Le ministre de l’Intérieur est poussé par de nombreuses personnalités « anti-Wauquiez » et ses bons résultats dans les enquêtes d’opinion.
Jeudi 6 février au soir sur LCI, il assurait encore que rien n’était décidé, mais qu’il « prendrai(t) (ses) responsabilités » et « jouerai(t) un rôle » dans la reconstruction des Républicains.
Ce mercredi, le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau a franchi un pas supplémentaire en confirmant qu’il serait candidat à la présidence du parti. « Aujourd’hui, je veux faire pour mon parti ce que je fais à la tête de mon ministère : parler vrai et agir vite », a-t-il indiqué dans un courrier adressé aux militants de la formation de droite, avant une réunion du bureau politique de LR prévue lundi prochain qui doit fixer la date du congrès pour désigner son président, vraisemblablement en avril-mai.
Cette déclaration de candidature sonne comme une déclaration de guerre pour Laurent Wauquiez.
En effet, le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes avait un plan bien précis en tête, qui n’incluait pas d’avoir un adversaire – même s’il n’est toujours pas officiellement candidat. Mardi 4 février, les deux hommes avaient dîné en tête-à-tête place Beauvau, un entretien lors duquel Laurent Wauquiez avait demandé au ministre le respect d’un « accord » passé entre eux sur la distribution de leurs rôles au sein des Républicains.
« À toi d’incarner la droite au gouvernement, à moi de reconstruire notre famille politique », avait-il alors lancé à Bruno Retailleau.
« Si tu romps cet accord, tu porteras la responsabilité d’allumer une guerre des chefs qui sera dévastatrice », avait ajouté le patron des députés LR, selon des propos rapportés à l’AFP.
Une guerre des chefs ?
Ce mercredi, l’entourage de Laurent Wauquiez, sollicité par TF1/LCI, a d’ailleurs prévenu que l’ex-patron des sénateurs LR prenait la « lourde responsabilité d’ouvrir une guerre des chefs qui va diviser notre parti ». « Il serait préférable qu’il puisse se consacrer pleinement à son action à Beauvau, la France en a bien besoin, et laisser Wauquiez mener à bien la mission de reconstruction du parti qui lui a été confiée », a ajouté la même source.
« Je ne veux pas de nouvelles déchirures et de nouvelles blessures dans notre parti », a tenté de rassurer Bruno Retailleau sur France Inter, assurant qu’il ne se prêterait « pas au jeu des petites phrases » et qu’il n’en prononcerait « aucune contre (ses) concurrents ».
« Voter ce n’est pas diviser », a-t-il renchéri, estimant que sa candidature à la tête de LR, il y a un peu plus de deux ans, contre Éric Ciotti, n’avait pas provoqué de guerre des chefs (il avait obtenu 46,3% des voix face au député des Alpes-Maritimes, qui a quitté ses fonctions à la tête du parti après avoir fait alliance en juin avec le Rassemblement national aux législatives, laissant le poste vacant depuis bientôt neuf mois).
Ce qui inquiète également Laurent Wauquiez, c’est que Bruno Retailleau engrange de nombreux soutiens désireux d’écarter du jeu le président de région, qui entend, s’il est élu, mettre le parti au service de sa candidature en 2027. « Il pourrait devenir la valeur-refuge de tous ceux qui ne veulent pas de Laurent Wauquiez », a commenté un cadre LR cité par l’AFP.
Le ministre de l’Intérieur a aussi reçu récemment le soutien de l’ex-chef du gouvernement Michel Barnier, qui l’a qualifié de « grand ministre ». Mais aussi du président des Hauts-de-France, Xavier Bertrand, ou encore du fils de l’ancien président Louis Sarkozy, qui le présente comme la « seule lumière » qui soit apparue dans « la triste séquence » de la dissolution. Bruno Retailleau est également poussé par le président du Sénat, Gérard Larcher.
Le vent en poupe
Bruno Retailleau peut aussi compter sur sa popularité dans l’opinion publique. Un sondage divulgué mercredi 5 février par l’hebdomadaire Le Point donne l’avantage à Bruno Retailleau, dont la cote de popularité a grimpé depuis qu’il s’est installé à Beauvau, en septembre.
Réalisé fin janvier par l’institut OpinionWay à la demande de Force républicaine, mouvement lancé par l’ancien candidat à la présidentielle François Fillon et repris par Bruno Retailleau, le sondage place en tête ce dernier pour prendre la présidence du parti (24%), devant Xavier Bertrand (21%), Valérie Pécresse (15%) et Laurent Wauquiez (15%).
En outre, notre baromètre(nouvelle fenêtre) de confiance politique Harris Interactive-Toluna pour LCI du mois de janvier octroie à Bruno Retailleau la première place parmi les ministres, avec 40% d’avis positifs, juste devant Gérald Darmanin.
Aussi, le ministre voit dans les récents succès électoraux de la droite – à la mairie de Villeneuve-Saint-Georges(nouvelle fenêtre) (Val-de-Marne) et lors d’une législative partielle dans son fief de Boulogne-Billancourt – les résultats de sa participation au gouvernement.
Interrogé par l’AFP, le directeur de l’Ifop, Frédéric Dabi, estime que la candidature de Bruno Retailleau « reflète (sa) position de force (…) depuis quelques mois et son côté désormais incontournable s’agissant du peuple de droite ». « C’est plutôt très bien parti pour lui. Sa candidature révèle des ambitions très fortes pour le pays. Dans le dernier baromètre pour Paris Match, il a pratiquement trois quarts des soutiens des sympathisants LR », constate-t-il. Son atout réside aussi dans sa capacité à séduire au centre et plus à droite. « Il a 58% de bonnes opinions dans l’électorat de Marine Le Pen et 77% dans celui d’Eric Zemmour.
Il y a une vraie séduction d’une partie majoritaire des sympathisants RN, parce qu’il parle la même langue qu’eux, si je puis dire. Ils ont l’impression qu’il veut agir très fortement sur les questions d’insécurité. »
Attention toutefois, si « dans l’opinion publique, Bruno Retailleau semble avoir pris le pas » il ne faut pas oublier qu’en 2012 « François Fillon avait l’opinion avec lui, mais c’est Jean-François Copé qui a gagné en obtenant le soutien des adhérents », rappelle-t-il.
tf1