RDC : Werrason et JB Mpiana enfin réconciliés reforment Wenge Musica

C’est officiel, le groupe sera de retour sur scène le 30 juin, jour de la fête de l’indépendance, au stade des Martyrs de Kinshasa. Pas moins de 80 000 personnes sont attendues pour acclamer les musiciens. Un évènement qui arrive après vint-cinq ans d’un combat sans merci entre les deux leaders.

Depuis le 5 septembre 1997, la rumba congolaise était orpheline d’un de ses plus célèbres représentants. Une situation qui a pris fin le 28 février dernier avec la réconciliation médiatisée de ses deux artistes phares. Leur discorde a trouvé sa source dans la rivalité qui rythmait leurs relations. Et cette concurrence avait fini par contaminer tout le groupe. Guerres d’égo et mésententes entre les quatre administrateurs, à savoir Werrason, JB Mpiana, Didier Masela et Alain Makeba : Wenge Musica n’était plus. À partir de là, chacun pouvait tracer son chemin artistique et fonder un groupe autour de sa personne avec ses propres chanteurs et musiciens. Werrason créa Wenge maison mère et Wenge BCBG naquit de l’esprit de son rival.

« Ils ne se faisaient pas de cadeaux. La rivalité entre eux avait atteint des sommets », nous glisse Amadou Diaby, homme d’affaires congo-guinéen, producteur et aussi celui qui a réussi à les réconcilier. Une confrontation où chacun se rendait coup pour coup. Une concurrence qui frisait le comique lorsqu’en 2001, à la Fikin (Foire internationale de Kinshasa) aucun des deux ne voulait cesser de jouer tant que l’autre n’avait pas renoncé. Poussés par un public en fusion, ils jouèrent alors de 19 heures à 8 heures du matin. Il fallut que la police interrompe ce marathon musical et disperse les spectateurs déchaînés à coups de gaz lacrymogène. Mais ce duel vira au tragique lorsque l’assistance s’affronta lors de batailles rangées, comme ce jour de 2005 – toujours à la Fikin – où la prestation de JB Mpiana fut interrompue par des heurts entre spectateurs. « Les quartiers de Kin’ étaient divisés, il y avait même des couples qui se séparaient ! » s’exclame Fabrice Kabuku, spécialiste de la musique congolaise.

Rivalité prolifique
Pour lui, il ne faut pas s’y méprendre : « Oui, il y a eu des évènements terribles. Mais cette rivalité les a aidés à vendre. » Entre 1998 et 2005, période où la tension atteignait des sommets, l’attachement des fans à leurs champions a été particulièrement prolifique pour les deux hommes. Les affaires marchaient bien au-delà des frontières congolaises. Afrique, Europe et États-Unis, accueillaient ces as de la rumba. Partout dans le monde, aucun des deux ne voulait flancher. « Lorsque l’un faisait le Zenith de Paris, l’autre se sentait obligé de le faire aussi. Quand Werrason remplit Bercy en septembre 2000, JB Mpiana l’imite un an plus tard », nous dit Fabrice Kabuku, avec une pointe de fascination dans la voix, lorsqu’il évoque ce duel au sommet.

Chacun avait son public. D’un côté « Wera », ambassadeur de la paix de l’Unesco, avec son étiquette de chanteur du peuple. Un artiste qui parle aux « shegueys », ces jeunes hommes livrés à eux-mêmes dans les faubourgs de Kinshasa. JB Mpiana lui, est dans son style davantage sophistiqué, plus bling-bling. Un trait que l’on trouve dans le nom du groupe qu’il a crée après la dislocation de 1997 : Wenge BCBG…

« Cet antagonisme stylistique allait même au-delà de la musique, se souvient-il . Quand vous alliez en boîte à Kin’, vous saviez qui était pro-Werra ou pro-JB Mpiana. Les premiers avaient un style urbain tandis que les seconds s’habillaient avec un look plus distingué. »

UNE ENTREVUE SECRÈTE ET TARDIVE DE DEUX HEURES DURANT LAQUELLE LES GRIEFS SONT MIS À PLAT ET LES RANCŒURS OUBLIÉES

Comment revient-on de vingt-cinq ans de ressentiment ? Amadou Diaby a trouvé la recette. « Il fallait convaincre JB Mpiana et Werra. J’avais compris que si je réconciliais les deux, les autres administrateurs et l’ensemble du groupe emboiteraient le pas. » Il y aura eu des allers-retours et des entretiens avec l’un et l’autre durant deux mois, jusqu’à cette nuit de début février, à sa résidence de Gombé. C’est dans ce quartier résidentiel de Kinshasa, que la querelle prend fin. « Les deux sont arrivés quasi en même temps, et ils se sont tout de suite appelés par leurs surnoms. “De la Forêt” pour Werrason, et “Piano” pour son acolyte », raconte-t-il. Une entrevue secrète et tardive de deux heures durant laquelle les griefs sont mis à plat et les rancœurs oubliées.

Enregistrement d’un nouvel album
Dans son costume de producteur, Amadou Diaby s’enthousiasme : « Tout le pays attend ça. » Peut-être. Wenge Musica, crée le 12 juillet 1981, est un des piliers du patrimoine musical congolais. « Fally Ipupa et Dj Arafat se sont inspirés d’eux, insiste Fabrice Kabuku. L’influence de Wenge Musica se retrouve aussi en France. Il suffit d’écouter la rythmique des morceaux du rappeur Naza, qui puise directement dans l’afrobeat crée par Papy Kakol, le batteur de Werrason dans Wenge maison mère », poursuit-il.

Comment le public kinois et africain dans son ensemble accueillera ce come-back ? La photo des quatre administrateurs de Wenge réunis a déjà fait le buzz sur les réseaux sociaux. Werra et JB Mpiana sont désormais de retour pour de nouvelles aventures. Le 26 avril prochain, toute la troupe sera à Kinshasa pour le début des répétitions et ensuite, direction le Cap-Vert pour l’enregistrement d’un nouvel album.

jeuneafrique

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