Près de 150 migrants secourus en Méditerranée centrale par des navires humanitaires

En à peine 48 heures, entre vendredi soir et dimanche matin, 147 migrants ont été secourus par les ONG SOS Méditerranée et Sea-Eye en Méditerranée centrale. Parmi eux figurent plusieurs femmes et au moins deux jeunes enfants.

Dimanche 9 mars, dans la matinée, l’Ocean Viking a porté assistance à « 25 personnes en détresse » au large de la Libye, indique sur X l’ONG SOS Méditerranée, qui affrète le navire humanitaire.

« Les personnes rescapées », dont cinq mineurs non accompagnés, trois femmes et deux enfants de moins de quatre ans, « se rétablissent actuellement, prises en charge par les équipes de l’IFRC (Fédération Internationale de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge) et de SOS Méditerranée à bord », précise l’ONG.

L’embarcation en détresse avait été repérée grâce à une alerte émise par Alarm Phone, la plateforme d’aide aux migrants en mer.

Un autre navire humanitaire a procédé à quatre opérations de sauvetage quelques heures plus tôt. Dans la nuit de vendredi 7 à samedi 8 mars, le bateau Sea-Eye 4, dont l’ONG éponyme mène des opérations conjointes avec Sea Watch, a secouru un total de 122 exilés dans des « conditions très difficiles : de grosses vagues et une nuit profonde », signalent les humanitaires sur X.

Des ports éloignés de la zone de sauvetage
L’Ocean Viking et le Sea-Eye 4 font désormais route vers le port assigné par les autorités italiennes : celui de Marina di Carrara, à 1 222 km de la zone de recherche et de sauvetage (SAR zone) pour le premier, et Vibo Valencia à environ 500 km de sa dernière position pour le deuxième.

« Cette décision prive la Méditerranée centrale d’une capacité de sauvetage vitale, là où elle est le plus nécessaire », déplore SOS Méditerranée.

Depuis son arrivée au pouvoir fin 2022, la Première ministre d’extrême droite, Giorgia Meloni, a multiplié les mesures afin d’entraver les activités de sauvetages des navires humanitaires.

Le décret Piantedosi, du nom du ministre de l’Intérieur, en est le parfait exemple : avec ce texte, les ONG doivent désormais se rendre « sans délai » au port de débarquement assigné par les autorités italiennes juste après un premier sauvetage. Si les navires humanitaires effectuent un autre sauvetage, ils doivent le faire avec l’accord de Rome. Sinon, ils s’exposent à des sanctions financières et à l’immobilisation du bateau.

Une autre disposition prise par le gouvernement italien complique encore davantage les activités des ONG en mer : l’attribution de ports italiens de plus en plus éloignés de la zone de recherche et de sauvetage. Depuis deux ans, Rome assigne des ports au centre voire au nord du pays, beaucoup plus lointains que les villes siciliennes ou Lampedusa, où étaient traditionnellement débarqués les migrants secourus.

Sept fois le tour du monde
Ainsi, selon un rapport de SOS Méditerranée, les bateaux d’ONG ont perdu 735 jours à rejoindre des ports éloignés des lieux de sauvetage et ont parcouru au total plus de 275 000 km à cause des restrictions imposées par les autorités italiennes en mer. Soit presque sept fois le tour du monde.

Et pour les navires qui n’ont pas respecté cette loi, depuis janvier 2023, « 640 jours de détention ont été imposés aux navires », indique le rapport. Et plus de 76 000 euros d’amendes ont été infligés aux ONG en seulement deux ans.

Passer des jours en mer après un sauvetage a des conséquences sur le fonctionnement et la trésorerie d’une ONG, mais pas seulement.

Cela a également un impact « néfaste sur la santé physique et mentale » des naufragés, déjà traumatisés par une périlleuse traversée à bord d’un canot de fortune, signale SOS Méditerranée.

Cette politique menée depuis deux ans par le gouvernement italien, farouchement anti-migrants, a participé à « vider encore davantage la mer des navires de sauvetage », observe SOS Méditerranée dans son rapport. En effet, entre les immobilisations de bateaux et les longues distances à parcourir pour rejoindre un port, il peut se passer de longues semaines sans ONG dans la SAR zone.

Et cette absence prolongée peut amener des drames : selon les derniers chiffres de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), 247 personnes qui tentaient de rejoindre l’Europe ont disparu ou sont décédées en mer Méditerranée depuis le début de l’année. En 2024, elles étaient 2 360, dont l’immense majorité en Méditerranée centrale, l’une des routes migratoires les plus mortelles au monde.

La rédaction tient à rappeler que les navires humanitaires sillonnent une partie très limitée de la mer Méditerranée.

La présence de ces ONG est loin d’être une garantie de secours pour les migrants qui veulent tenter la traversée depuis les côtes africaines. Beaucoup d’embarcations passent inaperçues dans l’immensité de la mer. Beaucoup de canots sombrent aussi sans avoir été repérés. La Méditerranée centrale reste aujourd’hui la route maritime la plus meurtrière au monde.

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