Rose : « J’ai guéri de plein de maux avec ce cancer »

Guérie d’un cancer du sein, Rose ne pouvait « décemment pas dire » à ceux qui l’ont sauvée qu’elle avait « envie de mourir ». Alors elle l’a écrit dans son journal intime Les montagnes roses (aux éditions Eyrolles). À l’occasion de la sortie de son morceau éponyme, la chanteuse de 44 ans se confie à Gala.fr sur le combat « le plus dur de ma vie ».

Rose écrit La liste, son combat contre la drogue et la dépression dans Kérosène (éditions Ipanema). En septembre 2021, c’est son combat contre la maladie qu’elle livre dans Les montagnes Rose (aux éditions Eyrolles). Un an plus tard, Rose guérit et elle va bien. Elle va mieux, même. Dans son dernier ouvrage, elle fait la liste de ses craintes, de ses doutes. De ses hauts et ses bas. Son ablation du sein, sa ménopause artificielle subite. La chute de morale, de joie, de libido… Un récit sans fard, teinté de spiritualité et de découverte de soi, vers la guérison et la sérénité. Aujourd’hui, Rose a 44 ans et se décrit comme « une guerrière » qui a remporté le combat le plus dur de sa vie.

Gala.fr : Comment allez-vous ?

Rose : Ça va incroyablement bien, étonnamment bien par rapport à ce que j’ai vécu. En relisant mon livre, je me suis dit que c’est miraculeux. C’était impossible d’imaginer que tout ce qui m’arrive aujourd’hui puisse arriver un an pile après mon cancer du sein. J’ai commencé l’hormonothérapie début août 2021 et dès septembre, je ne voyais plus l’intérêt dans rien. Je sortais du Covid et d’une annulation de tournée, je n’avais pas de projet. J’étais dans l’immobilité, plus la maladie, plus les effets secondaires… Le combo perdant quoi (rires).

Gala.fr : Ce livre, Les montages roses, c’était votre journal intime pendant la maladie. Il aurait pu rester intime, qu’est-ce qui vous a poussée à le publier ?

Rose : Je l’ai écrit pendant que je me faisais soigner et au moment du point final, je ne sais pas ce qui m’a pris, je l’ai envoyé à trois éditeurs via Instagram. Pour l’instant et malheureusement, je ne sais pas inventer d’histoire, j’aurais bien aimé écrire des romans parce que c’est cool de pouvoir écrire quand il ne nous arrive rien (rires). Avec le cancer et la thérapie, j’ai compris que j’avais manqué d’attention et de compréhension plus jeune. Déjà à l’école, je me sentais incomprise parce que j’étais nostalgique. J’avais besoin de dire au monde que je souffrais, c’est comme ça que j’ai écrit La Liste. Et aujourd’hui, ce livre c’est une autre vérité. Si je vis autant de choses, c’est parce que je dois apprendre des choses. Quand j’ai appris des choses, je me dois de les transmettre.

Gala.fr : Au fil des pages, on vous accompagne dans votre combat contre le cancer du sein, même malade vous êtes dure avec vous-même…

Rose : Ce journal est thérapeutique, il m’a aidé à faire la paix avec moi. En le relisant, je me suis dit : « Mais ce n’est pas possible de se traiter comme ça ! Ce n’est pas possible d’avoir une vision aussi négative de soi-même ». C’est pour cela que ce livre ne parle pas qu’aux femmes qui ont un cancer, il parle des épreuves de la vie, des hauts et des bas. Il m’a permis de comprendre deux choses. La première, c’est la permanence des choses, tout bouge et il faut s’adapter. Ce n’est pas notre faute, c’est la vie qui est comme ça, les saisons changent, les cellules se renouvellent… Et nous, on s’en prend à nous quand on va mal. Et la deuxième chose, c’est la culpabilité, à qui je donne la palme d’or du sentiment inutile. C’est double peine : on vit quelque chose de dur et en plus on se tape dessus. C’est inutile.

Gala.fr : Vous avez été très entourée et soutenue par vos proches. Ce livre, c’est aussi une belle déclaration d’amour à votre compagnon R., votre famille et votre fils Solal…

Rose : Complètement ! Je ne m’en suis pas rendu compte du tout. Dans un journal intime, il y a des gens intimes, ma sœur, mes parents, R. on m’a reproché de trop parler de lui (rires)… Je me suis sentie chanceuse, je n’ai jamais dit que je n’avais pas de chance.

