« On l’appelle cessez-le-feu, pour moi c’est cesser le génocide », affirme Francesca Albanese, rapporteuse spéciale des Nations unies sur les territoires palestiniens occupés, dans une interview à RFI. Elle martèle sans ambiguïté : « C’est un génocide. Il n’y a pas de doute. »
Francesca Albanese insiste sur la nécessité immédiate de mettre fin à l’offensive israélienne sur Gaza. Pour elle, l’emploi du terme « génocide » n’est plus seulement le sien : « Aujourd’hui il y a Amnesty International, des historiens israéliens, la plupart des organisations pour les droits de l’homme disent la même chose ».
Elle évoque une volonté manifeste de destruction : « L’intention de détruire, c’est ce qu’Israël a annoncé depuis un an et demi et c’est ce qu’il est en train de faire ».
Dans un entretien accordé à Mediapart, elle décrit une offensive militaire à Gaza d’une intensité inédite, soulignant l’usage d’armes expérimentales comme les quadricoptères ou les robots tueurs.
« Ce sont des machines à tuer […] Les enfants sont beaucoup victimes de ces quadricoptères autonomes », déplore-t-elle.
Sur la Cisjordanie, elle met également en garde contre un « risque massif de dépeuplement ». Elle pointe l’annexion déjà actée en février 2023 dans un accord de coalition en Israël. Albanese avait alerté l’ONU à ce sujet, sans réponse, dénonçant une « tolérance accablante envers la violation du droit international ».
Dans ses interventions, Francesca Albanese s’insurge aussi contre la passivité des puissances occidentales. Elle accuse une complicité active :
« L’Occident est complice de ce qui se passe. […] Le droit international est aussi fort que la volonté des États de le faire respecter ». Face au silence ou à l’indignation creuse des chancelleries, elle réclame des mesures concrètes : fin de la coopération, des accords commerciaux et scientifiques avec Israël, et surtout, l’application stricte du droit international.
Ces positions lui valent des attaques virulentes, notamment de certains parlementaires français qui l’accusent de partialité.
Son mandat, renouvelé pour trois ans le 4 avril, a suscité une campagne contre elle qu’elle qualifie de diffamatoire. « Ce qu’ils disent de moi ne me blesse plus […] mais ce qui me fait le plus mal, c’est qu’il y a des enfants qui se font tuer jour après jour et qu’on les ignore. Moi, j’ai une voix et je dois l’utiliser ».
Depuis le 8 octobre 2023, les opérations militaires israéliennes dans la bande de Gaza ont fait plus de 50 000 morts, dont la majorité sont des enfants et des femmes, selon les autorités de santé locales. Des ordres de déplacement forcé, des destructions massives, et des assassinats de civils, de journalistes et de secouristes sont régulièrement signalés.
La Cour internationale de Justice (CIJ), saisie en urgence, avait ordonné en janvier 2024 à Israël de « prévenir tout acte de génocide ».
Quant à la Cour pénale internationale (CPI), elle a émis un mandat d’arrêt contre Benyamin Netanyahu pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité. Mais les appels des juridictions internationales restent largement ignorés. La Hongrie, signataire du Statut de Rome, a récemment accueilli le Premier ministre israélien et annoncé son retrait de la CPI. La Belgique, de son côté, affirme qu’elle ne l’arrêterait pas s’il venait à se rendre sur son territoire.
Alors que l’impunité semble s’installer, Albanese appelle à « ouvrir les yeux aux Israéliens » et à « arrêter de traiter Israël comme un État normal ».
Elle défend une vision intransigeante, mais non violente : « Je ne demande pas d’utiliser la force militaire, mais j’appelle à faire appliquer le droit ».
La voix de Francesca Albanese résonne dans un désert diplomatique.
Et malgré les critiques, elle affirme vouloir poursuivre sa mission avec la même détermination : « Aujourd’hui même, dire la vérité est un acte révolutionnaire ». À ses yeux, seule une pression internationale ferme peut encore enrayer l’engrenage destructeur à Gaza et en Cisjordanie.
AA