En matière de premiers secours, l’égalité entre les sexes est encore loin d’être atteinte. Une série d’études récentes a mis en lumière une réalité préoccupante: les femmes ont 27 % de chances en moins que les hommes de recevoir un massage cardiaque en cas d’arrêt cardiaque dans un lieu public. Cette disparité est largement due à des barrières liées à la pudeur et à des préjugés sociaux profondément enracinés.
Les maladies cardiovasculaires sont la première cause de mortalité chez les femmes en Europe. Pourtant, en cas de crise cardiaque en rue, elles sont moins susceptibles de recevoir un massage cardiaque, une intervention cruciale qui augmente considérablement les chances de survie.
Une étude de l’Université d’État de Pennsylvanie menée en 2017 a révélé que cette disparité est en partie due à la gêne ressentie par les témoins à l’idée de toucher la poitrine d’une femme sans son consentement.
Interrogé par nos confrères du RTL Info, le Dr Christophe Scavée, cardiologue aux cliniques universitaires Saint-Luc à Bruxelles, souligne que la “pudeur thoracique” joue un rôle important dans cette inégalité.
“Les gens craignent d’exposer les seins d’une femme, ce qui peut les amener à hésiter ou à éviter de pratiquer un massage cardiaque”, explique-t-il. Cette hésitation peut coûter cher, car chaque minute compte en cas d’arrêt cardiaque.
Plusieurs hypothèses
Une étude canadienne menée sur plus de 40.000 patients a confirmé ces résultats. Entre 2005 et 2015, seulement 61 % des femmes victimes d’arrêt cardiaque en public ont reçu un massage cardiaque, contre 68 % des hommes.
Le Dr Alexis Cournoyer, auteur de l’étude, affirme que cette différence de traitement “augmente la mortalité des femmes à la suite d’un arrêt cardiaque”.
Plusieurs hypothèses expliquent cette réticence.
Outre la pudeur, il y a une méconnaissance des symptômes féminins de l’arrêt cardiaque, souvent différents de ceux des hommes. Les femmes sont plus susceptibles de ressentir un essoufflement ou une fatigue intense plutôt que la douleur thoracique typique, rendant les signes avant-coureurs moins évidents.
Les mannequins de réanimation utilisés dans les formations de premiers secours sont en grande majorité masculins, ce qui contribue à l’incertitude des secouristes lorsqu’il s’agit de pratiquer un massage cardiaque sur une femme.
Une initiative en Suède a tenté de pallier ce problème en introduisant des mannequins dotés de seins pour mieux préparer les secouristes, mais cette pratique n’est pas encore généralisée.
Pour venir à bout de ces inégalités, une sensibilisation accrue est nécessaire.
Les professionnels de la santé doivent être formés pour reconnaître les symptômes spécifiques aux femmes et être encouragés à pratiquer les gestes de premiers secours sans hésitation, quelle que soit la victime. De plus, l’enseignement du massage cardiaque devrait inclure des mannequins féminins pour familiariser les secouristes avec toutes les morphologies.
Il est crucial de surmonter les barrières de la pudeur et des stéréotypes de genre pour sauver des vies.
La reconnaissance et l’éducation sont les clés pour assurer que chaque individu, homme ou femme, reçoit l’aide nécessaire en cas d’urgence cardiaque. Des vies en dépendent.
RTL