A l’issue de la réunion du comité d’alerte du budget, le Premier ministre a décrit la situation économique préoccupante de la France qui nécessite de nouvelles « grandes orientations » dès le prochain budget.
« Il est des rendez-vous cruciaux dans l’agenda politique du gouvernement, des heures de vérité décisives et ceci en est une. »
C’est par cette phrase sur un ton solennel que François Bayrou a commencé sa présentation à l’issue de la réunion du comité d’alerte du budget ce 15 avril.
Après avoir comparé les enjeux géopolitiques actuels à des phénomènes météorologiques, le chef du gouvernement a entamé un diagnostic de la situation économique de la France pour justifier les « grands choix » qui s’imposeront dans le prochain budget à l’automne.
« Nous devons mesurer la gravité de la situation en écartant la peur et la tentation du découragement. Ce temps de constat, loin d’être un frein à l’action, est le temps de la mobilisation. »
En ce qui concerne le calendrier, François Bayrou souhaite que le diagnostic, auquel la démocratie sociale prendra sa part, permette « de proposer des orientations et des solutions avant le 14 juillet », avec en ligne de mire les futures discussions sur le Budget 2026.
Une production et un taux d’emploi trop faibles
Face à de nombreux Français qui déplorent un manque de moyens pour leur quotidien ou encore les services publics, le Premier ministre a notamment donné deux explications majeures.
« Nous n’avons pas assez de ressources parce que notre pays ne produit pas assez, a-t-il d’abord insisté, mettant en avant la différence de PIB par habitant entre la France et ses voisins […] Nous ne produisons pas assez et il n’y a aucune raison acceptable pour un tel retard. »
« Si notre production par habitant était dans la même gamme que celle de nos voisins européens, nous n’aurions pas de déficit budgétaire et nos concitoyens qui gagnent quelque 2.000 euros par mois approcheraient des 2.500 euros », a affirmé François Bayrou.
Pour François Bayrou, « il est impératif de réduire nos dépendances agricoles, industrielles et intellectuelles soit en produisant davantage ce que nous consommons ou en modifiant nos modes de consommation. » Et le Premier ministre considère que la France a « toutes les capacités de produire les réussites les plus exigeantes ».
Outre le niveau de production, le chef du gouvernement a pointé du doigt l’enjeu du travail dont l’exclusion « se concentre sur les plus jeunes et les plus âgés »: « le taux d’emploi des jeunes Français et des seniors est plus faible que chez nos voisins européens. »
Une hausse des prélèvements « intenable »
Le Premier ministre est ensuite entré dans le vif de sujet en rappelant que la France dépense trop par rapport à ses recettes mais est pourtant « loin d’être au sommet des classements de l’OCDE pour le niveau de vie, le taux de chômage, les inégalités ». Face à ce constat, François Bayrou invite à s’inspirer du Canada, de la Suède ou encore des Pays-bas qui ont fortement réduit leurs dépenses publiques ces dernières années tandis que leurs habitants « sont précisément ceux qui se déclarent les plus heureux dans les comparaisons internationales. »
« Nos dépenses sont les plus lourdes de tous les pays du monde mais elles n’ont pas l’efficacité à laquelle nos concitoyens devraient avoir le droit. Ils n’en ont pas pour leur argent », déplore le Premier ministre.
Pour réduire le déficit, le chef du gouvernement écarte les deux solutions « de facilité » auxquelles la France a recours depuis plusieurs décennies. Il juge « intenable » une hausse des impôts alors que le taux de prélèvements obligatoires français atteint déjà 43% du PIB. « Plus l’impôt est lourd, plus les contribuables se dérobent », souligne-t-il. De même, le recours à l’emprunt n’est plus envisageable alors que la dette française dépasse les 110% du PIB: « c’est comme si chaque Français, quel que soit son âge, devait à sa banque près de 50.000 euros. »
Ecarter le recours à l’emprunt
Le recours à l’emprunt est d’autant plus préjudiciable que dans un contexte de hausse des taux d’intérêt, la charge de la dette pèse de plus en plus lourd sur les finances publiques: actuellement autour de 60 milliards d’euros, elle pourrait atteindre 100 milliards d’euros dès 2029. « Tout abaissement de la note de la France entrainerait une augmentation des taux d’intérêt et donc de la charge de remboursement que cette dette impose au pays, rappelle le chef du gouvernement. C’est un cercle vicieux, un piège dangereux et potentiellement irréversible qu’il convient d’identifier et dont nous devons partager la connaissance avec les Français. »
« Les salariés d’aujourd’hui sont en première ligne dans cette charge de la dette. Il est moralement insoutenable de faire supporter aux travailleurs nos dépenses de tous les jours. »
Pour autant, François Bayrou n’est pas fermement opposé au principe de l’endettement tant que ce dernier finance des dépenses pertinentes : « il y a une bonne dette à côté d’une mauvaise. La dette légitime et utile permet de financer des investissements d’avenir mais ce n’est pas cette dette que nous avons privilégié. Nous avons préféré la dette de facilité qui finance les dépenses courantes. »
Quatre grandes orientations
Face à ce constat, François Bayrou appelle à agir tout en respectant « notre modèle social et notre République décentralisée ». S’il rappelle que le système social « est une part de notre identité », il estime que celui-ci doit évoluer « afin d’affronter le défi démographique, l’effondrement de la natalité et le vieillissement de notre population. » Le Premier ministre a également salué l’action des collectivités locales qui portent 70% de l’investissement en France dans des secteurs indispensables comme la santé, le logement ou les transports.
Et le chef du gouvernement décline son action en quatre orientations : l’indépendance en matière de sécurité et de défense avec un effort européen partagé, le refus du surendettement pour que le déficit revienne sous les 3%, la refondation de l’action publique et la vitalité économique de la France afin que le pays soit « une terre attractive » grâce au chantier de la simplification entre autres.
bmftv