Emmanuel Macron effectue une visite d’Etat à Lisbonne jeudi et vendredi, axée sur l’innovation technologique et la coopération bilatérale, pour renforcer les liens franco-portugais.
La tech, l’intelligence artificielle, les relations commerciales et la défense européenne. C’est autour de ce menu que s’ouvre la visite d’Etat d’Emmanuel Macron au Portugal, ces jeudi et vendredi. Le voyage a des airs de parenthèse de douceur diplomatique, entre les secousses géopolitiques mondiales, avec à la clé un traité d’amitié et de coopération pour resserrer des liens déjà denses et une série d’accords pour renforcer la bonne entente franco portugaise, sur le terrain de la technologie, de la culture ou de l’éducation.
Selon l’Elysée, Emmanuel Macron mettra aussi à profit son voyage pour promouvoir l’urgence d’une stratégie européenne de défense et de sécurité, en mettant l’accent sur l’importance des investissements en défense, alors que le gouvernement portugais n’y consacre que 1,55 % de son PIB. L’entente entre les deux pays devrait être marquée par la signature de l’engagement à l’acquisition par Lisbonne de 36 canons Caesar d’ici 2034 et sur le développement de la coopération industrielle, en matière de drones notamment.
Le patron d’Air-France KLM, Ben Smith sera dans la délégation qui accompagne le chef de l’Etat, il espère pouvoir pousser la candidature de son groupe alors que le gouvernement portugais est à la veille de relancer la privatisation de TAP Air Portugal.
Beato Innovation District
De Lisbonne à Porto, le programme va pivoter autour de l’élan de la tech et de l’intelligence artificielle, ainsi que sur la force des échanges bilatéraux grâce à la forte présence des entreprises françaises. Avec notamment la visite du Beato Innovation District, une ancienne caserne militaire du coeur de la capitale transformée en un immense hub incubateur qui héberge plus d’un millier de start-up, puis la tenue, à Porto, d’un forum d’affaires entre représentants patronaux des deux pays pour mettre en valeur les grands axes de coopération.
La France est en effet partenaire commercial essentiel, avec une présence renforcée ces dernières années qui la positionne à la fois comme deuxième client et deuxième fournisseur du Portugal, derrière l’Espagne, au coude à coude avec l’Allemagne.
Le stock des investissements directs français s’élève à plus de 16 milliards d’euros, selon la banque du Portugal, et les 1.200 filiales de groupes français sur place pourvoient plus de 100.000 emplois, ce qui fait d’elles le premier employeur étranger dans le pays.
Mais ce sont sans doute les liens humains qui rapprochent le plus les deux pays : deux millions de luso-descendants vivent en France et autour de 50.000 Français, donc beaucoup de retraités, se sont installés au Portugal, sans compter les 3 millions de touristes qui s’y rendent chaque année.
Visibilité sur la scène européenne
En dépit de cette proximité et de la fluidité des échanges entre les deux pays, il s’agit de la première visite d’Etat d’un président français depuis celle de… Jacques Chirac, en 1999. L’eau a coulé sous les ponts depuis, et le petit pays de la périphérie atlantique de l’Europe a gagné en visibilité sur la scène européenne.
Après le trou d’air de la crise financière, il a su remonter la pente grâce à l’élan du tourisme tout en misant sur l’innovation et affiche des comptes publics assainis, avec une croissance de 1,7 % en 2024, un excédent budgétaire de 0,3 % et une dette ramenée à 96 % (contre 126 % en 2017). Il s’impose aujourd’hui à la fois comme un champion européen de la transition verte avec 71 % d’électricité d’origine renouvelable et la force d’un écosystème de 4.700 start-up et 6 licornes attire les entrepreneurs de la tech et les nomades numériques.
Mais au-delà de la tech, l’industrie traditionnelle reste forte, autour de la mécanique, de l’automobile, de l’aéronautique, du textile ou de l’agroalimentaire notamment.
Comment l’Espagne et le Portugal ont conquis des positions clés à Bruxelles
« Le pays a bénéficié d’une vague de relocalisations post-pandémie, pour des raisons de proximité et de réduction de l’empreinte carbone », explique Laurent Marionnet, le directeur de la chambre luso-française à Lisbonne qui a observé le redécollage du pays, après la crise financière. « Avant les entreprises européennes venaient surtout pour profiter des coûts du travail attractifs », décrit-il.
Même si c’est encore vrai, aujourd’hui elles choisissent le Portugal aussi pour développer de nouveaux partenariats de valeur ajoutée et installer leurs centres d’innovation, insiste-t-il : « Avec l’atout de solides passerelles entre les universités et les entreprises pour le développement de la recherche. »
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