Une quarantaine d’organisations de la société civile a dénoncé les honneurs faits par l’Etat malien à un juge islamique qui a rendu la justice pour les jihadistes à Tombouctou en 2012 à une époque marquée par les exactions contre les civils.
Ces 37 organisations de défense des droits réclament dans un communiqué reçu mercredi par un correspondant de l’AFP que Houka Houka Ag Alhousseini soit arrêté et jugé, et non pas distingué comme il l’a été récemment.
Le gouverneur de la région de Tombouctou Bakoun Kanté a délivré la semaine passée une « attestation de reconnaissance» à Houka Houka Ag Alhousseini pour «service rendu en faveur du retour de la paix et du vivre ensemble», bien qu’il soit toujours visé avec d’autres par des investigations judiciaires et qu’il fasse l’objet de sanctions de l’ONU.
Ces égards sont «une atteinte à la mémoire des victimes», qui attendent toujours un procès, disent les ONG.
«Le gouverneur est censé savoir que Houka Houka est toujours poursuivi pour des crimes au (regard du) droit international, imprescriptibles, notamment pour des faits de mariage forcé, esclavage sexuel, de viol, de torture, d’extorsion de fonds à Tombouctou, constitutifs de crime de guerre et crimes contre l’humanité», disent-elles.
L’hommage rendu à Houka Houka Ag Alhousseini est un nouvel exemple de l’impunité dont jouissent les auteurs d’abus au Mali, pays meurtri depuis 2012 par la propagation jihadiste et les violences de toutes sortes, disent-elles.
«Nos organisations encouragent la Cour pénale internationale à user du principe de la subsidiarité pour contourner le manque de volonté politique en vue de lutter contre l’impunité», disent-elles.
Houka Houka Ag Alhousseini a présidé le tribunal islamique de Tombouctou pendant la période où les islamistes d’Ansar Dine et Al-Qaïda au Maghreb islamique contrôlaient la ville, de mi-2012 jusqu’à la libération par les forces françaises et maliennes début 2013.
Il a été arrêté en janvier 2014 puis libéré sept mois plus tard dans le cadre d’un échange de prisonniers. Il a repris ses activités d’enseignement et de consultation sur les affaires religieuses. Cadi (juge islamique) de Zoueliya dans le cercle de Goundam, à environ 90 km de Tombouctou, il demeure une personnalité écoutée.
AFP