Allemagne: la composition du nouveau gouvernement dévoilée, Merz face à de multiples défis

Le nouveau chancelier allemand Friedrich Merz doit être élu en remplacement d’Olaf Scholz, ce mardi 6 mai. Chrétiens et sociaux-démocrates ont signé, lundi à la mi-journée, le contrat de coalition qu’ils ont négocié avant la prestation de serment. La composition du nouveau cabinet est désormais connue. « Il est de notre devoir historique de mener cette coalition vers le succès », a dit Friedrich Merz.

Pour la première fois depuis près de 60 ans en Allemagne, le ministre des Affaires étrangères est membre du même parti que le chancelier, rapporte notre correspondant à Berlin, Pascal Thibaut. Friedrich Merz, avec un fidèle à ses côtés, Johann Wadephul, aura les coudées franches pour un domaine essentiel de son action.

Un Conseil de sécurité nationale est également prévu à la chancellerie pour mieux coordonner la politique étrangère allemande.

Friedrich Merz veut mettre fin aux « couacs » des dernières années. Cela vaut aussi pour l’Europe où, faute d’accord entre les partis membres de la coalition, Berlin s’abstenait parfois à Bruxelles, une faiblesse notable pour la première puissance du continent.

L’autre poids lourd sur ces dossiers sera le ministre de la Défense social-démocrate, Boris Pistorius, reconduit.

Ce dernier est notamment connu pour son soutien sans faille à l’Ukraine face à la Russie. Avec un budget inédit, l’homme politique allemand le plus populaire aura les moyens de ses ambitions. Il aura notamment la charge de superviser un vaste programme inédit de réarmement de l’Allemagne de plusieurs centaines de milliards d’euros et de rendre le pays plus autonome militairement des États-Unis, suite au repli stratégique amorcé en Europe par l’administration du président américain Donald Trump.

Sept ministres sociaux-démocrates présents dans le gouvernement de coalition
Boris Pistorius réussit le tour de force de devenir le responsable politique le plus populaire dans une Allemagne longtemps profondément pacifiste et méfiante envers son armée. Il avait choqué l’an dernier, surtout au sein des nombreux pacifistes de son propre parti, en déclarant qu’il fallait rendre à la Bundeswehr « sa capacité à faire la guerre ». L’ancien ministre régional, quasi inconnu à sa nomination en 2023, a convaincu aussi bien la population que les militaires par son franc-parler et son dynamisme à un poste devenu clé, alors que la Bundeswehr a besoin de se réarmer face à la menace russe.

Sept ministres sociaux-démocrates feront partie du gouvernement de coalition.

Le SPD tiendra notamment les cordons de la bourse avec le ministre des Finances, Lars Klingbeil, qui gérera, hormis le budget, le fonds de 500 milliards pour la remise à niveau des infrastructures. La présidente sortante du Bundestag, Bärbel Bas, aux Affaires sociales, s’occupera d’un portefeuille clé pour le parti de gauche.

Friedrich Merz, hormis la politique étrangère, veut marquer des points sur un sujet central de la campagne électorale : l’immigration. Le nouveau ministre de l’Intérieur, un chrétien-social bavarois, promet des mesures fermes et rapides. Mais certaines suscitent des polémiques comme le refoulement des migrants aux frontières que dénonce notamment la Pologne voisine.

« Friedrich Merz doit bien gouverner, au centre, contre une extrême droite populiste et hargneuse et contre une extrême gauche populiste et envieuse. Le défi capital, c’est la gestion de la migration dans une société vieillissante, qui sait qu’elle a besoin de migrants, et une société qui paraît souvent surmenée par cette migration. »

Autre défi au copieux programme du nouveau chancelier : la relance de l’industrie allemande, puissante un temps mais aujourd’hui affaiblie. Le secteur automobile, pilier de l’économie du pays, est particulièrement concerné. Cette industrie doit affronter la concurrence chinoise et encaisser un nouveau choc, celui des droits de douanes de Donald Trump, alors que les États-Unis sont le premier partenaire commercial de l’Allemagne. Là aussi, le programme d’investissements massifs sera mis à contribution.

Allemagne: le gouvernement de coalition de Friedrich Merz se veut discret sur les thématiques d’environnement
Friedrich Merz prend, mardi 6 mai, ses fonctions à la tête d’une coalition de centre-droit et centre-gauche qui entend mettre l’accent sur les questions économiques, migratoires et de défense. En revanche, il reste bien timide sur les enjeux environnementaux et climatiques.

Friedrich Merz a obtenu son premier succès avant même son entrée en fonction. Avant l’institution, mardi 6 mai, du nouveau parlement, il a profité en mars de la composition plus favorable du Bundestag sortant pour faire voter un important effort budgétaire : 500 milliards d’euros destinés à relancer la croissance. Un résultat obtenu en partie grâce au soutien des Verts allemands, qui ont monnayé leur vote contre l’inscription dans la Constitution de l’objectif d’une neutralité carbone en 2045, ainsi que le fléchage de 100 milliards de ce fonds spécial vers des projets favorables au climat.

Las, un mois plus tard, le contrat de coalition signé entre les chrétiens-démocrates de Friedrich Merz et les sociaux-démocrates d’Olaf Scholz met l’accent sur la politique étrangère, la relance de l’économie et l’immigration. Il est quasiment muet sur les questions environnementales et climatiques, et on serait bien en peine de citer une mesure emblématique. Il se contente des poursuivre des politiques déjà entamées ou, au contraire, il les atténue.

Friedrich Merz a toujours dit qu’il ne ferait pas de la protection du climat une priorité absolue. Dont acte, au grand dam des défenseurs de l’environnement qui espéraient beaucoup mieux, compte tenu de l’argent mis à disposition.

RFI

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