Guerre en Ukraine : Avec quels atouts Zelensky peut-il convaincre Trump de maintenir le soutien américain ?

Republican presidential nominee and former U.S. President Donald Trump and Ukraine's President Volodymyr Zelenskiy meet at Trump Tower in New York City, U.S., September 27, 2024. REUTERS/Shannon Stapleton

Le président américain n’est pas sensible aux arguments géopolitiques pour maintenir l’aide américaine à l’Ukraine. Il la conditionne à une contrepartie économique

« Poutine ne se prépare pas à la paix.

Il continue de tuer des Ukrainiens et de détruire des villes. Seules des mesures fortes et une pression sur la Russie peuvent mettre fin à cette terreur, a fustigé Volodymyr Zelensky. Ce dont nous avons besoin maintenant, c’est de l’unité et du soutien de tous nos partenaires. »

Toutefois, Vladimir Poutine a dit ce mercredi, au cours d’une conversation téléphonique avec son homologue américain, vouloir trouver une « solution de long terme » au conflit ukrainien via des « pourparlers de paix », a annoncé le Kremlin.

La grande inconnue désormais s’appelle Donald Trump.

Le président américain, à la tête du plus grand pourvoyeur d’aides financière et militaire à l’Ukraine, jouera un rôle pivot dans la suite du conflit. Mais comment le convaincre de poursuivre son soutien essentiel à la survie de l’Ukraine ?

Des terres rares et précieuses

Contrairement à son prédécesseur Joe Biden, le milliardaire qui voulait mettre fin à la guerre en 24 heures « n’est pas sensible aux arguments géopolitiques, il réfléchit le conflit comme un potentiel marché », explique Samantha de Bendern, chercheuse associée à l’Institut royal des affaires internationales, spécialiste de la Russie, l’Ukraine et la Biélorussie. Ayant bien cerné le locataire de la Maison-Blanche, Volodymyr Zelensky a ainsi proposé d’accueillir des investissements miniers américains.

L’Ukraine regorge de ressources rares telles que le titane, le lithium ou encore le graphite.

Cette idée n’est pas tombée dans l’oreille d’un sourd puisque Donald Trump souhaite un retour sur investissement. « Je veux que notre argent soit sécurisé parce que nous dépensons des centaines de milliards de dollars », a prévenu le président américain dans une interview à Fox News lundi. L’accès à ces métaux permettrait aux Etats-Unis d’acquérir des matières premières essentielles dans de nombreux domaines, comme la fabrication des batteries de véhicules électriques, dans l’aérospatiale ou encore dans l’industrie des produits électroniques.

Autre carte dans la manche de Volodymyr Zelensky : l’après-guerre. Le magnat de l’immobilier qui rêve déjà de reconstruire la bande de Gaza en une future « Riviera » pourrait se laisser tenter par l’opportunité d’investissements en Ukraine. « L’objectif est d’offrir un intérêt économique à Donald Trump », abonde Marie Dumoulin, directrice du programme Europe élargie au Conseil européen des relations extérieures (ECFR). Mais la reconstruction et le retour des Ukrainiens dans leur pays, « n’est envisageable qu’à la condition de garanties de sécurité par les Américains », souligne-t-elle.

Des intentions inconnues

Ces leviers peuvent peser mais, comme le souligne Samantha de Bendern, « Donald Trump est en train d’évaluer quelle serait la meilleure solution, entre la Russie et l’Ukraine, pour son intérêt ». Volodymyr Zelensky devra alors convaincre le sulfureux et imprévisible président américain « que céder à Vladimir Poutine c’est perdre la face, il faut qu’il joue sur son ego, sur sa perception du pouvoir et pas sur des enjeux géopolitiques », développe Samantha de Bendern.

Le président ukrainien prévoit d’ailleurs de « finaliser » un accord économique lors de la Conférence de Munich, vendredi, sur la sécurité où est attendu le vice-président américain J.D. Vance.

Autre difficulté : aujourd’hui, 70 % des 111 milliards de tonnes de ressources en minerais, principalement du charbon et du minerai de fer, se trouvent dans les régions de Donetsk et Lougansk, en partie contrôlées par la Russie, et dans celle de Dnipropetrovsk, où les forces de Moscou s’approchent. Les ressources rares sont aussi convoitées par les Russes, qui ont d’ailleurs déjà lancé l’extraction de lithium dans la région de Lougansk, affirme Samantha de Bendern.

Carte de l'Ukraine localisant approximativement les réserves d'une sélection de minerais : graphite, lithium, titane, zirconium et terres rares.

Le Pentagone a tracé quelques lignes rouges attendues sur l’Ukraine, rejetant notamment une adhésion à l’Otan mais « on ne sait pas de quel côté les Etats-Unis vont basculer, estime Samantha de Bendern.

Ils peuvent représenter une aide plus efficace que sous Joe Biden aussi bien qu’ils peuvent basculer complètement car aujourd’hui, le soutien américain a pris une autre forme, une forme très transactionnelle, très commerciale et donc très imprévisible ». L’Ukraine va ainsi devoir jouer des coudes pour s’imposer alors que Donald Trump et Vladimir Poutine ont annoncé des négociations imminentes entre les Etats-Unis et la Russie sur l’Ukraine.

« Pour l’instant, on est dans la rhétorique, et elle est différente d’un responsable américain à un autre, sans proposition concrète mais avec un grand absent dans l’équation : les Européens », souligne Marie Dumoulin.

20minutes

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