Au terme d’une journée marquée par des échauffourées entre la police et les manifestants, l’ex-Premier ministre pakistanais Imran Khan, renversé le 10 avril par une motion de censure, est arrivé dans la nuit à Islamabad où il s’est adressé à une foule de supporteurs. Il a par ailleurs lancé un ultimatum au gouvernement, exigeant la convocation d’élections.
L’ancien Premier ministre pakistanais Imran Khan, arrivé dans la nuit du mercredi 25 au jeudi 26 mai à Islamabad à la tête de plusieurs milliers de ses supporteurs, les a ensuite appelés à se disperser, mais en lançant un ultimatum au gouvernement, sommé de convoquer sous six jours des élections.
La police pakistanaise avait dès mercredi matin verrouillé l’accès à la capitale, placée sous haute surveillance, et bloqué plusieurs routes de province y menant, pour empêcher la « longue marche » convoquée par Imran Khan d’atteindre Islamabad.
Des échauffourées ont éclaté toute la journée entre la police, qui a recouru aux gaz lacrymogènes, et les manifestants qui ont tenté d’enlever les barrages placés sur la route d’Islamabad. En fin de soirée, un ordre de la Cour suprême a finalement contraint la police à laisser entrer les marcheurs dans la capitale.
Renversé le 10 avril par une motion de censure, Imran Khan et son parti, le Pakistan Tehreek-e-Insaf (PTI, Mouvement du Pakistan pour la justice), ont organisé de vastes rassemblements dans le pays pour faire pression sur la fragile coalition au pouvoir, imposée selon lui par une « conspiration étrangère ».
Après une journée et une nuit de forte tension, l’ancien joueur vedette de cricket s’est adressé à une foule de quelques milliers de supporteurs dans le centre de la capitale, bien moins que ce qu’il avait escompté.
« Le message que je lance à ce gouvernement importé, c’est qu’il doit annoncer des élections sous six jours. Dissolvez les assemblées et convoquez une élection en juin », a-t-il déclaré, prévenant que si ce n’était pas le cas, il organiserait un nouveau rassemblement dès la semaine prochaine.
Heurts avec la police
Il a ensuite appelé à la fin de la présente marche et ses partisans ont commencé à se disperser. La date limite pour la tenue des élections législatives est fixée à octobre 2023, ce qui correspondait à la fin du mandat d’Imran Khan, élu en 2018.
Après avoir hésité, le gouvernement du Premier ministre Shehbaz Sharif semble avoir fait le choix de tenter de redresser un peu l’économie du pays, avant de se présenter devant les électeurs.
Imran Khan a été poussé sur la touche, car sa propre coalition a éclaté sous l’effet du délabrement de l’économie, avec une croissance restée nulle depuis trois ans, une inflation élevée, une roupie faible et une dette qui s’est creusée, ainsi que la détérioration de la situation sécuritaire.
Toute la journée mercredi, des heurts ont opposé la police aux membres du Pakistan Tehreek-e-Insaf (PTI, Mouvement du Pakistan pour la justice), le parti d’Imran Khan. La police a utilisé des gaz lacrymogènes notamment à Lahore, Rawalpindi, Karachi et dans la capitale.
La Commission pakistanaise des droits humains s’est déclarée « très préoccupée par les méthodes autoritaires des forces de l’ordre ». « La réaction excessive de l’État a déclenché, plus qu’elle n’a empêché, la violence dans les rues », a-t-elle twitté.
Le gouvernement s’était dit mardi déterminé à empêcher la tenue d’un événement qui ne viserait qu’à « diviser la nation et propager le chaos ».
Intervention de la Cour suprême
Mais alors que la situation s’envenimait en plusieurs endroits, la Cour suprême est intervenue en début de soirée pour ordonner au gouvernement de laisser les marcheurs se rassembler dans la capitale, bien à l’écart des bâtiments ministériels fortement protégés, pour peu que ceux-ci restent pacifiques.
Elle a aussi mis en demeure les autorités de libérer les personnes détenues par la police les 24 dernières heures. Au total, 1 700 personnes ont été arrêtées depuis que la police avait commencé à perquisitionner des maisons de partisans du PTI dans la nuit de lundi à mardi, selon le ministre de l’Intérieur, Rana Sanaullah.
Imran Khan avait fait une arrivée spectaculaire sur la marche, partie de la province du Khyber Pakhtunkhwa, bastion du PTI qui la gouverne. Il avait atterri dans son hélicoptère personnel sur une autoroute au milieu de ses partisans en voiture ou à pied agitant des drapeaux aux couleurs rouge et vert du PTI.
Il avait été élu en 2018 en dénonçant la corruption des élites symbolisée par la Ligue musulmane du Pakistan (PML-N) de M. Sharif et le Parti du peuple pakistanais (PPP) de la famille Bhutto, deux partis longtemps rivaux qui ont dominé la vie politique nationale pendant des décennies.
Imran Khan s’est accroché au pouvoir, au risque de polariser un peu plus la société pakistanaise. Engagé depuis plusieurs mois dans une surenchère rhétorique, il n’a pas hésité à prétendre que sa chute était le fruit d’une « conspiration » ourdie par les États-Unis. L’accusation a été jugée fantaisiste par Washington.
Mais il a finalement dû se résoudre à voir la PML-N et le PPP revenir au pouvoir, cette fois-ci associés dans un gouvernement de coalition.
AFP