ne doit rien au hasard.
Tous les partis ont inclus les questions écologiques dans leurs programmes. Conséquence? Les Verts n’en ont plus le monopole. En 2019, le thème du climat a occupé une place prépondérante dans la campagne, notamment grâce aux marches hebdomadaires pour le climat .
Cette fois, le débat politique tourne principalement autour du pouvoir d’achat.
Et là, les Verts jouent beaucoup moins sur leur terrain “Si vous avez du pognon, votez vert”, analysait en interne l’ancien président du parti, Wouter Van Besien, après les élections de juin 2019. La concurrence à gauche est également féroce: le PTB a le vent en poupe et en Flandre, Vooruit gagne du terrain depuis que Conner Rousseau est de retour aux affaires.
Petra De Sutter, l’éclaircie dans la grisaille
La vice-première ministre Petra De Sutter est la cinquième personnalité politique la plus populaire au nord du pays, selon le dernier coup de sonde. Les deux coprésidents Nadia Naji (23e) et Jérémie Vaneeckhout (27e) se situent dans les profondeurs de ce classement : à peine 1 % des Flamands se sentent mieux représentés par eux. En Wallonie, Jean-Marc Nollet pointe à la 22e place et Rajae Maouane ne figure pas dans le top 30.
La coprésidente figure en revanche dans le classement bruxellois, à la 25e position.
“Ecolo est considéré comme le ‘parti yo-yo’. Au fil des élections, son score monte et descend: le parti ne parvient pas à produire un résultat stable. C’est un problème structurel », avance le politologue Régis Dandoy (ULB), interrogé par Het Laatste Nieuws. “Ce n’est que dans l’opposition que le parti peut retrouver sa crédibilité”, estime-t-il.
“Ecolo a de bonnes idées, mais dès que le parti les met en pratique de manière concrète, les résistances émergent.
À titre d’exemple, ‘Good Move’ a conduit à des places de parking coûteuses et à une circulation plus difficile pour les voitures”.
Le politologue ne voit pas de leadership fort chez les Verts.
“Dans la pratique, la coprésidence réduit de moitié leur visibilité. Un leader charismatique et médiatique n’est pas dans l’ADN d’Ecolo, les membres ont trop de pouvoir pour cela.
Un handicap en ces temps de forte personnalisation de la politique.”
“En Wallonie, on a le sentiment qu’Ecolo a été trop pragmatique et a fait trop de compromis, comme céder sur la sortie du nucléaire, par exemple”.
Une différence avec la situation en Flandre, où des partis d’opposition comme la N-VA ont rejeté les Verts en les qualifiant de “dogmatiques” et même de “fêlés”.
Les autres présidents de parti de la Vivaldi n’ont pas vraiment fait en sorte de faire mentir cette image, une façon pour eux de se présenter comme “raisonnables”.
Chez les Verts, on rappelle qu’il reste un tiers d’électeurs indécis, “dont beaucoup de jeunes et de femmes”, un électorat qui leur est traditionnellement favorable. La chute sera-t-elle moins rude que prévu? Réponse le 9 juin.
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