Une exoplanète lovée dans un cocon de gaz et de poussière se cacherait dans le disque protoplanétaire entourant une jeune étoile. Sa présence pourrait être confirmée dans très peu de temps grâce au télescope James Webb.
L’observation des étoiles nouvellement formées et de leur environnement est un des moyens dont disposent les astrophysiciens pour comprendre les mécanismes et les évènements qui ont conduit à la formation du Soleil et de son cortège de planètes et de petits corps. Parmi toutes les astres scrutés, l’étoile AS 209, située à environ 395 années-lumière de la Terre dans la constellation du Serpentaire, fait l’objet de toutes les attentions en raison de son âge : à peine 1,5 million d’années. L’équivalent d’un nourrisson stellaire avec, peut-être, la planète la plus jeune jamais découverte en orbite autour.
Une signature dans le gaz
Autour de cette étoile, une hypothétique planète est dissimulée dans le disque protoplanétaire, une structure de gaz et de poussière d’un rayon d’environ 300 unités astronomique (1 ua = la distance Terre/Soleil), entourant l’étoile AS 209. Elle a pu être détectée, de manière indirecte, grâce aux observations menées au radiotélescope ALMA, installé dans le désert d’Atacama dans le nord du Chili dans une étude menée par Jaehan Bae, professeur d’astronomie à l’Université de Floride, en collaboration avec une équipe française.
« Nous avons détecté une signature dans la vitesse du gaz qui est caractéristique de la perturbation qu’une planète exerce sur son environnement proche. Par ailleurs, nous avons aussi repéré une émission ponctuelle qui correspond à la présence d’un disque circumplanétaire, au centre duquel réside probablement une planète géante gazeuse de la taille de Jupiter » explique Myriam Benisty, astronome à l’institut de planétologie et d’astrophysique de Grenoble ainsi qu’à l’observatoire de la Côte d’Azur. Les disques circumplanétaires sont composés de gaz, de poussière et de divers débris qui peuvent donner naissance à des lunes, comme celles qui tournent autour de Jupiter ou de Saturne. « Le matériel du disque va aussi contribuer à former, par accrétion, l’atmosphère de la planète » précise l’astronome.
L’existence des disques circumplanétaires est suspectée depuis longtemps mais ce n’est qu’en 2019 que le premier a été identifié, déjà grâce à ALMA, autour de la planète PDS 70c qui tourne autour d’une jeune étoile, plus petite que le Soleil, à 370 années-lumière de ce dernier.
Une planète éloignée qui ne colle pas avec les théories
Le disque circumplanétaire, et le candidat planétaire qu’il abrite, se situe à l’intérieur du disque entourant l’étoile jeune AS209, dans une zone sombre vidée de matériel, un « sillon » probablement creusé par la protoplanète. « Mais ce n’est encore qu’une hypothèse et la confirmation de cette planète permettra d’associer cette sous-structure avec la présence effective d’un tel astre » ajoute Myriam Benisty. Mais comme souvent en sciences, une telle validation soulèvera immédiatement de nouvelles interrogations. A commencer par la très grande distance qui existe entre la planète et son étoile : plus de 200 ua. « Cela situe cette planète anormalement loin et en l’état son existence ne colle avec aucune des deux principales théories dont nous disposons pour expliquer la formation planétaire. Elle n’appartient pas à un système massif et elle est trop éloignée pour avoir pu naître à partir de grains de poussière, qui à cette distance ne sont plus détectés. Aussi il nous faudra développer de nouveaux modèles pour expliquer sa présence » signale la scientifique.
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