Ethiopie: l’aide humanitaire suspendue dans la zone du Tigré touchée par une frappe aérienne

Les organisations humanitaires ont suspendu leurs activités dans la zone de Dedebit, touchée par une attaque aérienne meurtrière contre un camp de déplacés dans la région éthiopienne en guerre du Tigré, a annoncé dimanche l’ONU.

« Les partenaires humanitaires ont suspendu leurs activités dans la zone en raison des menaces continues de frappes de drones », a déclaré à l’AFP le Bureau de coordination des affaires humanitaires de l’ONU (Ocha).

Selon les informations préliminaires d’Ocha, l’attaque, menée vendredi vers minuit contre le camp de déplacés de la ville de Dedebit, a « fait des dizaines de victimes civiles, dont des décès ».

Les rebelles tigréens ont accusé samedi le gouvernement d’avoir mené une attaque de drone ayant tué selon eux 56 personnes, tandis qu’un responsable du principal hôpital de la région a fait état de 55 morts et 126 blessés.

Le porte-parole du Front de libération du peuple du Tigré (TPLF), Getachew Reda, a également affirmé sur Twitter dimanche que l’armée érythréenne, qui a soutenu les forces gouvernementales éthiopiennes contre les rebelles et a été accusée de commettre des atrocités, avait lancé des attaques contre ses combattants dans le nord-ouest du Tigré samedi.

Il a accusé l’Érythrée de chercher à « saboter tous les efforts de paix dans la région, soi-disant pour protéger l’unité de l’Éthiopie ».

Mais il était impossible de vérifier ces affirmations de manière indépendante, l’accès au Tigré étant très restreint et les communications coupées dans cette région.

Les responsables du gouvernement éthiopien n’ont pas répondu aux sollicitations de l’AFP.

« Intensification des frappes »

Selon Ocha, le manque de fournitures essentielles, en particulier de matériel médical et de carburant, « perturbe gravement la réponse aux blessés et a conduit à l’effondrement presque total du système de santé au Tigré ».

« L’intensification des frappes aériennes est alarmante, et nous rappelons une fois de plus à toutes les parties au conflit qu’elles doivent respecter leurs obligations en vertu du droit humanitaire international », a ajouté l’agence onusienne.

L’attaque a eu lieu au moment où le gouvernement éthiopien annonçait l’amnistie de plusieurs hauts responsables du TPLF et d’autres dirigeants de l’opposition, après un appel à la « réconciliation nationale » lancé à l’occasion de la célébration du Noël orthodoxe par le Premier ministre Abiy Ahmed.

L’amnistie a été saluée par les Nations unies et l’Union africaine, fers de lance des efforts internationaux pour mettre fin au conflit, qui ont appelé à saisir cette occasion pour entamer un « dialogue ».

Il n’a pas été précisé si le gouvernement avait proposé des négociations au TPLF, parti qui a dirigé de fait l’Ethiopie pendant trois décennies jusqu’à ce que M. Abiy prenne le pouvoir en 2018, et désormais considéré comme un groupe « terroriste » par Addis Abeba.

Le conflit a démarré en novembre 2020 quand l’armée fédérale est intervenue au Tigré pour destituer les autorités régionales – issues du TPLF – qui contestaient son autorité.

Une contre-offensive du TPLF a permis aux rebelles de reconquérir fin juin 2021 l’essentiel de la région et de progresser dans celles voisines de l’Amhara et de l’Afar. Ils ont affirmé en novembre être arrivés à 200 km d’Addis Abeba.

Le conflit a fait des milliers de morts. Le Tigré est soumis, selon l’ONU, à un « blocus de facto » de l’aide humanitaire.

Les rebelles se sont repliés fin décembre dans leur fief du Tigré face à une offensive militaire des forces gouvernementales, qui ont repris le contrôle d’une série de villes stratégiques.

Les affrontements avaient connu une accalmie depuis la retraite du TPLF, bien que les rebelles accusent le gouvernement de continuer à mener des frappes meurtrières de drones sur le Tigré.

Trois autres personnes ont été tuées dans un raid aérien sur un camp de réfugiés de la région, avait rapporté l’ONU cette semaine.

Le bureau des affaires africaines du département d’État américain a qualifié ces attaques d' »inacceptables », appelant sur Twitter « à la fin immédiate des hostilités, au lancement rapide d’un dialogue national inclusif et à un accès sans entrave » de l’aide.

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