Le premier traitement permettant de restaurer les fonctions cognitives des personnes porteuses de trisomie 21 vient d’être mis au point une équipe franco-suisse.
Une jeune femme employée dans un café en Colombie et porteuse de la trisomie 21. Un nouveau traitement pourrait permettre aux porteurs de la trisomie de maintenir leurs fonctions cognitives.
Ce potentiel futur traitement se base sur l’hormone GnRH (Gonadotropin-Releasing Hormone), connue pour réguler la reproduction via l’hypothalamus. Cette dernière jouerait également un rôle dans d’autres régions du cerveau, notamment sur le système de cognition. En étudiant le mécanisme de régulation de GnRH sur la souris, l’équipe du laboratoire de l’Inserm a démontré que sur le chromosome 21, cinq brins de micro-ARN contrôlant la production de cette hormone étaient dérégulés. Ce sont eux qui sont chargés de contrôler l’expression de GnRH. Or l’allumage de l’expression est altérée chez la souris trisomique : ce chromosome surnuméraire entraîne alors des anomalies dans les neurones secrétant l’hormone. En revanche, en administrant un traitement de GnRH chez des souris trisomiques, l’équipe a montré une restauration des fonctions cognitives et olfactives chez les souris.
Forts de ces résultats chez les rongeurs, l’équipe de l’Inserm a poursuivi son travail avec Nelly Pitteloud, professeure à la Faculté de biologie et médecine de l’Université de Lausanne et cheffe du Service d’endocrinologie, diabétologie et métabolisme du CHUV. Une médecin spécialiste la déficience congénitale de GnRH, une maladie rare se manifestant par une absence de puberté spontanée. Un traitement de GnRH pulsatile est prodigué à ces patients et patientes, afin de reproduire le rythme pulsatile naturel de la sécrétion de cette hormone permettant d’induire une puberté. Cette fois, le traitement a été administré à des patients porteurs de trisomie 21. Le petit groupe de sept hommes âgés de 20 à 50 ans ont reçu une pompe implantable sur le bras qui leur délivrait toutes les deux heures une dose d’hormones. Ce dispositif médical appelé un « pod » est déjà utilisé pour administrer de l’insuline aux personnes souffrant de diabète. « Impossible de délivrer ce médicament par voie orale, car la GnRH se désactive trop rapidement lorsqu’elle est ingérée« , précise le Pr Pitteloud.
Des résultats au quotidien et visibles sur les imageries médicales
D’un point de vue clinique, les performances cognitives ont augmenté chez 6 des 7 patients : meilleure représentation tridimensionnelle, meilleure compréhension des consignes, amélioration du raisonnement, de l’attention et de la mémoire épisodique. « Nous avons constaté une amélioration de l’attention et de la compréhension des consignes. Des données d’imagerie cérébrale ont également montré une restauration des connexions neuronales par IRM fonctionnelle, un examen réalisé au repos avec les yeux ouverts, notamment entre les zones visuelles et les zones sensorimotrices« , explique la Pr Nelly Pitteloud. Concrètement, les participants se sentaient plus à l’aise dans l’atelier où ils travaillent et semblaient plus sûrs d’eux au quotidien, comme par exemple pour prendre un bus selon les témoignages de leurs entourages. Aucun des sept participants n’a montré d’effets secondaires.
Une IRM fonctionnelle avant le traitement (à gauche) et celle après le traitement (à droite), qui montrent la restauration des connexions neuronales entre les différentes aires du cerveau.