Le test de Guthrie permettait jusque-là de dépister six maladies rares chez les nourrissons. Sept nouvelles pathologies vont être ajoutées à ce dépistage à partir du mois de janvier 2023.
Il suffit de quelques gouttes de sang recueillies sur un papier buvard. La technique peut paraître peu moderne et pourtant, elle permet depuis les années 1970 de détecter des maladies rares chez les nourrissons. Le test de Guthrie, réalisé dans les premiers jours de vie du bébé lors de son séjour à la maternité, permettait jusqu’à présent d’identifier six maladies rares. Il va être élargi à sept nouvelles maladies à partir du mois de janvier 2023, comme vient de l’annoncer le ministre de la Santé François Braun.
En 1972, la France faisait partie des premiers pays à lancer un dépistage néonatal à l’échelle nationale, en recherchant la phénylcétonurie chez les bébés. A cette maladie rare responsable de retards mentaux se sont ensuite ajoutées l’hypothyroïdie congénitale, l’hyperplasie congénitale des surrénales, la drépanocytose chez les parents avec « des origines à risque » (selon la Haute autorité de santé) et le déficit en acyl-CoA déshydrogénase des acides gras à chaîne moyenne (MCAD) depuis le 1er décembre 2020. Toutes sont recherchées grâce à des marqueurs biologiques dans le sang, recueilli sur une feuille de papier buvard. La mucoviscidose est, elle, diagnostiquée grâce à des tests génétiques supplémentaires. Avec ce programme de dépistage néonatal (DNN) proposé très en amont dans la vie, il est possible de proposer une prise en charge adaptée et de limiter l’impact futur de cette maladie sur la vie des enfants. Une démarche pour laquelle les parents doivent toujours fournir au préalable leur consentement. A ces six maladies s’ajoute un dépistage de la surdité, proposé depuis 2012.
Sept nouvelles maladies métaboliques
Ailleurs, le dépistage a déjà été étendu à bien plus de maladies. En Europe, l’Italie se situe largement en tête, avec 40 maladies métaboliques héritées génétiquement qui sont testées depuis 2016, à l’aide du séquençage du génome. Un deuxième test est parfois mené pour éviter les faux positifs (les personnes diagnostiquées d’une maladie à tort). Le Portugal, l’Autriche et la Pologne dépistent, elles, 29 maladies. Les Etats-Unis proposent le panel le plus complet, avec un premier test de 35 pathologies puis 27 autres, soit 62 maladies en tout. « La France ne se trouve plus dans le peloton de tête », regrette le Pr Pascal Pujol, à la tête de la Société française de médecine préventive et personnalisée auprès de Sciences et Avenir. « Nous prenons ainsi du retard sur l’application clinique. Il s’agit d’éviter l’errance diagnostique face à des symptômes parfois difficiles à interpréter. »
Désormais, sept nouvelles maladies vont être dépistées, suite aux recommandations de la Haute autorité de santé (HAS). Ce sont toutes des maladies métaboliques, c’est-à-dire des pathologies liées à l’absence ou à la dysfonction de certaines enzymes indispensables aux réactions dans une cellule. Ces sept pathologies sont : l’homocysturie (une anomalie de la vitamine B12 qui entraîne des retards de développement), la leucinose (à l’origine de troubles neurologiques pouvant aller jusqu’à l’insuffisance respiratoire), la tyrosinémie de type 1 (qui touche le foie et les reins), l’acidurie glutarique de type 1 (responsable de retards de croissance, de vomissements et de convulsions), l’acidurie isovalérique (entraînant des troubles neurologiques), le déficit en déshydrogénase de hydroxyacyl COA à chaîne longue (une hypoglycémie avec un impact sur le cœur et le foie) et le déficit de captation de la carnitine (qui touche le cœur, retarde la croissance et peut être associée à un coma).
La drépanocytose bientôt dépistée systématiquement
Mi-novembre 2022, la HAS a rendu un avis recommandant la généralisation du dépistage de la drépanocytose. Ce dernier n’est pour l’instant pratiqué uniquement dans le cas où les parents sont originaires de régions « à risque », comme les Antilles, l’Afrique ou l’Océan Indien. Toutefois, « c’est la seule maladie dépistée à la naissance dont l’incidence augmente régulièrement : 557 cas ont été dépistés en 2020 contre 412 en 2010 », note la HAS. En 2020, son incidence correspondait à 1 nouveau-né sur 1.323. « Par ailleurs, le dépistage est déployé de manière hétérogène d’une région à l’autre : plus de trois enfants sur quatre en bénéficient en Ile-de-France, contre à peine un sur deux à l’échelle nationale en 2020, alors qu’aucune région en France n’est indemne de cas. » Des raisons qui ont conduit le gouvernement à adopter ces recommandations. Le dépistage systématique de la maladie doit être mis en place « dans les meilleurs délais » selon le ministre de la Santé François Braun.
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