Le pôle antiterroriste a interrogé, mardi durant plusieurs heures, Rached Ghannouchi, le chef du Parlement dissout et du parti Ennahda. « Laissé libre de ses mouvements », il a pu rejoindre son domicile dans la soirée. Il fait l’objet d’une enquête pour des soupçons de corruption et blanchiment d’argent.
À quelques jours d’un référendum proposé par le président tunisien, dont Ennahda est la bête noire, les partisans de Rached Ghannouchi craignaient qu’il ne soit arrêté à l’issue de son audition. Le chef du parti d’inspiration islamiste Ennahda a été interrogé, mardi 19 juillet, à Tunis par le pôle antiterroriste.
« Après une séance d’instruction qui a duré plus de 9 heures, et 19 plaidoiries (sur 100 demandées par les avocats), le président de l’Assemblée du peuple (Parlement) Rached Ghannouchi a quitté le pôle judiciaire pour rejoindre son domicile », a indiqué son avocat et ancien responsable d’Ennahda, Samir Dilou sur sa page Facebook.
Rached Ghannouchi a été « laissé libre de ses mouvements » par le pôle antiterroriste, a précisé Samir Dilou à l’AFP. Un autre de ses avocats a déclaré à l’AFP qu’il ne faisait pas l’objet de « mesures de contrôle judiciaire ».
Le président du Parlement – dissous fin mars par le président Kaïs Saïed – était entré vers 9 h (GMT, 11 h à Paris) au siège de ce pôle spécialisé sous les acclamations d’environ 150 militants de son parti, encadrés par une vingtaine de fourgons de sécurité, ont constaté des journalistes de l’AFP. « Stop Political Trials » (« Arrêtez les procès politiques »), pouvait-on lire sur les pancartes des manifestants.
Les comptes de Rached Ghannouchi et d’autres opposants gelés
Rached Ghannouchi, 81 ans, fait l’objet depuis le mois de juin d’une enquête pour des soupçons de corruption et blanchiment d’argent liés à des transferts depuis l’étranger vers l’organisation caritative Namaa Tunisie, affiliée à Ennahda.
Dans le cadre de la même enquête, la justice tunisienne avait interpellé, puis relâché le mois dernier, l’ancien Premier ministre et dirigeant d’Ennahda, Hamadi Jebali, qui reste soupçonné de « blanchiment d’argent ». Il devra comparaître le 20 juillet devant le pôle judiciaire.
Début juillet, la justice a ordonné le gel des comptes bancaires de Rached Ghannouchi et d’une dizaine de membres de sa famille et de son parti. Par ailleurs, le 27 juin, les autorités judiciaires ont interdit à Rached Ghannouchi de voyager à l’étranger dans le cadre d’une autre enquête pour les assassinats en 2013 de deux dirigeants de gauche.
Ennahda et Rached Ghannouchi ont rejeté toutes les accusations à leur encontre.
La Tunisie traverse une profonde crise politique depuis le coup de force du président Kaïs Saïed le 25 juillet 2021 qui a suspendu le Parlement dominé par Ennahda et limogé le gouvernement.
Kaïs Saïed se trouve sous le feu d’intenses critiques de l’opposition pour l’avoir exclue d’un dialogue national sur une nouvelle Constitution qu’il prévoit de soumettre à référendum le 25 juillet. L’opposition, notamment Ennahda, ainsi que des organisations de défense des droits humains l’accusent de vouloir faire adopter un texte taillé sur mesure pour lui et d’utiliser les institutions étatiques et judiciaires pour régler ses comptes politiquement.
AFP