« On se sent libérée »: le témoignage de Bintou, victime d’excision, après une chirurgie réparatrice à Montreuil

Psychologues, sages-femmes, sexologues et chirurgiens accompagnent chaque année près de 200 patientes au sein de la structure.

Une unité spécialisée d’un hôpital de Montreuil s’engage à réparer les femmes victimes d’excision. Cette prise en charge est menée par des psychologues, sages-femmes et chirurgiens.

L’expérimentation pourrait ensuite être généralisée en France. Installée en France depuis 10 ans, Bintou a appris par hasard qu’elle avait été excisée dans son pays natal, au Mali.

“J’ai surpris une conversation téléphonique entre ma mère et une cousine quand j’étais encore très petite, en primaire. Ma mère ne sait pas que je suis au courant”, confie-t-elle. « C’était la première fois que j’en parlais. J’ai passé une heure à pleurer », se rappelle cette employée dans le secteur bancaire, 27 ans, à la sortie de sa consultation post-opératoire. La jeune femme a bénéficié d’une chirurgie réparatrice à l’hôpital de Montreuil.

“On se sent libérée de quelque chose. Je pense que c’est vraiment la première sensation lorsqu’on se réveille de l’opération. C’est fini, c’est autre chose qui commence. C’est comme une nouvelle vie”, ajoute-t-elle.

« Ma famille n’est pas encore au courant. Je vais leur en parler cet été quand je retournerai au Mali. J’ai besoin d’en discuter avec ma maman, qu’elle s’excuse. Je lui en ai beaucoup voulu », témoigne Bintou, une semaine après son opération.

Des soins désormais pris en charge par la Sécurité sociale
200 femmes sont accueillies chaque année dans cette unité spécialisée. Elles sont accompagnées par des psychologues, des sages-femmes et des sexologues.

En salle d’opération, un travail minutieux s’engage. “L’idée est de faire une plicature au niveau de la peau pour permettre de faire un relief, un peu un trompe-l’oeil de petites lèvres”, explique la docteure Sarah Abramowicz, gynécologue-obstétricienne, qui s’est occupée de Bintou.

L’acte améliore l’aspect des parties génitales et apporte également un soulagement.

“Cela permet d’enlever les douleurs, car souvent, dans les cicatrices qu’on enlève sur les tissus mal cicatrisés, il y a des douleurs du fait de lésions. Cela leur permet de retrouver des sensations puisqu’on va chercher leur clitoris et cela leur permet de retrouver une anatomie et une esthétique vulvaire”, ajoute la spécialiste.

Une autre patiente se souvient avoir été excisée, à six ans, dans un appartement, en région parisienne.

Elle se rappelle avoir vu des enfants sortir de l’immeuble en pleurs, sans qu’elle ne sache pourquoi, puis de la douleur ressentie. Son exciseuse, Hawa Gréou, a été condamnée en 1998 à huit ans d’emprisonnement pour la mutilation de 48 fillettes.

« Ma cousine s’est fait réparer, elle m’a dit que c’était comme si on lui avait remis ce qu’on lui avait volé.

Ça m’a donné envie, j’ai toujours eu le sentiment qu’il me manquait quelque chose, je me sentais différente des autres quand je parlais de sexualité avec mes amies », raconte pendant sa consultation la Malienne âgée de 45 ans. Elle se fera opérer le 11 mars.

A partir du 8 mars, date de la Journée internationale des droits des femmes, le parcours sera intégralement pris en charge par la Sécurité sociale, et non plus seulement l’opération. Le dispositif pourrait être généralisé en France, si l’expérimentation de trois ans est validée. Le ministère de l’Egalité Femme-Homme estime à 125.000 le nombre de femmes excisées en France.

AFP

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