Équateur: la polémique grandit après la mort de quatre adolescents retrouvés calcinés

Le 8 décembre dernier, quatre mineurs ont disparu à Guayaquil, dans le sud-ouest de l’Équateur, après un match de football. Initialement présentés comme de possibles délinquants, les jeunes garçons – Josué Arroyo (15 ans), Ismael Arroyo (14 ans), Saul Arboleda (11 ans) et Steven Medina (15 ans) – pourraient avoir été victimes d’une bavure militaire.

Quelques jours après leur disparition, la police a découvert quatre corps totalement calcinés dans une zone isolée de mangroves. Les mineurs avaient été emmenés dans cette zone proche de la base aérienne de Taura par une patrouille de l’armée de l’air équatorienne. Les policiers ont dû traverser des eaux boueuses pour extraire les restes humains, rapporte notre correspondant à Quito, Éric Samson.

Selon les autorités, faute d’empreintes digitales exploitables, les médecins légistes devront examiner les cadavres pour repérer d’éventuelles cicatrices ou traces d’opérations chirurgicales permettant leur identification. En cas d’échec, des tests ADN, dont les résultats prendront plusieurs semaines, seront nécessaires.

Le ministre de la Défense indique que « les jeunes avaient été relâchés de nuit »
Des images issues de caméras de surveillance ont montré deux des garçons embarqués de force dans une camionnette militaire et maltraités. Dans une vidéo diffusée par l’Assemblée nationale, un autre adolescent est aperçu face contre terre dans un véhicule militaire.

Le ministre de la Défense Gian Carlo Loffredo a d’abord affirmé que les mineurs avaient été enlevés par un groupe criminel.

Face aux révélations, il a modifié son discours, déclarant que « les jeunes avaient été relâchés de nuit » et qu’ils auraient ensuite été capturés par des délinquants. Une explication largement contestée par les familles et les ONG.

Une émotion nationale
Cette affaire a provoqué une vive indignation en Équateur. À Guayaquil et Quito, plusieurs centaines de personnes ont manifesté pour demander justice et vérité.

« Rendez-les-nous en vie, s’il vous plaît », a imploré Luis Arroyo, père des deux frères disparus.

La Commission interaméricaine des droits de l’Homme (CIDH) a exprimé sa « profonde préoccupation », tandis que l’ONU et l’Unicef ont appelé à une enquête « exhaustive, rapide et impartiale ».

Le parquet équatorien a perquisitionné la base militaire de Taura, saisissant les téléphones et véhicules des soldats.

Une affaire qui ébranle les institutions
Cette tragédie a porté un coup sévère à l’image des forces armées équatoriennes, un pilier central de la politique sécuritaire du président Daniel Noboa. Sous pression, celui-ci a ordonné sur le réseau social X une « intensification de toutes les actions nécessaires à la localisation des quatre enfants et pour trouver tous les responsables afin qu’ils répondent de leurs actes devant la justice et le pays ».

Longtemps considéré comme un havre de paix entre la Colombie et le Pérou, principaux pays exportateurs de cocaïne, l’Équateur a vu la violence exploser ces dernières années. Des bandes rivales liées aux cartels mexicains et colombiens s’y affrontent pour prendre le contrôle du trafic dans le pays, devenue une passoire majeure de la production de drogue.

rfi

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