Le président américain Donald Trump a signé jeudi un décret appelant au démantèlement du ministère de l’Éducation, mettant ainsi en œuvre une promesse de campagne visant à faire disparaître une institution ciblée de longue date par les conservateurs.
Donald Trump a signé jeudi 20 mars un décret visant à « éliminer » le ministère de l’Éducation, un projet applaudi par la droite américaine qui a fait des écoles un terrain de lutte contre les idées progressistes.
« Nous allons l’éliminer », a déclaré le président américain peu avant de signer le document à la Maison Blanche. « Nous allons le fermer et le fermer le plus rapidement possible », a-t-il ajouté.
Dans un salon de la Maison Blanche en partie transformé en salle de classe, entouré d’enfants assis derrière des pupitres d’écoliers, le président américain a étrillé l’institution fondée en 1979, dont le rôle aux États-Unis est relativement limité.
Son décret donne à la ministre de l’Éducation, Linda McMahon, la mission de « commencer à éliminer le ministère une bonne fois pour toutes », a dit Donald Trump.
L’ancienne patronne du catch américain a d’ores et déjà supprimé quelque 2 000 postes du ministère, la moitié de l’effectif total.
Devant la presse à la Maison Blanche, Linda McMahon a déclaré que le président voulait « rendre cet argent aux États, sans la bureaucratie de Washington ».
« Coup de force tyrannique »
Le chef des démocrates au Sénat, Chuck Schumer, a immédiatement appelé les tribunaux à agir pour « mettre un terme au coup de force tyrannique » que représente selon lui ce décret, « l’une des mesures les plus destructrices et dévastatrices » jamais prises par Donald Trump.
Un démantèlement complet relève du pouvoir parlementaire, mais le président américain et son allié Elon Musk ont déjà démonté d’autres structures fédérales sans attendre de feu vert des élus au Congrès.
Le sénateur républicain de Louisiane Bill Cassidy a immédiatement annoncé sur X que « puisque le ministère de l’Éducation ne peut être fermé qu’avec l’accord du Congrès », il allait lui-même « soutenir l’objectif du président en introduisant un projet de loi pour y parvenir le plus vite possible ».
« Nous voulons rendre l’éducation aux États (américains), là où elle doit être », a encore dit Donald Trump, saluant les gouverneurs Ron DeSantis (Floride) et Greg Abbott (Texas), deux représentants de la droite radicale connus pour leurs positions très conservatrices en matière d’éducation.
« Les États-Unis dépensent plus pour l’éducation que tout autre pays (…) et pourtant nous sommes près du bas de la liste en termes de performance » scolaire, a-t-il déploré.
L’argument a été réfuté par des experts, qui soulignent que les États-Unis ne sont pas si mal classés dans les tests internationaux.
Plusieurs chercheurs appellent à prendre en compte également les effets de la pandémie de Covid-19 et des écrans sur les apprentissages.
Moins de dépenses publiques
Le président américain a précisé que les fonctions selon lui « utiles » du ministre seraient préservées, en particulier des bourses pour les enfants défavorisés et des aides pour les élèves en situation de handicap.
L’offensive contre ce ministère s’inscrit aussi dans la volonté de Donald Trump de tailler dans les dépenses publiques.
L’impact de ce démantèlement annoncé n’est pas comparable avec ce qu’il serait dans un pays centralisé où l’éducation est gérée au niveau national, comme la France. Aux États-Unis, ce domaine relève déjà largement des autorités locales.
Mais le rôle du ministère américain de l’Éducation n’est pas pour autant anecdotique. Les subventions fédérales jouent un rôle important pour les écoles situées dans des zones défavorisées sur le plan économique et social.
Le ministère de l’Éducation ne peut pas être complètement démantelé sans l’adoption d’une loi nécessitant 60 votes au Sénat, où les républicains disposent actuellement de 53 sièges.
Une initiative similaire visant à démanteler l’agence américaine de développement, l’USAID, a été jugée mardi « probablement » inconstitutionnelle par un tribunal fédéral.
La décision de Donald Trump suscite la colère d’élus démocrates, de syndicats d’enseignants ainsi que de nombreux parents, qui l’accusent de mener une attaque inédite contre l’enseignement public, doublée d’une entreprise de promotion d’idées réactionnaires.
« Monsieur le président, rendez-vous au tribunal », a écrit sur X Randi Weingarten, dirigeante du syndicat d’enseignants AFT.
La droite américaine, en particulier les mouvements évangéliques, accusent les écoles publiques d’endoctriner les enfants en diffusant des idées « woke ».
Ce terme péjoratif, fourre-tout, est utilisé pour dénoncer aussi bien des politiques de promotion de la diversité que des courants de recherche universitaire sur le genre ou les discriminations raciales.
Dans certains États conservateurs du Sud, des contenus pédagogiques ayant trait à l’esclavage ont été modifiés et des romans traitant d’homosexualité ou de racisme ont été retirés des bibliothèques scolaires.
AFP