Les approximations d’Emmanuel Macron sur l’écologie : trafic aérien, petites lignes de train…

Dans une vidéo publiée en ligne dimanche, le président a répondu aux questions d’internautes sur l’écologie. Mais il a eu tendance à embellir son bilan.

Emmanuel Macron a surpris au sein même du gouvernement en annonçant, sans concertation, des projets de RER dans dix métropoles françaises dans une vidéo postée sur YouTube dimanche 27 novembre.

Dans cette séquence, le président se mettait en scène pour répondre à des questions d’internautes sur l’écologie. Il y vantait à plusieurs reprises le plan du gouvernement sur l’énergie et les enjeux écologiques. Quitte à exagérer quelques chiffres.

« On a sauvé ou rouvert environ 9 000 kilomètres de petites lignes. »

Le président de la République confond l’objectif d’un plan gouvernemental en faveur des petites lignes ferroviaires et sa réalisation concrète.

Ce n’est pas la première fois que cette confusion est faite par le gouvernement. En avril, déjà, le premier ministre d’alors, Jean Castex, avait avancé sur France Inter ce chiffre de « 9 000 kilomètres de petites lignes refaites à neuf ».

En réalité, ces 9 000 kilomètres renvoient à l’objectif fixé en 2020 par le ministère des transports grâce à un plan d’investissement en partenariat avec les régions volontaires, qui doit s’élever à 7 milliards d’euros sur dix ans. Une ambition qui porte sur toute la décennie et reste loin d’être réalisée. En avril, le ministère des transports avait expliqué à l’Agence France-presse que, d’ici à la fin de l’année, 1 500 kilomètres auront été rénovés. Contacté par Le Monde, le ministère n’avait pas répondu à nos demandes de précision avant la publication de cet article.

Les 9 200 kilomètres de « lignes de desserte fine du territoire » – qui représentent près d’un tiers du réseau ferroviaire français (28 000 kilomètres) – étaient menacées de disparition faute d’investissements depuis des années au profit des TGV. Selon un rapport du ministère des transports publié en 2020, « sauf investissements massifs », près de 6 500 kilomètres étaient susceptibles d’être concernés par des ralentissements pour défaut de maintenance d’ici à 2030 et 4 000 kilomètres présentaient un risque de fermeture dans les dix ans.

« Le plan hydrogène va permettre de réduire de 6,5 millions de tonnes les émissions de CO2 en 2030. 6,5 millions de tonnes de CO2 par an, c’est l’équivalent de tout le transport aérien français. »

Le chef de l’Etat a l’ambition de faire « de la France un des leaders » du secteur, grâce au plan gouvernemental pour le développement de l’hydrogène décarboné. Après un premier plan dévoilé par Nicolas Hulot en 2018, mais doté uniquement de 100 millions d’euros, un plan plus ambitieux avait été lancé en septembre 2020 avec une promesse d’investissement de 7 milliards d’euros sur dix ans.

Le gouvernement estime qu’il faudra installer 6,5 GW de capacité d’électrolyse – le processus chimique qui permet de produire du dihydrogène à partir de l’eau. Pour Emmanuel Macron, cette stratégie devrait « permettre de réduire nos émissions de 6,5 millions de tonnes de CO2 par an en 2030 ». Pour appuyer son propos, il compare cette réduction aux émissions liées au transport aérien français chaque année.

Écouter aussi L’hydrogène est-il le pétrole de demain ?
Pourtant, le président semble loin du compte. Selon les chiffres de la Direction générale de l’aviation civile (DGAC), les émissions de CO2 pour le transport aérien en France se sont élevées à 10,3 millions de tonnes en 2020. Mais en raison de la crise sanitaire, qui a mis à l’arrêt une majeure partie du trafic aérien cette année-là, il est nécessaire de voir les chiffres des années précédentes.

En 2019, 23,7 millions de tonnes (Mt) de CO2 avaient été émises par le transport aérien (aviation commerciale) en France. « Avec 4,8 Mt en 2019, la part du transport intérieur dans les émissions de CO2 du transport aérien France est de 20,5 %, dont une proportion importante liée à la desserte de l’outre-mer (2,7 Mt) », précisait la DGAC. Le poids de l’aviation dans les émissions de gaz à effet de serre a donc largement été sous-estimé par M. Macron.

« Aujourd’hui, environ une voiture sur huit qui est achetée est électrique et une sur trois est hybride. On a fait un vrai progrès parce qu’il y a cinq ans, quand j’ai été élu la première fois, on en avait environ une sur trente. »

Comme nous l’écrivions déjà en octobre, la part de l’électrique dans le marché des voitures particulières a en effet fortement progressé en cinq ans, passant de 1,5 % en 2018 à 12,68 % pour les trois premiers trimestres 2022. Parmi les voitures neuves achetées depuis le début de l’année, une sur huit est bien électrique comme l’affirme le chef de l’Etat.

Plus de 12 % des nouvelles immatriculations
Cependant, cette accélération de la vente des véhicules électriques s’est faite au détriment des véhicules hybrides rechargeables, qui semblent amorcer un recul, et représentent moins de 8 % des immatriculations neuves sur les neuf premiers mois de 2022. Lorsque le chef de l’Etat affirme qu’« une [voiture] sur trois est hybride », il additionne deux types de véhicules : les hybrides rechargeables (qui peuvent rouler à 100 % en électrique sur de petits trajets si elles ont été préalablement branchées) et les hybrides « simples », dont le moteur électrique n’est qu’un relais du moteur diesel ou essence, et qui ne peuvent donc pas rouler sans émettre des gaz à effet de serre. Elles ne sont d’ailleurs plus éligibles au bonus écologique.

Si la part de l’électrique dans les véhicules neufs a certes progressé sous le premier quinquennat d’Emmanuel Macron, elle reste infime sur l’ensemble des voitures particulières en circulation. Au 1er janvier 2021, les voitures électriques représentaient 0,64 % du parc automobile français et les véhicules hybrides rechargeables 0,41 %.

lemonde

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