Le romancier tanzanien est le premier auteur d’origine africaine nobélisé depuis le Sud-Africain John Maxwell Coetzee, en 2003.
Auréolé du Nobel de littérature, Abdulrazak Gurnah reçoit ce lundi 6 décembre le plus prestigieux des prix littéraires pour ses récits sur l’immigration et la colonisation, lors d’une cérémonie au Royaume-Uni où le romancier né à Zanzibar vit en exil depuis plus d’un demi-siècle.
Pandémie oblige, les Nobel en sciences et littérature sont remis, sans le faste habituel, dans les pays des lauréats pour la deuxième année consécutive. A Londres, Abdulrazak Gurnah se verra remettre à la mi-journée sa médaille et son diplôme par l’ambassadrice de Suède à sa résidence officielle. Le prix est doté de dix millions de couronnes suédoises (presque 1 million d’euros).
Salué pour son « attachement à la vérité »
Abdulrazak Gurnah, 72 ans, est le premier auteur d’origine africaine à recevoir le prix Nobel de littérature depuis le Sud-Africain John Maxwell Coetzee en 2003. Il a été consacré pour ses récits sur l’époque coloniale et post-coloniale en Afrique de l’Est et sur les tourments de réfugiés coincés entre deux mondes.
Le jury a salué son récit « empathique et sans compromis des effets du colonialisme et le destin des réfugiés pris entre les cultures et les continents« . Il a également loué son « attachement à la vérité et son aversion pour la simplification« .
Né en 1948 à Zanzibar, un archipel au large des côtes de l’Afrique de l’Est qui fait aujourd’hui partie de la Tanzanie, Abdulrazak Gurnah s’est réfugié en Angleterre à la fin des années 60, quelques années après l’indépendance de cet ancien protectorat britannique, à un moment où la communauté arabe était persécutée.
Il a commencé à écrire à 21 ans au Royaume-Uni, pays dont il a acquis la nationalité, inspiré par ses souvenirs et son expérience d’immigré. « Je veux écrire sur les interactions humaines, ce que les gens traversent quand ils reconstruisent leur vie« , avait-il déclaré lors d’une conférence de presse, au lendemain de sa consécration début octobre.
Un auteur engagé sur la question migratoire
Dans une tribune du quotidien britannique The Guardian en 2004, il expliquait être « tombé » dans l’écriture, sans l’avoir prévu. Et il n’a pas vu venir la récompense suprême : « Vous écrivez du mieux que vous pouvez, et vous espérez que ça marche !«
Auteur parfois méconnu avant le Nobel, l’écrivain a publié dix romans, dont trois ont été traduits en français (Paradis, Près de la Mer et Adieu Zanzibar), ainsi que plusieurs nouvelles. Il écrit en anglais même si sa langue d’origine est avant tout le swahili. Il vit aujourd’hui à Brighton, dans le sud-est de l’Angleterre, et a enseigné la littérature à l’Université du Kent jusqu’à sa retraite.
Prix Nobel ou pas, le romancier a assuré qu’il continuerait à parler franchement des questions qui ont façonné son oeuvre et sa vision du monde. « C’est ma manière de parler », a-t-il dit, « je ne joue pas un rôle, je dis ce que je pense« . Il fustige ainsi la ligne dure des gouvernements européens sur l’immigration en provenance d’Afrique et du Moyen-Orient, la considérant cruelle et illogique.
Son dernier livre, Afterlives, suit un petit garçon volé à ses parents par les troupes coloniales allemandes et qui revient dans son village pour retrouver ses parents disparus et sa soeur.
2021 a été une année faste pour la littérature africaine, avec trois grands prix – le Nobel, le Booker Prize et le Goncourt – remportés par des écrivains africains.
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