C’est officiel. Le Parc national de Lusaka, situé à quelques kilomètres de la capitale zambienne, abrite une nurserie pour éléphanteaux orphelins, créée en 2008 par l’Organisation non gouvernementale (ONG) Game Rangers International. Dans ce pays d’Afrique australe, à la biodiversité exceptionnelle, vingt parcs nationaux ont été créés sur l’ensemble du territoire pour protéger la faune et la flore.
Mais malgré ces efforts de préservation, une espèce reste menacée : les éléphants. Tués pour leurs défenses en ivoire par des braconniers peu scrupuleux, certains pachydermes laissent derrière eux de jeunes éléphanteaux dont les espoirs de survie dépendent de l’intervention de l’homme.
Depuis le poste d’observation surélevé et protégé par des filets de camouflage, Emma accueille les visiteurs venus découvrir la nurserie du Parc national de Lusaka.
D’emblée, elle prévient dans un reportage effectué par nos confrères de Radio France internationale (RFI) : « je vais vous demander à tous d’éteindre vos téléphones. Comme vous le savez, ces éléphants ont subi d’énormes traumatismes. Et chaque bruit peut leur faire revivre ces traumatismes ». Ne pas être vu, ni entendu, c’est la condition pour observer les pachydermes. « Ah, les voilà ! Le premier, le plus petit, c’est Kasoungou. Il n’a que 4 mois. Et après, il y a Tchikoumbi qui se précipite vers son biberon de lait », a dit Emma.
Qui a informé que sept éléphanteaux sont actuellement à la nurserie. Ils pénètrent dans l’enclos dans lequel les attendent trois rangers, formés par l’ONG Game Rangers International.
Biberons à la main, ces derniers nourrissent les éléphanteaux, pour le plus grand bonheur des visiteurs dissimulés derrière les filets de camouflage. Ces trois rangers passent 24 heures sur 24 avec les éléphanteaux, qu’ils nourrissent toutes les trois heures, de jour comme de nuit. Véritables mères de substitution, ils jouent un rôle essentiel auprès des éléphants. « Plus les éléphants sont jeunes, moins ils ont de chance de survie sans leur mère. Jusqu’à l’âge de 3 ans, ils dépendent totalement du lait maternel.
Donc, si vous voyez un bébé éléphant sans sa mère, c’est qu’il y a un problème », a encore expliqué Rachael Murton, directrice de Game Rangers International.
Pour M. Murton, la survie des éléphanteaux dépend donc d’une chaîne humaine dont font partie ces « mamans rangers », mais qui commence avec les villageois sensibilisés à la préservation de la faune sauvage et qui doivent alerter les membres de l’ONG quand ils aperçoivent un éléphant orphelin. Commence alors un travail fastidieux qu’il faut réaliser dans les plus brefs délais : repérer l’animal, l’approcher sans l’effrayer, l’endormir et le transporter par camion, parfois sur des centaines de kilomètres, jusqu’à la nurserie du Parc national de Lusaka.
Là, les éléphanteaux sont pris en charge individuellement, selon leur âge et leurs besoins.
« Il est très difficile de donner un âge précis aux éléphants que nous recevons. Mais le plus jeune devait avoir 3 ou 4 semaines. Nous devons donc nous adapter », indique Rachael Murton.
Des conséquences plus importantes du changement climatique
Les éléphants restent à la nurserie jusqu’à leur sevrage à l’âge de trois ans ou trois ans et demi. Ils sont ensuite mis en semi-liberté, dans un autre parc du pays où ils apprennent à se nourrir seuls et à sociabiliser avec les éléphants plus âgés. Ce n’est que vers l’âge de 15 ans qu’ils peuvent être relâchés pour connaître enfin les joies et les déboires de la liberté.
Car une fois rendus à la vie sauvage, de multiples dangers les guettent.
« Avant, les éléphants étaient principalement victimes du braconnage. Mais la Zambie a fait de gros progrès et le braconnage a diminué. En revanche, depuis quelques années, avec le changement climatique et la sécheresse, les conflits entre hommes et éléphants augmentent, car ils ont tendance à se rapprocher des champs de maïs. Et parfois, les villageois tuent un éléphant et abandonnent le bébé », a dit Sport Beattie, fondateur de Game Rangers International.
Game Rangers International organise donc des campagnes de sensibilisation pour inciter les villageois à ne plus tuer les éléphants.
L’ONG leur prodigue également quelques conseils pratiques. Pour protéger un champ de maïs dont les éléphants sont friands, rien de mieux que quelques piments disposés à l’entrée de la parcelle, qui feront fuir, à coup sûr, les pachydermes trop gourmands, lit-on dans le reportage.
Depuis la création de la nurserie en 2008, Game Rangers International a secouru 61 éléphanteaux. La moitié n’a pas survécu. Dix-sept ont retrouvé la vie sauvage. Mais nul ne sait s’ils ont eu le malheur de manger du piment.
VivAfrik