L’impact des sanctions occidentales sur l’économie russe est bien plus important que ce que montrent les chiffres officiels. Ce sont les conclusions d’une étude menée par l’Université de Yale, aux États-Unis.
Les auteurs de cette étude assument vouloir démonter un certain discours en vogue. Celui qui décrit une Russie prospère face à des nations occidentales davantage accablées par la « guerre d’usure économique » initiée par leurs sanctions. Cette guerre des récits prospère sur l’absence de données fiables concernant l’état de l’économie russe depuis le début de l’invasion de l’Ukraine.
Le tableau dressé par l’étude de l’université de Yale est sombre : « Malgré les illusions d’autosuffisance et de substitution des importations (…), la production intérieure russe s’est complètement arrêtée et n’a pas la capacité de remplacer les entreprises, les produits et les talents perdus ». Les entreprises qui ont quitté le pays « représentent environ 40% de son PIB, annulant la quasi-totalité des trois décennies d’investissements étrangers », avancent-ils également.
Isolée des marchés mondiaux, la Russie trouve toujours acheteurs pour son pétrole, mais à leurs conditions désormais. « Les acheteurs asiatiques, la Chine et l’Inde, font valoir le fait que ce sont aujourd’hui les seuls à pouvoir l’acheter. Et donc, demandent un décompte. C’est cela, la grande nouveauté », observe Thierry Bros, professeur en énergie et climat à Sciences-Po. Il est impossible de savoir à quel prix ce pétrole se vend exactement. Mais cela reste une manne pour les caisses de l’État russe qui s’en sert pour soutenir son économie. Les données n’y sont plus publiées.
Des effets collatéraux aux sanctions à la Russie
Pour l’économiste Agathe Demarais, des signes annoncent toutefois un effondrement des importations. « Par exemple, les ventes de voiture pour les particuliers se sont effondrées de 99%. Il y a des éléments comme ça, qui laissent penser que l’économie russe ne se porte pas bien. Clairement, on s’achemine vers une récession russe, à la fois cette année et l’an prochain. Le FMI dit 6%, nous, avec nos modèles, on dit 10 %. C’est difficile de faire une prévision mais dire, dans ces conditions que l’économie russe se porte bien, ça me paraît un petit peu difficile », estime-t-elle.
L’étude de Yale conclue que les sanctions marchent. Mais en Europe, le front se fissure. L’ancien Premier ministre allemand Gerhard Schröder, réputé proche du Kremlin vient d’appeler à démarrer le controversé gazoduc Nordstream 2. « L’idée de la sanction, et c’est là où c’est compliqué à mesurer correctement, c’est de faire plus mal à la Russie que l’on ne se fait mal à nous. C’est ça l’objectif des sanctions. Il faut aussi comprendre que la Russie est impactée par ces sanctions, mais l’Allemagne va rentrer en récession à cause de ces sanctions », dit-il. Potentiellement très élevé, le coût des sanctions pour les Européens est lui aussi inquantifiable.
rfi