Alors que de récents travaux montraient déjà une association entre la consommation d’aspartame et l’apparition de cancers, c’est cette fois l’Inserm qui publie des travaux montrant un lien possible avec la survenue de maladies cardiovasculaires.
Aspartame
Les édulcorants sont présents dans les sodas, les laitages ainsi que de nombreux types d’aliments.
On le sait : manger trop de sucre est mauvais pour la santé. Ses effets délétères conduisent au surpoids et à l’obésité, ainsi qu’à l’apparition de plusieurs maladies. Pour contourner ce problème mais garder un goût sucré dans les aliments, les industriels ont commencé à utiliser des édulcorants dans les aliments. On en trouve dans les sodas, les produits laitiers ou encore sous forme de comprimés pour sucrer ses boissons. Mais ces substances font maintenant largement débat. Une publication récente avait déjà montré une association entre la consommation d’édulcorants et le risque de cancer. Cette fois, une étude française montre une association entre les édulcorants et les maladies cardio-vasculaires, reconnus par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) comme la première cause de mortalité au monde (31%). Des travaux menés par l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) et publiés dans le British Medical Journal (BMJ).
Plusieurs études épidémiologiques avaient déjà suggéré un lien entre la consommation de boissons édulcorées et l’apparition de maladies cardiovasculaires. Mais aucune ne s’était jusqu’à présente intéressée aux édulcorants eux-mêmes, présents également dans les produits laitiers par exemple. L’équipe de l’Inserm s’est penchée sur les données de 2009 à 2021 de 103.388 français inclus dans la cohorte NutriNet-Santé, dans laquelle les participants déclarent ce qu’ils mangent, leur état de santé et leur mode de vie. En tenant compte d’autres facteurs comme l’activité physique, le tabagisme, les antécédents familiaux, la consommation d’alcool ou encore de viande rouge, ils ont pu réaliser des analyses statistiques sur l’apparition de maladies cardiovasculaires.
Boissons, produits laitiers et comprimés
Une association entre la consommation de ces substances et un risque cardiovasculaire a bien été observée. « Dans notre étude, les principaux édulcorants consommés étaient l’aspartame E951 (58 % des apports en édulcorants), l’acésulfame potassium E950 (29 %) et le sucralose E955 (10 %). Et les principaux groupes d’aliments vecteurs étaient les boissons sans sucres ajoutées (53 % des apports), les édulcorants de table (30 %) et les produits laitiers édulcorés (8 %) », explique le Dr Charlotte Touvier, directrice de l’équipe de Recherche en Épidémiologie Nutritionnelle (EREN) à l’Inserm à Sciences et Avenir. L’aspartame était plus étroitement associé au risque de maladies cérébrovasculaires (les AVC et les accidents ischémiques transitoires). L’acésulfame-K et le sucralose ont montré une association au risque de maladies coronariennes (infarctus du myocarde, syndrome coronarien aigu, angine de poitrine, angioplastie).
Si l’étude a pu établir un lien d’association entre ces maladies et la consommation d’aspartame, le mécanisme de fragilisation du système cardiovasculaire n’a pas pu être clairement établi. Toutefois, plusieurs pistes se dessinent. Les perturbations métaboliques liées au surpoids et à l’obésité pourraient être en cause. « Plusieurs études ont suggéré des associations entre la consommation de boissons édulcorées et le syndrome métabolique (l’association de plusieurs troubles comme la dyslipidémie, l’obésité abdominale, l’hypertension, l’hyperglycémie ou la résistance à l’insuline). Une autre voie potentielle pourrait impliquer l’interaction entre les édulcorants avec les récepteurs intestinaux du goût sucré qui jouent un rôle dans la sécrétion de l’insuline et l’absorption du glucose », expliquent le Dr Charlotte Touvier et Charlotte Debras à Sciences et Avenir. Inflammation accrue, altération du microbiote et intolérance au glucose, hyperglycémie… Autant de causes possibles qui restent à explorer.
Sans seuil fixé, mieux vaut diminuer le goût sucré
En attendant des réponses, quelle conduite adopter ? Existe-t-il une dose d’aspartame limite à ne pas dépasser ? « A ce stade on peut dire qu’il y a une relation dose-effet mais on ne peut pas déterminer de seuil. Dans la population que nous avons étudié, les forts consommateurs (au-delà de la médiane) avaient un apport moyen en édulcorants de 78 mg/j (ce qui correspond à peu près à 200 mL de boissons édulcorées). Mais rien ne permet de dire qu’il n’y a pas de risque en deçà », précise le Dr Touvier. Mieux vaut donc ne pas en consommer régulièrement, comme le préconise l’Anses. Dans son évaluation, elle recommande de réduire la consommation générale de sucre et de diminuer de façon globale le goût sucré de l’alimentation sans passer par les édulcorants.
De nombreux facteurs de risques sont déjà connus concernant les maladies cardiovasculaires, comme une mauvaise alimentation, un mode de vie sédentaire, le tabagisme ou la consommation d’alcool font partie des facteurs de risque connus des maladies cardiovasculaires. Adopter un mode de vie sain peut prévenir leur risque de survenue. En plus de cela, mieux vaut désormais aussi éviter de consommer des édulcorants.
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