Le parti au pouvoir en Angola a remporté la victoire aux élections législatives, donnant un second mandat au président sortant Joao Lourenço, à l’issue du scrutin le plus serré de l’histoire du pays.
Au pouvoir depuis l’indépendance du Portugal en 1975, le Mouvement populaire pour la libération de l’Angola (MPLA) a recueilli 51,17% des voix, selon les résultats définitifs annoncés lundi par la Commission nationale électorale (CNE).
Le premier parti d’opposition, l’Union nationale pour l’indépendance totale de l’Angola (Unita), totalise 43,95% des votes exprimés au scrutin de mercredi.
« C’est une victoire pour l’Angola et les Angolais », s’est félicité Joao Lourenço, 68 ans, devant des soutiens rassemblés au siège du parti vainqueur dans la capitale Luanda.
Accueillant un « vote de confiance », M. Lourenço a promis « le dialogue et la concertation ».
Il n’y a pas d’élection présidentielle en Angola, la tête de liste du parti vainqueur aux législatives est investie aux fonctions de chef de l’Etat.
Il a également promis « un pays plus prospère et développé ». Pendant sa campagne, M. Lourenço s’est engagé à bâtir de nouveaux hôpitaux et des transports. L’Angola est un des premiers producteurs de pétrole du continent mais plus de la moitié de la population de 33 millions vit sous le seuil de pauvreté.
Le MPLA, qui l’avait remporté haut la main en 2017 avec 61% des suffrages, enregistre son plus bas score. En 2012, il avait rassemblé 71,84% des votes. Le parti conserve la majorité absolue au Parlement avec 124 sièges sur 220, mais perd la majorité des deux tiers, qui lui permettait jusqu’ici de passer des lois sans le soutien d’un autre parti.
Quatre des 16 membres de la CNE n’ont pas signé les résultats finaux, exprimant des doutes sur le processus électoral.
L’opposition a refusé de reconnaître la semaine dernière les résultats préliminaires qui donnaient déjà le MPLA vainqueur. Les candidats ont 72 heures pour contester.
Le département d’Etat américain a appelé lundi dans un communiqué « à exprimer pacifiquement » tout différend sur le processus électoral. L’Union européenne a exhorté à une réponse « équitable et transparente ».
Avec la mainmise du parti au pouvoir sur le processus électoral et les médias publics, l’opposition et une partie de l’opinion publique craignaient des risques de fraude. Les observateurs étrangers ont fait part la semaine dernière de leurs « préoccupations » notamment à propos des listes électorales.
– Luanda à l’opposition –
Dans les rues de Luanda, un étrange calme régnait après l’annonce des résultats. Des camions anti-émeutes étaient postés sur quelques artèresde la capitale, ont constaté des journalistes de l’AFP.
« Nous ne voulons pas que le MPLA reste au pouvoir », a lancé à l’AFP Moyeta Rebecca, une vendeuse de rue de 38 ans. « Ce n’était pas les résultats que le peuple attendait », a renchéri Fernandes Domingos, aussi 38 ans, qui vit également de petits boulots.
Portée par un désir croissant de « changement » dans un pays rongé par une inflation galopante, le chômage et une sécheresse sévère, l’opposition est plus forte que jamais avec 90 députés élus.
« Il va falloir faire la politique du compromis », estime le spécialiste de l’Angola au think tank Chatham House, Alex Vines. « C’est un résultat formidable pour l’Unita quand on pense qu’il y a 20 ans, elle était vaincue sur le champ de bataille », a-t-il déclaré à propos de l’ex-rébellion devenue le premier parti d’opposition.
Avec des promesses de réformes, de lutte contre la pauvreté et la corruption, le parti d’Adalberto Costa Junior, 60 ans, a notamment séduit la jeunesse, part grandissante de l’électorat. Dans la capitale Luanda, l’opposition a remporté 62,25% des votes.
La veille, le pays a rendu un dernier hommage à l’ex-président, José Eduardo dos Santos, lors de funérailles nationales. Mort le mois dernier à Barcelone, il a marqué l’histoire du pays par 38 ans d’un règne autoritaire (1979 à 2017), entaché d’accusations de corruption et de népotisme.
Jamais inquiété par la justice, ses proches ont eux été visés par une vaste lutte anti-corruption lancée par M. Lourenço. Elu avec l’étiquette de successeur désigné, ce dernier avait surpris en lançant une opération mains propres dès le début de son mandat.
Beaucoup jugent désormais cette campagne comme sélective et politiquement motivée, alimentant les divisions au sein du parti au pouvoir. Le clan dos Santos dénonce de son côté une « chasse aux sorcières ».
Moins de la moitié des quelque 14,4 millions d’inscrits ont participé au scrutin. Huit partis au total étaient en lice.
AFP