Gala.fr : Comment votre fils a-t-il vécu tout ce parcours ?

Rose : Le papa de Solal, dont je me suis me séparée, est un super papa. Et quand ça n’allait pas, il l’a beaucoup pris. Mon fils m’a connu dans des états… Je lui ai expliqué que je suis comme ça. Là, je vais très bien là, mais que si ça revient, ça revient. Je veux lui apprendre qu’il ne faut pas baisser les bras. Tout change.

C’est comme ça, je suis une battante, une guerrière.

Gala.fr : Quand on parle de cancer du sein, on pense à l’oblation, la perte des cheveux… vous, vous racontez le reste la ménopause précoce, le manque de libido, la prise de poids.

Rose : Parce que j’ai décidé de ne pas faire de chimio qui était vraiment pour éradiquer le dernier truc, au cas où… Alors que la radiothérapie avait tout supprimé, le cancer n’était plus là. Les effets de la chimio sont, pour moi, beaucoup trop néfastes. Certaines récupèrent bien, mais c’est au cas par cas. J’ai gardé mes cheveux. C’était très important, je ne me voyais pas chauve. Je ne pensais qu’à ça. Pour la prise de poids due à l’hormonothérapie, j’ai tout de suite tout pris en main avec plus de yoga, je mange mieux et je marche deux heures par jour. Pour mon sein, j’avais mal, il s’est contracté, la prothèse est remontée. Je me suis faite opérer ce 22 juin à nouveau. Il n’a rien d’avant, il est moins beau, mais par rapport à ce que j’ai eu, je suis ravie. C’est une cicatrice qui marque une expérience de la vie, comme mon tatouage qui est la date du jour où j’ai arrêté de boire. C’est une marque d’expérience.

Quand je regarde ce sein, je vois ce que j’ai combattu.

Gala.fr : Qui dit ménopause précoce, dit peut-être fin d’une forme de maternité. Est-ce qu’il a fallu faire le deuil d’une éventuelle deuxième grossesse ?

Rose : J’ai eu de la chance parce que je ne voulais pas d’autre enfant. Je pensais être ménopausée, plus tard. C’est très chiant, mais ce n’est rien à côté d’autres maladies.

Gala.fr : Vous avez eu peur de mourir ?

Rose : Pas du tout. Je me suis juste dit : « Comment je vais me sortir de cette merde ». On ne m’a jamais parlé de pronostic vital engagé. Et puis surtout, moi j’étais quelqu’un qui avait tout le temps envie de mourir. Ça m’a donné une foi incroyable que je n’avais pas. Quand ça ne va pas maintenant, je me tourne vers elle.

Gala.fr : Ce combat contre la maladie, c’est aussi un cheminement personnel, presque spirituel. Vous écrivez : « Mon cancer est là pour que je fasse la paix avec moi ».

Rose : Au début du livre, je dis de mon cancer : « Je sens que c’est une épreuve qui va m’enrichir ». J’ai guéri de pleins de maux avec ce cancer. J’ai fait la paix avec mes origines que j’ai retrouvées. J’étais élevée dans une famille juive qui a occulté tout le côté maternel qui était catholique, italien. J’ai eu besoin de retrouver ça. J’ai découvert que ma grand-mère a vécu des traumatismes absolument… Il n’y a même pas de mots, c’est ignoble. On peut très bien développer un cancer sur ça. J’y avais pensé au début. Je ne cherchais pas une cause, mais l’origine de la souffrance que j’avais en moi. J’ai soigné ma colère. Aujourd’hui, mon fils ne me reconnaît pas parce que je m’énervais beaucoup. J’étais colérique et énervée contre moi-même. Je m’étais construit comme ça parce qu’on ne m’avait pas comprise.

Gala.fr : Dans la maladie vous acceptez presque tout, très vite.

Rose : J’ai tout accepté tel que c’est venu. J’ai fait des milliards de rendez-vous médicaux toute seule, avec mon journal dans les salles d’attente de l’hôpital Curie et c’est grâce à ça que j’ai écrit. J’ai commencé à chuter avec l’hormonothérapie qui a fait que je n’avais plus d’envie du tout. Je me sentais comme morte, mais vivante. Il fallait que ça s’arrête. Il y a une phrase qui importante pour moi, c’est : « On ne peut pas décemment dire à des gens qui nous ont sauvé la vie, qu’on a envie de mourir ». Alors je l’ai dit à mon journal.

Gala.fr : Vous avez eu des retours depuis que le livre est sorti ?

