Le Conseil de sécurité s’est penché jeudi 7 avril 2022 sur la situation au Mali. C’était au cours d’une séance d’information publique suivie de consultations privées, sur la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali. Occasion pour le ministre des Affaires étrangère et de coopération internationale, Abdoulaye Diop, par la voix du Représentant du Mali à l’ONU, de rassurer la communauté internationale sur la volonté du gouvernement de la transition d’aller vite vers un retour à l’ordre constitutionnel…
En effet, Issa Konfourou, Ambassadeur, Représentant permanent du Mali auprès des Nations Unies intervenant au nom de Abdoulaye Diop, Ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, a assuré que le retour à l’ordre constitutionnel figure parmi les priorités du Gouvernement de transition. Il a cependant fait valoir que l’instabilité politique et institutionnelle prend son origine dans des élections mal organisées et dans la mauvaise gouvernance. C’est pourquoi, a-t-il dit, le Gouvernement de transition tient à faire des réformes majeures visant notamment à assurer une stabilité des institutions, tout en créant les conditions minimales de sécurisation pour permettre la tenue d’élections. À cette aune, il a demandé la levée immédiate des sanctions « injustes, illégales, illégitimes et inhumaines » prises par la CEDEAO et l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA), non sans dénoncer un acharnement visant asphyxier le peuple malien, à le punir pour ses choix politiques et à obtenir un changement de régime.
Évoquant ensuite la situation sécuritaire, le représentant a indiqué que le Gouvernement continue de renforcer les capacités des forces armées maliennes, ce qui « donne des résultats très encourageants » sur le terrain. Depuis décembre 2021, a-t-il rappelé, les forces de défense et de sécurité maliennes infligent de lourdes pertes aux groupes extrémistes et sécurisent les populations. À ce sujet, il a souhaité répondre aux accusations selon lesquelles le Gouvernement malien recourrait à une société de sécurité privée. « Je le redis ici et avec force: le Mali n’a pris aucun engagement de cette nature », a-t-il protesté, reconnaissant toutefois qu’à la faveur de sa coopération avec la Russie, son pays continue de se procurer du matériel militaire pour sa sécurité et fait appel à des instructeurs russes.
S’agissant de la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, Issa Konfourou a assuré que le Gouvernement reste engagé à permettre son accélération, tout comme il est déterminé à renforcer la participation des femmes au processus de paix. Si le processus de désarmement, démobilisation et réintégration/réinsertion (DDR) connaît quelques difficultés, en dépit des propositions du Gouvernement, ce dernier est dans l’attente de la liste des mouvements signataires pour permettre le démarrage du volet réinsertion des anciens combattants, a précisé M. Konfourou. Il a également souligné que, contrairement aux affirmations du Secrétaire général, le Gouvernement reste engagé dans la mise en œuvre des programmes de développement des régions du Nord.
Abordant ensuite la situation des droits humains, le représentant a reconnu que la crise complexe que traverse le Mali depuis une dizaine d’années et la perte du contrôle de certaines parties du territoire national ont entraîné des atteintes à ces droits. Cependant, il n’y a aucune volonté délibérée des autorités maliennes d’accorder des « primes à l’impunité », a-t-il affirmé, relevant que la justice malienne est systématiquement saisie chaque fois que des violations sont signalées. Il a précisé que les opérations militaires encours dans la zone de Moura font suite à des renseignements qui ont permis de localiser la tenue d’une rencontre entre différents « katibas » et ont confirmé que ce secteur était un « sanctuaire terroriste ». À propos des « événements de Moura », il a signalé l’ouverture, par la Gendarmerie nationale, d’enquêtes approfondies sur les allégations d’exactions présumées commises en mars sur des civils dans cette zone. En attendant les conclusions de ces investigations, il a appelé toutes les parties prenantes à la retenue et à éviter les qualificatifs de massacres ainsi que les allégations sans fondement proférées à l’encontre des forces armées maliennes.
Il a par ailleurs estimé que la détérioration continue de la situation humanitaire au Mali est due à la mauvaise saison de pluie enregistrée l’année dernière, à l’impact négatif des sanctions de la CEDEAO et de l’UEMOA sur les populations, ainsi qu’à l’insécurité dans les régions du Centre du pays. Pour y remédier, le Gouvernement travaille, avec l’appui des partenaires bilatéraux et multilatéraux, à apporter l’assistance nécessaire aux Maliens en situation de vulnérabilité, a-t-il dit, avant d’insister à nouveau sur la nécessaire levée des sanctions, « surtout au moment où nos forces armées gagnent en confiance et remportent des victoires sur plusieurs fronts ».
Pour sa part, El Ghassim Wane, Représentant spécial du Secrétaire général pour le Mali, a déclaré que la situation d’ensemble est extrêmement préoccupante. Les civils sont confrontés à d’immenses souffrances. Il n’y a pas eu de progrès notable dans la mise en œuvre de l’accord de paix. De plus, malgré les efforts considérables déployés à cet effet, aucun consensus n’a été trouvé autour de la durée de la transition.
Sur la situation politique, Le Représentant spécial a rappelé que le non-achèvement de la Transition dans les délais convenus a conduit la CEDEAO à imposer des sanctions économiques et financières en janvier dernier, notant que l’impasse persiste, exacerbant les tensions entre le Mali et la CEDEAO. Le Mali a demandé 24 mois supplémentaires pour mettre fin à la Transition, mais cette durée a été jugée trop longue lors du Sommet extraordinaire de la CEDEAO qui s’est tenu à Accra le 25 mars et a approuvé un délai de 12 à 16 mois, a rappelé El Ghassim Wane : « Aucun effort ne doit être épargné pour parvenir à un accord sur la Transition. Cela permettrait non seulement de lever les sanctions, une mesure essentielle compte tenu de la situation humanitaire actuelle, mais aussi de créer un environnement plus propice à la poursuite des autres processus fondamentaux pour la stabilisation du pays ».
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