Les chiffres sont éloquents, et illustrent, s’il le fallait encore, la déferlante du variant Omicron en France. Ce mardi, Santé publique France a enregistré 179.807 infections supplémentaires au cours des dernières 24 heures dans le pays, un record absolu de contaminations dont le précédent avait été jaugé samedi avec 104.611 cas positifs. L’escalade ne devrait pas s’arrêter là puisque selon le ministre de la Santé Olivier Véran, le cap des 250.000 contaminations quotidiennes devrait être atteint début janvier.
Une évolution classique du virus
La reprise épidémique est criante dans le pays, avec des compteurs qui s’affolent. Mi-décembre, on dénombrait ainsi 50.000 cas. A peine deux semaines plus tard, la jauge est en passe d’atteindre les 180.000. Afin d’endiguer cette courbe, le gouvernement, par l’intermédiaire de Jean Castex, a annoncé lundi une série de nouvelles mesures pour tenter d’enrayer la progression de l’épidémie et du variant Omicron. Ce dernier représenterait 27,4% des cas suspectés à l’heure actuelle en France.
Selon les professionnels de santé, ces chiffres spectaculaires, s’ils illustrent bien l’avancée rapide d’Omicron, sont à prendre avec un certain recul – en particulier en ce qui concerne les statistiques des dernières heures – et ne sont pas synonyme d’un variant incontrôlable. « C’est un chiffre record, mais c’est suite à un week-end avec des jours fériés et lundi, les laboratoires font beaucoup moins de tests. Il y a un effet de décalage », explique sur BFMTV Mahmoud Zureik, professeur d’épidémiologie et de santé publique.
« Si on prend les trois derniers jours, on est à peu près à 240.000 contaminations, c’est du jamais vu depuis le début de l’épidémie », insiste-t-il toutefois.
Dans sa réflexion, il est rejoint par Pascal Crépey, épidémiologiste et enseignant-chercheur à l’École des hautes études en santé publique de Rennes, qui souligne lui aussi qu’il ne faut pas « sur-interpréter » ces chiffres malgré leur spectacularité.
« En fait on est sur une progression épidémique classique, on sait qu’on ne contrôle pas cette épidémie dans le sens ou l’incidence augmente de jour en jour. Le virus ne va pas plus vite que ce que l’on pensait, il va à son rythme, on a un R supérieur à 1 et malheureusement cette augmentation de l’incidence est attendue », insiste-t-il.
Quelles conséquences sur l’hôpital?
Selon ces spécialistes, il faut désormais anticiper ce à quoi pourrait ressembler la situation hospitalière à très court terme, d’ici deux semaines, la latence qui existe entre les contaminations et les premières hospitalisations et réanimations. Une progression « mathématique », reprend Mahmoud Zureik.
« La déferlante on l’a déjà sur les contaminations, la courbe va encore augmenter. Les conséquences sur l’hôpital on ne sait pas encore, les systèmes de santé sont épuisés, et il faut prévenir l’entrée de nouvelles admissions. Si l’on regarde les courbes d’hospitalisations, elles arrivent à un plateau, on ne sait pas encore l’effet si ce n’est que quantitativement, s’il y a plus de contaminations, il y aura plus d’hospitalisations. Il va aussi pénétrer chez les populations les plus vulnérables », souligne de son Yves Coppieters, médecin épidémiologiste.
Pour Pascal Crépey, l’annonce de nouvelles mesures par le gouvernement va dans le bon sens, mais ne devrait pas empêcher les hospitalisations d’exploser d’ici mi-janvier.
« Ce qui est certain c’est que les mesures annoncées ne seront pas mises en place tout de suite, il y a une inertie entre le moment où l’on voit les cas positifs et le moment où ces cas se transforment en hospitalisations, ou en arrivées en réanimation et en décès, un délai de deux ou trois semaines, Une bonne partie de l’activité hospitalière de janvier est déjà tracée. Les personnes hospitalisées en janvier sont aujourd’hui déjà infectées, il est malheureusement déjà trop tard pour éviter une saturation dans certains régions », alerte-t-il.
Omicron potentiellement moins dangereux
La grande interrogation de ces prochaines semaines sera également de savoir si le variant Omicron est plus dangereux, ou non, que le variant Delta qui est désormais minoritaire dans plusieurs pays, dont la France. « La grande inconnue c’est sa gravité, il est moins grave, mais on observe qu’en Grande-Bretagne il y a une augmentation des hospitalisations de plus de 50% », rappelle Mahmoud Zureik.
« Ce qui est rassurant c’est que ce qui avait été observé en Afrique du Sud, sur le fait que le variant est moins sévère, semble se confirmer. Ce qui fait que l’ampleur de cette vague va être moins importante que ce qu’elle aurait été avec Delta », analyse Pascal Crépey, qui estime qu’il est encore possible de freiner la courbe. « Ce virus n’est pas magique, on sait comment il se transmet. »
Cependant, selon Yves Coppieters, cette explosion des contaminations pourrait également provoquer certains dommages collatéraux importants.
« Le système de testing va être dépassé, il est limité aux ressources disponibles et le système va être dépassé, comme le suivi des cas contacts. Il faut revoir les critères de testing, de suivi et d’isolement, c’est très important à envisager avant début janvier », conclut-il.
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