En Egypte, la pyramide de Djoser aurait pu être construite grâce à l’énergie hydraulique

Les Égyptiens de l’Ancien Empire auraient utilisé un système de monte-charge hydraulique pour construire la pyramide la plus ancienne d’Égypte : le complexe funéraire de Djoser. Cette découverte questionne l’endroit même où pourrait reposer le pharaon Djoser.

Carte du plateau de Saqqarah montrant le parcours de l’eau depuis le barrage de Gisr el-Mudir jusqu’à la station de traitement des eaux près de la pyramide de Djoser. L’eau est ensuite transférée vers le réseau de canalisations de la pyramide pour alimenter l’ascenseur hydraulique.

Érigée il y a environ 4700 ans, la pyramide à degrés, ou complexe funéraire de Djoser, est la plus ancienne des grandes pyramides d’Égypte.

Durant quatre ans de recherches, des cartographies, tomographies, visualisations tridimensionnelles (basées sur d’anciens plans de fouilles et des images satellitaires), modélisations hydrologiques et paléoclimatiques ont été réalisées sur le plateau de Saqqarah (au sud du delta du Nil) où se trouve la pyramide de Djoser.  

Les résultats indiquent que pour construire ce complexe funéraire dans lequel reposerait le pharaon Djoser, les Égyptiens auraient eu recours à un système hydraulique composé d’un barrage, d’une installation de traitement de l’eau et d’un monte-charge. Cet instrument basé sur l’énergie hydraulique aurait permis d’élever les pierres de construction à la verticale.

Après quelques légères modifications de formulation, l’étude, dont la publication avait été repoussée, est désormais disponible dans la revue PLOS One.

Pyramide à degrés de Djoser

Trois découvertes qui montrent la grande ingéniosité des Égyptiens de l’Ancien Empire

L’équipe multidisciplinaire de chercheurs a commencé par attribuer une fonction à une structure située à quelques centaines de mètres du complexe de Djoser, le barrage du Gisr el-Mudir. Épais de 15 mètres et long de deux kilomètres bout à bout, ce curieux édifice avait été interprété comme étant un enclos à bétail, ou encore une forteresse.

Mais il s’agit bien, d’après les auteurs, d’un barrage de retenue d’eau dont l’objectif était certainement de limiter les risques de crue en arrivage de la vallée voisine.

« La pluviométrie de l’Ancien Empire est peu connue. Nous savons qu’elle était importante car il y a des preuves de forts écoulements sur le plateau de Saqqarah », explique Xavier Landreau, président de Paleotechnic, chercheur au Commissariat à l’énergie atomique (CEA) et auteur principal de l’étude.

Les chercheurs ajoutent qu’en contrebas de ce barrage se trouvait un lac, probablement intermittent, lui-même relié à une gigantesque douve qui entoure la pyramide. Au sud, une fosse de 400 mètres de long et de 27 mètres de profondeur, découverte en 1937, est taillée dans la roche. La fonction de trois compartiments appartenant à ce qui semble être une installation de traitement de l’eau a été révélée au cours de cette étude.

« Ce système est bluffant car il est extrêmement moderne », s’enthousiasme le chercheur.

Image de 1943 de la « Deep Trench »

L’eau traitée et débarrassée de ses sédiments aurait pu parcourir ensuite les sept kilomètres de conduits souterrains jusqu’à la pyramide. Sa destination : un puits central enfouit à 28 mètres de profondeur.

Ce puits, accessible à la vue des touristes, contient une boîte en granite. Parfois soupçonnée d’abriter le sarcophage du pharaon, cette boîte serait, d’après les auteurs, une « vanne » de remplissage et de vidange d’eau. Grâce à un flotteur sur lequel étaient entreposées les pierres taillées, l’eau pénétrant dans le puits aurait permis au flotteur d’embarquer à la verticale les matériaux nécessaires à la fabrication des couches supérieures de la pyramide !

S’il ne repose pas dans le puits sous la pyramide, où se trouve le pharaon Djoser ?

« Nous pensons que le sarcophage du pharaon a été confondu avec la vanne », évoque Xavier Landreau. Par ailleurs, le trou qui accueille cette vanne est trop étroit pour conserver un corps dans de bonnes conditions.

Reste alors une hypothèse qui devra être explorée : « Ce système, qui a vraisemblablement servi à ériger la pyramide, aurait peut-être également permis de placer le roi dans sa dernière demeure au cœur de la pyramide elle-même », imagine l’auteur de l’étude. Sonder l’intérieur de la pyramide – comme cela a été fait pour la pyramide de Khéops – est une étape nécessaire pour espérer mettre le doigt sur le lieu de repos du pharaon et ainsi vérifier si le complexe « funéraire » de Djoser mérite son appellation.

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