Accord sur les subventions à la pêche : l’OMC appelle à un sursaut collectif

Depuis le début des années 2000, les discussions sur la fin des subventions à la pêche illégale, non déclarée et non réglementée (INN) ont été lancées au niveau de l’OMC. Si en 2022, un accord a été trouvé, sa mise en œuvre patine.

Face à la lenteur du processus de ratification de l’Accord sur les subventions à la pêche (ASP), Angela Ellard, la directrice générale adjointe de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) a lancé le 2 avril dernier, un appel pour une meilleure mobilisation.

Adopté en juin 2022, cet accord historique vise l’interdiction des subventions à la pêche ou aux activités liées à la pêche concernant un stock halieutique surexploité ainsi que toute forme de soutien à la pêche illégale, non déclarée et non réglementée (INN).

Alors que cet instrument international doit être ratifié par deux tiers des membres de l’OMC avant son entrée en vigueur, c’est à dire 111 pays, seulement 95 acceptations ont été déposées jusqu’ici.

D’après Mme Ellard, cette situation reste préjudiciable quand on sait que 38 % des stocks mondiaux de poissons sont aujourd’hui surexploités.

« Imaginez l’impact positif que nous pourrions avoir sur les stocks de poissons si nous redirigions les 22 milliards de dollars dépensés chaque année en subventions néfastes vers la gestion durable des pêches. Nous sommes si proches. J’exhorte les membres restants à ratifier rapidement afin que nous puissions célébrer cette étape ensemble lors de la Conférence des Nations unies sur l’océan en juin », a affirmé la responsable.

Pourquoi un tel retard et quelles implications ?

Parmi les 16 signatures qui manquent, celles de l’Indonésie et l’Inde font partie des plus remarquées. Ces deux pays continuent notamment de réclamer un traitement spécial et différencié dans l’Accord de l’OMC, notamment des dérogations pour les pays en développement. Pour justifier leurs positions, ceux-ci mettent en avant le besoin de soutiens publics aussi bien sous forme de carburants, d’équipements qu’en matière d’infrastructures pour soutenir les pêcheries locales.

Il faut souligner que l’Indonésie et l’Inde étaient en 2022, respectivement deuxième et troisième producteurs mondiaux dans la pêche de capture avec 8 % et 5,8 % des volumes derrière la Chine (14,3 %) selon les données de la FAO. Selon l’organisme onusien, l’Indonésie dispose notamment de la flotte de pêche la plus importante au monde avec un total estimé à 1,1 million de navires de pêche déclarés en 2022.

Face à cet argumentaire, certaines organisations dénoncent un double jeu.

« La réalité est qu’à l’heure actuelle, ces pays n’accordent pas beaucoup de subventions à ce type de pêche. Ce qui les intéresse, et ce qu’ils ont fait par le passé comme la plupart des pays développés, c’est d’accorder des subventions à la pêche industrielle », avait confié à l’Agence Ecofin, Béatrice Gorez, Coordinatrice de la Coalition pour des accords de pêche équitables (CAPE).

Plusieurs observateurs soulignent que le retard dans le processus de l’OMC devrait continuer à pénaliser les pays en développement, notamment ceux situés en Afrique qui sont parmi les plus touchés. Le Fonds sur la pêche de l’OMC, prévu par ledit accord pour renforcer l’assistance technique aux pays en développement, n’est pas encore entré en vigueur en raison du blocage.

En attendant que les pays retardataires ne ratifient l’accord, il faut souligner que l’ASP n’est qu’une première étape dans le cycle des discussions.

En effet, les négociations se poursuivent encore pour une deuxième série de règles plus ambitieuses. L’accord qui ciblait à l’origine les activités de pêche illégales, les stocks surexploités et la pêche non réglementée veut aller plus loin en faisant en sorte que les subventions n’encouragent plus les navires à pêcher au-delà d’une limite donnée.

eco

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