Le Liban et Israël signent l’accord délimitant leur frontière maritime

Le Liban et Israël, pays voisins officiellement en état de guerre, signent, jeudi 27 octobre, un accord délimitant leur frontière maritime après des mois de négociations ardues par l’entremise des États-Unis, qui assure la répartition de précieux gisements gaziers offshore en Méditerranée orientale.

Le Premier ministre israélien Yaïr Lapid a affirmé que cet accord constituait une « reconnaissance » de fait de l’État hébreu par Beyrouth, mais le président libanais Michel Aoun, allié du Hezbollah pro-iranien, a rétorqué qu’il n’avait aucune « dimension politique ».

Le président américain Joe Biden s’est félicité mercredi de la signature imminente de cet accord « historique », soulignant qu’il « avait fallu beaucoup de courage pour s’y engager et le faire ».

Une cérémonie se déroule au siège de la Force intérimaire des Nations unies au Liban (Finul), dans la localité frontalière libanaise de Naqoura, en présence du médiateur américain Amos Hochstein et de la coordinatrice spéciale de l’ONU au Liban Joanna Wronecka.

Le Premier ministre israélien Yaïr Lapid et le président libanais ont chacun de leur côté signé l’accord jeudi, avant un échange de lettres qui marquera sa conclusion formelle.

Le Conseil des ministres israélien a officiellement entériné le texte jeudi matin. « Il s’agit d’un accomplissement politique, ce n’est pas tous les jours qu’un État ennemi reconnaît l’État d’Israël dans un accord écrit et ce, devant l’ensemble de la communauté internationale », a affirmé le Premier ministre israélien Yaïr Lapid.

Mais dans un tweet, le président libanais Michel Aoun a répondu qu’il s’agissait d’un accord purement « technique », sans aucune « dimension politique », ni « conséquences qui contredisent la politique étrangère du Liban ». Pour joindre le geste à la parole, Beyrouth a tenu à ce que sa délégation n’ait aucun contact officiel avec celle de l’État hébreu au cours de la signature, exigeant que la cérémonie se tienne dans deux salles séparées.

Des enjeux de politique intérieure

Les médias n’ont pas accès au bâtiment, autour duquel des Casques bleus et l’armée libanaise étaient déployés, alors que des hélicoptères de la Finul survolaient le secteur, selon un photographe de l’AFP.

Pour le Liban, englué dans une profonde crise économique, cet accord intervient à quelques jours de la fin du mandat du président Aoun, sans qu’un successeur lui soit trouvé. Il intervient aussi peu avant les élections législatives du 1er novembre en Israël, pour lesquelles Yaïr Lapid est en campagne.

En vertu de l’accord sur la frontière maritime négocié par les États-Unis avec l’appui de la France, le champ gazier offshore de Karish se situe entièrement dans les eaux israéliennes en Méditerranée orientale.

Ce gaz permettra, selon les autorités israéliennes, de réduire le coût de l’énergie au pays mais aussi de doper les exportations vers l’Europe, qui cherche à diversifier ses approvisionnements dans la foulée de l’invasion de l’Ukraine par la Russie.

La production déjà lancée

Le Liban, pour sa part, aura tous les droits d’exploration et d’exploitation du champ de Cana, situé plus au nord-est, dont une partie dans les eaux territoriales d’Israël. Mais « Israël sera rémunéré » par la firme exploitant Cana « pour ses droits sur d’éventuels gisements », selon le texte, Yaïr Lapid chiffrant la part israélienne à environ 17 %.

Avant même la signature de l’accord par les deux pays, prévu jeudi, le groupe énergétique Energean a lancé, mercredi, la production au gisement de Karish avec le projet d’y porter rapidement la production annuelle à 6,5 milliards de m3 de gaz naturel, puis à terme à 8 milliards de m3.

Le Liban a de son côté demandé à TotalEnergies d’entamer rapidement les travaux de prospection dans le champ de Cana.

L’accord n’aurait pas pu être signé sans l’assentiment du puissant Hezbollah au Liban, qui avait menacé au cours de l’été d’attaquer Israël s’il entamait l’extraction du gaz du champ de Karish avant la conclusion d’un accord. Le chef du parti pro-iranien doit prononcer un discours une heure après la signature de l’accord.

AFP

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