L’ancien président de la Confédération africaine de football Ahmad, suspendu pour deux ans en 2021, sort du silence sur RFI. Sa peine désormais arrivée à son terme, le dirigeant s’exprime au micro d’Antoine Grognet pour défendre son bilan et rétablir sa vérité sur plusieurs affaires.
Ahmad, ancien président de la CAF : «J’ai le sentiment d’être lâché par des amis qui ont accepté de travailler…»
Il a été le grand patron du football africain pendant 4 ans avant de subir les foudres de la Fifa. L’ex-président de la CAF, le Malgache Ahmad, reconnu coupable, notamment d’« abus de pouvoir » et de « détournement de fonds » par la Commission d’éthique de la fédération internationale, finit de purger une suspension de deux ans. Il en profite pour revenir sur les circonstances qui ont conduit à sa mise à l’écart.
Vous avez présidé la CAF de 2017 à 2021 avant d’être suspendu pour 2 ans par le Tribunal arbitral du sport. Qu’avez-vous fait durant cette période ?
Ahmad : Beaucoup de choses ! J’ai lancé un petit projet immobilier, une nouvelle activité parce que, à 63 ans, je suis maintenant à la retraite, une vie bien meilleure loin du stress !
À votre arrivée à la présidence de la CAF en 2017, vous aviez l’ambition de mener à bien de nombreuses réformes. Avez-vous le sentiment d’y être parvenu ?
Je mentirais si je vous disais oui… Par contre, nous avons bien fait évoluer les choses. Nous avons lancé pas mal de projets, certains ne sont pas arrivés à terme, d’autres si. C’est un bilan que j’estime positif pour la famille du football africain.
Lors de votre mandat, un des choix forts a été de rompre le contrat entre la CAF et Lagardère, ce qui a privé la CAF de revenus importants. Pourquoi l’avoir fait ?
Nous y avons été contraints par la justice égyptienne, la COMESA [Marché commun de l’Afrique orientale et australe, NDLR] et les partenaires institutionnels. Mais notre souhait était plutôt de pouvoir renégocier.
C’est la Fifa qui vous a incité à rompre ce contrat ?
Elle nous a poussés dans ce sens, en faisant des promesses mirobolantes de millions de dollars qu’on trouvera facilement…
Vous avez eu l’impression d’être manipulé dans ce dossier ?
Plutôt mal conseillé…
Cette rupture a entraîné un contentieux pour lequel la CAF va devoir payer entre 25 et 50 millions de dollars. Était-ce donc un bon choix ?
Nous n’avons pas rompu le contrat. Nous avons porté l’affaire devant une cour d’arbitrage suisse, et nous ne voulons en aucun cas payer quoi que ce soit, plutôt parvenir à une renégociation pour que les deux parties arrivent à tirer parti de ce contrat, car nous estimons qu’il n’a pas été signé à sa juste valeur et que nous pouvons encore augmenter les revenus de la CAF.
Après la rupture de ce contrat, la CAF semble avoir perdu son autonomie, souffrir de gros problèmes de trésorerie. Estimez-vous avoir une responsabilité dans cette situation ?
Nous n’avons jamais eu de problèmes financiers jusqu’en 2021. Nous avions même encore pu donner de l’argent aux fédérations.
En août 2019, vous aviez accepté le principe d’un partenariat entre la CAF et la Fifa pour une mission d’assistance et d’audit de la Confédération. Est-ce que ça n’était pas finalement une mise sous tutelle qui ne disait pas son nom ?
Pas du tout ! J’ai moi-même demandé au Comité exécutif de valider cette décision. C’était une stratégie pour pouvoir aller très vite dans les réformes. Si la Fifa est venue pour d’autres raisons, je ne veux pas le savoir. De mon côté, je souhaitais avoir du soutien, et Fatma [Samoura, secrétaire générale de la Fifa, NDLR] nous a apporté beaucoup de choses pour accélérer sur certains dossiers.
Six mois après la mise en place de ce partenariat, la CAF a décidé d’y mettre fin à Rabat, lors d’un Comité exécutif plutôt houleux, auquel assistait Gianni Infantino. Quel souvenir gardez-vous de ce moment ?
Un souvenir de gens fâchés, et je ne savais pas pourquoi… Parce que le partenariat était établi pour six mois, renouvelables en cas de besoin. Mais la majorité des membres du Comité exécutif se sont rendus compte que le travail effectué suffisait à lancer les réformes. Rien de plus !
Vous avez le sentiment d’être lâché par la Fifa à ce moment-là ?
J’ai effectivement le sentiment d’être lâché par des amis qui ont accepté de travailler avec vous… Les plus proches de la Fifa se disent : « Ah, Ahmad a signé son arrêt de mort »…
Comment avez-vous pris à l’époque la suspension de cinq ans infligée par la Fifa, ramenée à deux ans par le TAS ?
La première réaction est toujours de se sentir offensé… Ensuite, lorsque vous discutez avec vos avocats, c’est là que vous vous rendez compte que c’était un acte politique…
Avez-vous l’intention de revenir dans le monde du football ?
Je ne pense pas. Mais le football reste une passion. Je l’ai pratiqué dès l’âge de cinq ou six ans en brousse, ce n’est pas aujourd’hui que cette passion va s’estomper. Mais je la vivrai sous une autre forme. Je soutiendrai surtout des jeunes chez moi, à Majoenga, une ville de football. Je soutiendrai des centres de formation. Si des gens souhaitent mon expertise, je la donnerai.
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