Premier Africain à diriger l’Organisation mondiale de la santé (OMS), l’Éthiopien Tedros Adhanom Ghebreyesus a été reconduit mardi pour un second mandat. À la tête de l’OMS depuis le 1er juillet 2017, il anotamment dû gérer la lutte contre la pandémie de Covid-19, avec des appels restés souvent sans écho.
Les jeux étaient quasiment faits avant le vote à bulletins secrets lors de l’Assemblée mondiale qui se tenait mardi 24 mai à Genève, le docteur Tedros Adhanom Ghebreyesus étant le seul candidat en lice.
Premier Africain à la tête de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), à 57 ans Tedros Adhanom Ghebreyesus conserve donc son poste pour un second mandat de cinq ans.
Spécialiste du paludisme, diplômé en immunologie et docteur en santé communautaire, le Dr Tedros, comme il aime à se faire appeler, a été ministre de la Santé et chef de la diplomatie de son pays.
Son visage a été rendu familier dans le monde entier par la lutte contre la pandémie de Covid-19, l’une de ses principales préoccupations.
Une histoire personnelle liée à la guerre
Celui qui se pose en homme de paix a été marqué par une enfance plongée dans la guerre mais aussi les conflits en Ukraine, au Yémen, en Syrie et en Éthiopie au cours de son premier mandat.
« Plus encore que les pandémies, la guerre ébranle et détruit les fondations sur lesquelles reposaient des sociétés auparavant stables » et les conflits laissent « des cicatrices psychologiques qui peuvent mettre des années ou des décennies à se refermer », a récemment affirmé le Dr Tedros, pour qui « la paix est indispensable à la santé ».
Ces cicatrices sont autant de souffrances qu’il a lui-même endurées. « Je suis un enfant de la guerre », avait lancé dimanche le chef de l’OMS, très ému, à l’ouverture de l’Assemblée mondiale de la santé.
« Le bruit des coups de feu et des obus qui sifflent dans l’air, l’odeur de la fumée après l’impact, les balles traçantes dans le ciel nocturne, la peur, la douleur, la perte – ces choses sont restées en moi tout au long de ma vie, parce que j’étais au milieu de la guerre quand j’étais très jeune », a-t-il dit.
Des années plus tard, la guerre ressurgissant en Éthiopie en 1998, « cette peur » est revenue lorsque ce fut au tour de ses enfants de « se cacher dans un bunker ». Et alors que la région éthiopienne du Tigré, sa région natale, est en proie à un conflit depuis fin 2020, il avoue ressentir « à nouveau la même douleur ».
Son enfance a également été marquée par le décès d’un frère, faute de médicaments.
Détesté par Donald Trump
Chaleureux, le Dr Tedros est très apprécié, en particulier des Africains, pour avoir permis que le regard de la communauté internationale, notamment pendant la pandémie, se tourne davantage vers ce continent. C’est de son propre pays qu’est venue la principale critique, Addis Abeba l’accusant d’avoir « abusé de ses fonctions » après ses commentaires sur la situation humanitaire dans le Tigré.
L’arrivée du démocrate Joe Biden à la Maison Blanche, qui a remis les États-Unis dans le giron de l’OMS, lui a offert un second souffle, alors qu’il était attaqué sans cesse par Donald Trump, lequel avait coupé les vivres à l’organisation qu’il accusait de mal gérer la pandémie de Covid-19 et d’être trop proche de Pékin.
Le ton plus critique du Dr Tedros envers la Chine, qu’il estime ne pas être assez transparente sur l’origine de la pandémie, lui a valu quelques réprimandes de Pékin, qui soutient toutefois sa reconduction.
Un scandale de violences sexuelles en République démocratique du Congo perpétrées par des employés de son organisation – parmi d’autres travailleurs humanitaires – lui a valu une volée de bois vert à deux reprises de plusieurs dizaines de pays membres, qui jugeaient sa réaction trop molle et trop lente.
Mais la pandémie a montré que ses appels restent souvent sans écho. Après un premier mandat marqué par le Covid-19, qui a mis à nu les défaillances de l’OMS et du système sanitaire mondial, le Dr Tedros va devoir remporter le pari du renforcement de l’agence onusienne pour notamment mieux prévenir et gérer les futures épidémies.
AFP