Le lieutenant-colonel Damiba, éphémère chef des putschistes [Portrait]

Renversé vendredi par des militaires, le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba n’aura passé que huit mois à la tête du Burkina Faso, rapidement rattrapé par les attaques jihadistes qui n’ont pas faibli dans le nord et l’est du pays.

Ce soldat de terrain, spécialiste de la lutte antijihadiste, avait assuré faire de la sécurité sa priorité.

Régulièrement, après les attaques les plus meurtrières, il se rendait auprès des soldats ou des populations endeuillées, appelant « à continuer le combat » face aux groupes armés liés à
Al-Qaïda et à l’Etat islamique.

Le 12 septembre dernier, il avait limogé son ministre de la Défense et choisi d’assumer lui-même ces fonctions.

Pendant ses huit mois à la tête du Burkina Faso, il a tenté de lancer un processus de dialogue avec certains groupes armés, via des leaders religieux et coutumiers, tout en intensifiant les « actions offensives de l’armée ».

Mais comme son prédécesseur, Roch Marc Christian Kaboré, qu’il avait renversé, la dégradation de la situation sécuritaire l’a poussé vers la sortie.

Âgé de 41 ans, il est l’auteur d’un livre intitulé « Armées ouest-africaines et terrorisme: réponses incertaines? », dans lequel il se montre critique envers les politiques antijihadistes menées dans une région minée par les violences depuis près d’une décennie.

Il y déplore des armées locales trop faibles, aux « tares rédhibitoires », et des partenaires occidentaux « nécessaires » mais « cachottiers ».

« C’est l’exemple d’un bon militaire, un bon commandant rigoureux qui est monté au front avec ses hommes », assure une source militaire, qui salue aussi son « dévouement ».

« Des choses dans la tête »
Le lieutenant-colonel Damiba a été formé à l’Académie militaire Georges Namoano de Po, dans le sud du Burkina Faso, dont la majorité des anciens pensionnaires a servi au sein du Régiment de sécurité présidentielle (RSP) l’ex-garde rapprochée de Blaise Compaoré, président durant 27 ans, renversé en 2014 après une vague de manifestations.

M. Damiba a lui-même été commandant de compagnie au
RSP de 2003 à 2011, ce qui ne l’avait pas empêché de s’opposer à la tentative de coup d’Etat fomentée en 2015, contre les autorités de transition d’alors, par le général Gilbert Diendéré, proche de Blaise Compaoré.

C’est en tant que chef de corps de régiment qu’il a eu le plus à combattre les groupes armés jihadistes du pays, de 2019 à 2021.

Après le massacre en novembre 2021 à Inata (nord) de 53 gendarmes laissés à eux-même,qui avait provoqué un électrochoc au sein des
forces armées, il a été nommé commandant à Ouagadougou de la 3e zone militaire couvrant l’est du pays, à la faveur d’un vaste changement des chefs militaires opéré par le président Kaboré.

Le nouvel homme fort du Burkina est également diplômé de l’Ecole militaire de Paris.

« Il fait partie des élites mais a obtenu des
résultats sur le terrain, il a dirigé et commandé un certain nombre d’unités », estime l’analyste politique burkinabè Oumarou Paul Koalaga, qui ajoute au sujet de la junte: « Ce sont des officiers avec des choses dans
la tête ».

AFP

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