« La crise climatique nous tue », alertent des experts médicaux internationaux

La dépendance à l’égard des énergies fossiles compromet la santé des humains, selon une étude annuelle publiée mercredi et menée par 99 experts issus de 51 institutions mondiales. Un constat alarmant qui survient à quelques jours de l’ouverture de la réunion onusienne sur le climat COP27.

Des experts médicaux internationaux dénoncent mercredi 26 octobre la trop grande dépendance mondiale aux énergies fossiles, à l’origine du dérèglement climatique, qui entraîne des effets délétères sur la santé.

« Le monde se situe à un tournant. (…) Nous devons changer. Sinon, nos enfants seront confrontés à une accélération du changement climatique qui menacerait leur survie », alerte Anthony Costello, professeur et coprésident du Lancet Countdown, étude annuelle menée par 99 experts issus de 51 institutions, notamment de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et de l’Organisation météorologique mondiale (OMM), sous la supervision de l’University College de Londres.

Alors que les pays et les systèmes de santé doivent faire face aux retombées de la pandémie de Covid-19, l’analyse, publiée à quelques jours de l’ouverture de la réunion onusienne sur le climat COP27 à Charm el-Cheikh, souligne que la grande majorité des pays allouent encore des centaines de milliards de dollars en subventions aux combustibles fossiles, des sommes comparables ou même supérieures à leurs budgets de santé.

Hausse de 68 % des décès liés à la chaleur en deux décennies
Or, « la dépendance excessive et persistante vis-à-vis des combustibles fossiles aggrave rapidement le changement climatique » et « engendre des répercussions dangereuses pour la santé », souligne l’étude.

La montée des températures et les phénomènes météorologiques extrêmes – rendus plus probables par le changement climatique – laissent aujourd’hui près de 100 millions de personnes supplémentaires en situation d’insécurité alimentaire grave, par rapport à la période 1981-2010, note Elizabeth Robinson, directrice du Grantham Research Institute à la London School of Economics, l’une des principales contributrices au rapport.

Par ailleurs, les décès liés à la chaleur ont augmenté de 68 % entre 2017 et 2021 par rapport à 2000-2004, et l’exposition humaine aux jours à haut risque d’incendie a augmenté de 61 % sur des périodes similaires.

Le changement climatique affecte également la propagation des maladies infectieuses, selon le rapport. La période propice à la transmission du paludisme a augmenté de près d’un tiers (32,1 %) dans certaines régions des Amériques et de 14 % en Afrique au cours de la dernière décennie, par rapport à la période 1951-1960. Au niveau mondial, le risque de transmission de la dengue s’est accru de 12 % sur la période.

« La crise climatique nous tue. Elle nuit non seulement à la santé de notre planète, mais aussi à celle de tous ses habitants (…), tandis que l’addiction aux combustibles fossiles devient hors de contrôle », a réagi le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, réclamant des investissements dans les énergies renouvelables et la résilience climatique.

Il y a un an, l’OMS avait estimé qu’entre 2030 et 2050, près de 250 000 décès supplémentaires par an seraient imputables au changement climatique.

« 150 ans » pour décarboner l’énergie
Selon l’étude, les pays contribuent eux-mêmes à ces crises sanitaires en subventionnant les énergies fossiles : 69 des 86 gouvernements analysés subventionnent la production et la consommation de combustibles fossiles, pour un total net de 400 milliards de dollars en 2019.

Résultat : « L’intensité en carbone du système énergétique mondial (secteur qui contribue le plus aux émissions de gaz à effet de serre) a diminué de moins de 1 % par rapport à 1992 » et « au rythme actuel, une décarbonation complète de notre système énergétique prendrait 150 ans », est-il souligné.

« Les stratégies actuelles de nombreux gouvernements et entreprises enfermeront le monde dans un avenir fatalement plus chaud, nous liant à l’utilisation de combustibles fossiles qui nous ferment rapidement les perspectives d’un monde vivable », souligne Paul Ekins, professeur de ressources et de politiques à la Bartlett School de l’University College de Londres.

Pour faire face, les auteurs appellent à une « réponse centrée sur la santé ». Ainsi, l’amélioration de la qualité de l’air permettrait d’éviter les décès résultant de l’exposition aux combustibles fossiles, dont le nombre s’élève à 1,3 million pour la seule année 2020.

Et l’accélération de l’évolution vers des régimes alimentaires végétaux permettrait de réduire 55 % des émissions agricoles et d’éviter jusqu’à 11,5 millions de décès annuels liés à l’alimentation.

AFP

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