Le prix du pain grimpe au Cameroun

Baba Ali témoigne qu’il n’y a plus de pain dans sa région d’origine. Et que lorsqu’on en trouve, c’est un pain nylon, ou pain papier. C’est-à-dire un pain extrêmement léger. Ce jeune Camerounais du Nord, assis dans un restaurant à ciel ouvert au quartier Ngoa-Ekellé, à Yaoundé, est arrivé dans la capitale pour se consacrer au marché de la ferraille.

Le prix de la baguette a aussi augmenté en Europe
« Moi je mange un pain entier chaque matin. Il y a d’autres gens qui mangent un demi-pain. Il y a le pain et le pain gâteau. L’autre pain, ça coûte 150, et le pain gâteau ça coûte 100 francs. Mais j’ai choisi le pain qui coûte 150 francs », nous dit-il.

Un pain gâteau et une baguette
Le pain gâteau est un pain légèrement arrondi et léger, de l’ordre de 75 grammes, tandis que le pain de 150 francs est une baguette de 166 grammes. Il était de 200 grammes avant le déclenchement de la guerre russo-ukrainienne.

Le président de la Ligue camerounaise des consommateurs, Delors Magellan Kamgaing Kamsu, déplore la hausse du prix de la baguette de pain.

« Non seulement le pain a maigri, donc le pain a subi une cure, mais également le prix a été réajusté. Parce que jusqu’à très récemment, le prix de la baguette de pain au Cameroun était de 125 francs CFA. Malheureusement le prix de la baguette au Cameroun revient à 150 francs. Il y a eu une majoration de 25 francs », selon Magellan Kamgaing Kamsu.

Depuis une douzaine d’années, la Ligue camerounaise des consommateurs plaide pour que le blé soit progressivement remplacé par les farines locales dans la production du pain au Cameroun.

Farine de manioc et de patate
Les farines locales proposées sont celles du manioc et de la patate douce. Le pain dit pain de Kumba, fabriqué à 100% avec de la farine de patate douce, que l’on ne retrouve que sur certains axes routiers au Cameroun, est un modèle que défend Delors Magellan Kamgaing.

« Un pain de Kumba par rapport à son volume vaut trois pains ordinaires à base de blé. Ce pain-là coûte seulement 300 francs CFA. Donc, si on le divise par trois, on aura une baguette de pain de Kumba à 100 francs seulement, et c’est un pain dodu. Donc, les Camerounais pensent que si le gouvernement prend en compte à court terme cette proposition de la Ligue camerounaise des consommateurs, on pourra avoir du pain de Kumba en grande quantité. »

Il est alors question, selon la Ligue camerounaise des consommateurs, que le gouvernement subventionne directement les producteurs artisanaux de pain à base de farines locales, et obligent les boulangers classiques à incorporer un minimum de 10% des farines locales dans leurs baguettes.

Mais Florent Etoundi, tout en pensant qu’il s’agit là d’une bonne solution, estime que les Camerounais pourraient carrément bannir le pain de leurs habitudes alimentaires.

« Nous sommes bantous, bantoïdes, soudano-sahéliens. Je pense que le pain ne fait pas partie de nos mœurs traditionnelles. Nous Africains, nous devrions quand même apprendre à vivre avec les choses qui font partie de notre culture », assure Florent Etoundi.

De leur côté, les boulangers que nous avons contactés n’ont pas souhaité s’exprimer sur cette question qu’ils jugent sensible, tandis que la Ligue camerounaise des consommateurs trouve le gouvernement laxiste sur la question.

En 2020, le Cameroun a importé environ 860.000 tonnes de blé, dont 300.000 tonnes, soit 35%, de Russie, pour une valeur de plus de 150 milliards de francs CFA. Une véritable évasion des capitaux au nom du blé qui pousse pourtant en terre camerounaise !

dw

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