Pertes de part de marché de sociétés françaises en Afrique : La responsabilité des acteurs français, publics et privés, indexée

Si un certain « sentiment anti-français » voit le jour et se développe en Afrique, notamment francophone, « la responsabilité des acteurs français, publics et privés » n’est pas à « nier ». Stéphanie Rivoal, financière, présidente du conseil stratégique Afrique pour le groupe Duval, soutient que le risque en Afrique est « surévalué » avant de soutenir que le positionnement des sociétés françaises et l’accompagnement des autorités publiques doivent être transformés pour faire face aux concurrents et aux pertes de part de marché sur le continent africain.

« On ne peut pas nier l’évidence. On n’entend le Burkina Faso et cela rappelle ce qu’on peut entendre au Mali notamment avec des discours anti-français très virulents. » Tel est le commentaire de la financière, diplomate française et administratrice indépendante, Stéphanie Rivoal, également diplomate française, présidente de Action contre la faim de 2013 à 2016. Elle réagissait ainsi lors d’une émission « Éco d’Ici, Éco d’Ailleurs » de Rfi, après avoir écouté un extrait d’un élément sur des burkinabais qui serait en manifestation, pour montrer leur ras-le-bol qui serait causé par la présence de certaines entreprises françaises dans leur pays.

Celle qui a été nommée ambassadrice de France en Ouganda en 2016 par François Hollande souligne qu’il y a plusieurs éléments qui expliquent cela. En effet, dit-elle, il y a le contexte géopolitique avec d’autres puissances qui sont à l’œuvre pour que ce sentiment anti-français naisse et se développe. Mais bien évidemment, ajoute-t-elle, « on ne peut pas, non plus, nier la responsabilité des acteurs français, publics ou privés, dans une situation qui, malheureusement, se détériore en part de marché ».

Elle soutient que ce sentiment anti-français vient d’une longue collaboration de sociétés françaises avec des acteurs africains et qui a donné le sentiment d’une présence trop forte, peut-être monopoliste, dans certains cas, une faveur accordée aux sociétés françaises alors même que les autorités publiques étaient, après les colonisations, assez favorables à faire perdurer ce type de collaboration et d’investissement de sociétés françaises privées dans le continent africain.

Parmi ceux appelés, par euphémisme, « Petits candidats » pour ne pas dire les inconnus du public lors des dernières élections présidentielles en France, Stéphanie Rivoal renseigne que l’arrivée d’autres acteurs sur le marché africain comme les chinois, les turcs, les indiens plus récemment mais aussi la concurrence intra-européenne avec les allemands, les hollandais et les concurrences historiques des anglais et des américains, expliquent aussi les partes en part de marchés des sociétés françaises en Afrique.

Transformer le positionnement des sociétés françaises et l’accompagnement des autorités publiques

Pour Stéphanie Rivoal, il faut une transformation sur le positionnement des sociétés françaises et l’accompagnement des autorités publiques en Afrique. « Nous avons une transformation à faire sur le positionnement des sociétés françaises et l’accompagnement des autorités publiques sur ce que nous avons à offrir au développement économique des pays africains et notamment de ceux que nous connaissons mieux, de l’Afrique francophone », fait-elle savoir.

« Aujourd’hui, le risque est surévalué en Afrique »

La perception du risque est une question complétement centrale, d’après Mme Rivoal. Selon laquelle « le travail du Conseil français des investisseurs en Afrique (Cian) est d’avoir une réelle évaluation de ce risque qui est, aujourd’hui, surévalué ». Pour elle, le contexte africain comporte autant de risques que le contexte chinois où de nombreuses sociétés françaises travaillent. « Il y a autant de risques de travailler en Chine que de travailler en Afrique, même si les risques ne sont pas les mêmes. En Afrique, il y a une réticence pour les nouveaux entrants et c’est pour cela que le Cian notamment et les autres groupes français sont là pour essayer d’aider ces nouveaux entrants à comprendre. »

« Il y a quoi comme risques en Afrique ? interroge-t-elle. Avant de citer ce qu’elle appelle risque géopolitique avec les coups d’Etat. Dans ces cas, dit-elle, ce qu’on fait c’est de se montrer résilient. A l’en croire, quand on est un acteur avec une réputation locale, on s’appuie sur ses employés qui sont là également pour expliquer que cette présence peut être tolérée. Et puis, surtout, confie Mme Rivoal, on intègre dans le modèle économique le fait qu’il y aura des moments avec des coups politiques.

Il y a aussi, selon elle, le risque de change qui peut être important dans certains pays. Et c’est là, dit-elle, où il y a des instruments français pour accompagner ces risques-là. « Il y a des risques de défaut de paiements de financements mais encore une fois les dispositifs, que ce soit de la Banque Publique d’Investissement (Bpi) ou du Proparco, sont là pour accompagner. Franchement ces risques sont partout. », soutient Mme Rivoal. Qui ajoute que le dernier risque est celui du climat des affaires local (avec qui on travaille, quels sont les partenaires, ont-ils une bonne réputation etc).

« Bien évidemment qu’ils existent mais ils existent dans beaucoup de pays si ce n’est dans tous les pays. Dans les pays d’Amérique latine le sujet est très présent. En Chine, c’est un sujet qui n’est pas non plus à négliger », constate Mme Rivoal. Il faut établir une réelle évaluation du risque en Afrique car, argue-t-elle, « les ressorts de croissance dans le monde sur les 10 ou 20 prochaines années seront en Afrique pour les sociétés françaises ».

lejecos

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