De nombreuses structures en béton bâties par les Romains sont toujours debout. Alors même que certaines, plus modernes, s’effondrent en moins d’un siècle. Alors les chercheurs ont enquêté. Aujourd’hui, ils révèlent comment les Romains ont pu fabriquer un béton aussi résistant.
Il y a beaucoup de choses à savoir sur le Panthéon de Rome (Italie). Entre autres, le fait qu’il supporte la plus grande coupole de l’Antiquité. Plus de 40 mètres de diamètre. De quoi en faire la plus grande du monde en béton non armé. Construite au IIe siècle, elle est toujours intacte. C’est d’autant plus étonnant lorsque l’on considère le fait que de nombreuses structures en béton plus modernes s’effondrent en quelques décennies seulement.
[info aléatoire du lundi]
Le béton dans la Rome antique [agrégat de morceaux de roches, briques, céramiques + pouzzolane + gypse] était de bien meilleure qualité que le béton contemporain.-Béton romain vu au microscope
-Le dôme du Panthéon, Rome, 2e s. ap. J.-C (photo 04/2017) pic.twitter.com/2kL9I7hb0v— maria (@avec_le_vent) January 4, 2021
La légende raconte que son extraordinaire résistance, le béton romain la doit à la pouzzolane, une roche volcanique que l’on trouve dans la région de Pouzzoles, dans la baie de Naples (Italie). À l’époque de l’Empire romain, elle était expédiée partout pour être utilisée dans la construction. Les architectes — et plus tard, les historiens — la considéraient comme un ingrédient clé de la formulation du béton. Mais des chercheurs du Massachusetts Institute of Technology (MIT, États-Unis) semblent aujourd’hui avoir mis la main sur une autre raison de la résistance du béton romain.
Grâce à des techniques d’imagerie multi-échelle à haute résolution et à des techniques de cartographie chimique, ils ont en effet procédé à une caractérisation poussée des clastes de chaux omniprésents dans les bétons romains. De quoi acquérir de nouvelles connaissances sur leur fonctionnalité et conclure qu’ils sont à l’origine de capacités d’autoguérison de ce béton jusqu’alors inconnues.
Précisons que ces clastes correspondent à des fragments de chaux — un autre composant clé du béton romain — à l’échelle millimétrique. Et que les chercheurs ont longtemps pensé qu’ils étaient simplement le résultat d’un mélange bâclé ou de matières premières de mauvaise qualité. Mais combiner de la chaux à de l’eau pour former un mélange pâteux hautement réactif ne peut pas expliquer la présence de ces clastes dans le béton.
Quelques mots sur le béton imperméabilisant romain.
Cette photo provient de l'aqueduc Aqua Virgo, que Marcus Agrippa a construit et lancé en 19 av.
Aqua Virgo est le seul de tous les aqueducs romains qui fonctionne presque sans interruption à ce jour, depuis 2039 ans.
Vous pouvez pic.twitter.com/VDAPmjmkfu— Stéphane (@Stephan95105295) August 6, 2022
L’auto-guérison au cœur du processus
Les analyses des chercheurs du MIT montrent que ces fragments sont en réalité constitués de diverses formes de carbonate de calcium. Et qu’ils ont été formés à des températures extrêmes. Des indices qui les poussent à penser que les Romains utilisaient de la chaux vive dans leur mélange. À la place ou en plus de la chaux éteinte. Avec deux avantages à la clé : autoriser des réactions chimiques impossibles avec la seule chaux éteinte et permettre une prise du béton et donc des constructions plus rapides.
Les chercheurs détaillent ainsi le processus qui offre sa formidable résistance au béton romain. Le mélange à chaud, en réalité, crée une source de calcium facile à fracturer et réactive. Du fait d’une architecture en nanoparticules des clastes de chaux. Ainsi, lorsque des fissures commencent à se former dans le béton, elles traversent préférentiellement les clastes calcaires de grande surface. Ce matériau peut alors réagir avec l’eau, créant une solution saturée en calcium, qui peut recristalliser sous forme de carbonate de calcium et remplir rapidement la fissure.
Elle peut aussi réagir avec la pouzzolane évoquée plus haut pour renforcer davantage le matériau composite. Ces réactions se produisent spontanément et cicatrisent donc automatiquement les fissures avant qu’elles ne se propagent.
Pour mettre leur théorie à l’épreuve, les chercheurs du MIT ont fabriqué du béton de cette manière. Ils l’ont fissuré puis ont fait couler de l’eau dessus. Deux semaines plus tard, les fissures étaient cicatrisées. Ce n’était pas le cas du morceau de béton témoin fabriqué sans chaux vive. Reste désormais à travailler à la commercialisation d’un tel matériau. Avec l’espoir de réussir à réduire l’impact environnemental de la production de ciment, qui représente actuellement environ 8 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre.
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