Les startups de la technologie financière (FinTech) gagnent du terrain en Afrique. Sur les dix startups africaines qui ont levé 100 millions de dollars ou plus en 2021, huit étaient des startups fintech. Une somme colossale de 2,2 milliards USD de financement de capital-risque est allée aux startups africaines de la fintech en 2021 selon «Africa: The Big Deal», une base de données de financement de startups qui suit les financements en capital risque en Afrique de plus de 100,000 USD. L’année dernière également, quatre des entreprises de fintech du continent ont atteint ou dépassé des valorisations d’un milliard de dollars. Au nombre des facteurs qui contribuent à l’essor du secteur de la fintech en Afrique on peut noter la population du continent de 1,3 milliard d’habitants, le fait que plus de 57 % des adultes ne soient pas bancarisés et la prolifération des téléphones portables. La pénétration rapide d’Internet, les perspectives économiques positives et la nécessité d’accroître l’inclusion financière dans la région ont également un rôle à jouer.
Près de la moitié du financement de la fintech en Afrique en 2021 est allée aux startups fintech de la Communauté Economique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). En effet, en 2021, un total de 202 entreprises de fintech dans l’espace CEDEAO a levé 1,06 milliard de dollar (Africa: The Big Deal). Dans la région de l’Afrique de l’Ouest, trois entreprises de fintech ont levé chacune plus de 100 millions de dollars US en 2021. En premier lieu, OPay, une société nigériane de paiement mobile a levé 400 millions de dollars US. Deuxièmement, Flutterwave, une autre start-up fintech basée au Nigéria qui simplifie les paiements pour les entreprises, a levé 170 millions de dollars US. Il est important de noter que près de 80 % des financements des fintechs dans la CEDEAO sont allés aux fintechs nigérianes. Aujourd’hui, le Nigéria abrite plus de 200 entreprises de fintech. Ce n’est pas surprenant, puisque le Nigeria est la plus grande économie d’Afrique et représente plus de la moitié de la population estimée à 400 millions d’habitants de la CEDEAO. La troisième fintech ouest-africaine à avoir levé plus de 100 millions de dollars l’année dernière était Wave, un fournisseur sénégalais d’argent mobile et première licorne en Afrique francophone. Wave a obtenu le plus gros tour de table de série A d’une startup africaine en levant 200 millions USD.
Collectivement, les entreprises fintech situées dans l’espace CEDEAO ont fait des progrès significatifs dans le développement économique de la région. Certaines d’entre elles permettent aux clients d’envoyer, de recevoir et de stocker de l’argent à l’aide de leur téléphone portable. Selon le rapport de l’association Global System for Mobile Communications (GSM) sur l’industrie de l’argent mobile, 6,4 milliards de transactions d’une valeur de 178 milliards USD ont été traitées en Afrique de l’Ouest en 2021. Les populations utilisent l’argent mobile pour payer des achats quotidiens, des recharges mobiles aux factures d’électricité et aux frais de scolarité. En Côte d’Ivoire par exemple, 94 % des frais de scolarité des élèves sont payés par « mobile money », selon L’Economiste. Les entreprises fintech permettent également aux populations d’Afrique de l’Ouest d’ouvrir des comptes d’argent mobile et de faire des achats en ligne avec des géants du commerce électronique tels qu’Alibaba et Amazon. Quelques-unes d’entre elles, comme Fido, basée au Ghana, tirent parti de l’IA et de l’apprentissage automatique pour fournir aux particuliers des notes de solvabilité. Les fournisseurs d’argent mobile facilitent les prêts entre pairs, favorisant ainsi l’accès au crédit via des prêts instantanés. De plus, les startups fintech ont élargi l’accès au crédit dans les zones rurales. Quelques fintechs proposent même des prêts de fonds de roulement non garantis aux petites et moyennes entreprises. De plus, en matière de finances personnelles, certaines fintechs proposent un suivi et une budgétisation automatisés des dépenses. Les fintechs offrent aux jeunes des opportunités d’emploi et une raison de développer des compétences techniques.
Les startups de fintech ont un impact holistique dans la sous-région. Elles ont attiré des investissements étrangers dans les pays de la CEDEAO. Il convient également de mentionner que la fintech est un catalyseur de l’intégration régionale en raison du fait qu’elle facilite les paiements transfrontaliers, accroît le commerce intra-africain et améliore la mise en œuvre de la ZLECAf (Zone de libre-échange continentale africaine). L’utilisation généralisée du mobile money peut contribuer à la croissance des économies ouest-africaines, car l’utilisation des services monétaires mobiles entraînera probablement une augmentation de la productivité pour les entreprises et les gouvernements. Les Fintechs contribuent à l’avancement de l’inclusion financière, à la réduction de la pauvreté et de la faim, et à l’amélioration de l’accès à l’éducation et aux soins médicaux.
Les entreprises de fintech ont transcendé les secteurs financiers. D’une part, la prolifération de l’utilisation de l’argent mobile a conduit à la croissance des entreprises de technologie d’assurance ou InsurTech, une sous-catégorie de la fintech. Ces InsurTechs s’aventurent sur des marchés inexploités et répondent à des besoins non satisfaits dans la sous-région.
Par exemple, Oko, une startup opérant au Mali, utilise les données satellitaires et les paiements mobiles pour proposer des produits d’assurance-récolte, réduisant ainsi les risques pour les agriculteurs touchés par de graves catastrophes liées aux conditions météorologiques, telles que les sécheresses et les inondations. Au Nigéria, MTN, une entreprise de télécommunications de premier plan, s’est associée à CarePay, une société de fintech qui propose une assurance maladie à la population locale. La caractéristique unique de CarePay est que les clients qui utilisent leur téléphone mobile pour recevoir, stocker et dépenser de l’argent ne peuvent utiliser cet argent que pour des dépenses liées à la santé.
De toute évidence, les entreprises fintech utilisent des solutions innovantes qui répondent aux besoins critiques de la région ouest-africaine, mais de nombreux défis subsistent. À l’avenir, il sera essentiel que les entrepreneurs, les investisseurs et les décideurs publics fournissent un effort concerté pour tirer parti des nombreuses opportunités qui existent. Par exemple, selon les Nations Unies, 90% des transactions de commerce de détail en Afrique de l’Ouest se font encore en liquide. Pour exploiter cette opportunité, favoriser l’inclusivité financière et élargir l’accès au financement, les décideurs publics de la sous-région doivent promulguer des réglementations permettant aux fonds de pension locaux de faire des investissements en capital-risque. Bien qu’il existe une multitude d’incubateurs en Afrique de l’Ouest qui offrent une formation de démarrage et un mentorat, il existe un soutien limité pour les entreprises qui sont prêtes à se développer au-delà des frontières nationales. En outre, pour réaliser un avenir plus équitable financièrement et socialement pour la région ouest-africaine, les investisseurs devraient fournir des efforts pour réduire les inégalités de financement entre les créateurs et les créatrices de startups fintech car seulement 4,5 % des investissements accordés aux fintechs ouest-africaines sont allés à des femmes fondatrices.
L’avenir est en effet radieux pour la communauté fintech en Afrique de l’Ouest comme dans d’autres parties du monde. Une collaboration organique entre les entrepreneurs fintech permettrait au secteur fintech de prospérer et d’avoir un plus grand impact sur les communautés. Comme le dit le proverbe : « Si tu veux aller vite, marche seul. Si tu veux aller loin, marchons ensemble » – proverbe africain.
financial
1 Commentaire