Rose : Ce n’est qu’un parcours personnel, mais j’ai eu des témoignages de femmes qui l’ont lu, d’autres qui ont arrêté l’hormonothérapie… Si ce livre peut servir, non pas pour arrêter, mais plutôt trouver des solutions et savoir que ça peut passer… Un an après, je suis plus heureuse que jamais et je prends toujours ce traitement. Alors oui, je suis ménopausée, oui j’ai des douleurs articulaires, oui j’ai un problème de libido… mais il y a plein d’autres choses que j’ai gagnées.

Gala.fr : Qu’est-ce que vous avez gagné ?

Rose : J’ai gagné la sérénité, de voir les choses qui ont de la valeur : la vie, les amis, l’amour. De voir qu’on ne peut pas être en dépression parce qu’on a pris trois kilos. J’ai appris à me battre encore plus, parce que moi je suis une guerrière et là, c’était un des combats les plus difficiles que j’ai eu à mener. La dépendance à côté, ce n’est rien. J’ai gagné la spiritualité. J’ai compris que la vie, ce n’est pas aller travailler, dépenser son argent… Je n’en ai plus rien à faire de l’argent. Ça m’a permis de lancer des projets que j’avais à cœur et notamment Contre-addiction podcast. C’est un sujet tout aussi important que le cancer, parce que quand on va moins bien dans la vie, on se tourne vers des solutions faciles, le plaisir immédiat, l’alcool, la drogue, les compulsions. J’ai eu la sensation d’être guérie de tout ça et aujourd’hui je ne vis qu’avec passion.

Gala.fr : Vous parlez sans tabou d’argent : « Le métier qui me passionnait, je n’arrive plus à en vivre ».

Rose : Je me suis beaucoup inquiétée pour l’argent. En relisant mon livre, je me suis dit : « Non, j’ai mes deux bras, j’ai mes deux jambes, au pire j’irais travailler quelque part… ». Donc non, je ne suis pas en situation précaire parce que j’ai la chance d’avoir un métier qui peut repartir à tout moment et je suis bien entourée, jamais je ne serais à la rue. Je me suis dit quelle ingratitude de t’inquiéter pour de l’argent. Quand j’étais en haut, je pensais que j’allais être une star, reconnue, gagner plein d’argent. Aujourd’hui, on ne me reconnaît plus dans la rue, je ne gagne plus d’argent. Je relance plein de projets, j’ai confiance. J’ai vécu 15 ans sur mes droits d’auteur, sur La liste. C’est une chance folle. Je ne peux pas me plaindre. Je n’ai jamais rien fait que je n’aimais pas pour de l’argent.

Gala.fr : Drogue, addiction, succès, maternité, cancer, passage à Sainte-Anne… Vous avez tout vécu ?

Rose : J’ai vécu beaucoup de choses et c’est génial ! Mais sinon, on est là pour quoi ? Pour faire la même chose tous les jours ? Je suis sur terre pour expérimenter des choses et transmettre ce que j’apprends. Les expériences sont ma seule richesse, je ne suis riche de rien d’autre. Je ne possède rien, je suis une des seules artistes qui n’a pas un toit sur ma tête qui m’appartient, c’est de ma faute, mais je ne m’en veux pas et ça me va. La possession ne m’attire pas plus que ça.

Gala.fr : Un podcast, un livre, un album… Vous êtes de retour ?

Rose : À la base, il ne devait pas y avoir d’album, j’ai fait une chanson Les montagnes roses, dont le clip qu’on a fait à deux avec ma manageuse sort aujourd’hui. J’ai vu que j’avais écrit plein de choses alors je vois des maisons de disques pour l’album. J’adore faire des chansons pour des événements, des naissances, des anniversaires… Pareil, je me lancerai sur ce projet. Là, j’écris un spectacle qui mêlera musique et humour. J’ai trop d’envies, je ne sais plus où donner la tête.

Gala.fr : Est-ce qu’on peut dire qu’à 44 ans vous êtes plus sereine ?

Rose : C’est vrai que je ne vois plus les choses de la même façon qu’avant. Je me vois belle, je me vois telle que je suis… Combien d’années j’ai dit que je n’aimais pas ma voix, aujourd’hui je considère que tout le monde est unique. Je crois que je passe un cap qui me permet d’être heureuse sans condition. Mais tous les trois ans il m’arrive quelque chose, alors rendez-vous dans trois ans (rires).

gala

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