Les implants cérébraux, qui promettent de restaurer la mémoire et contrôler un exosquelette avec la pensée, sont-ils dangereux ?

Les implants cérébraux causent-ils des effets secondaires ? L’essai clinique le plus long jamais réalisé sur ces dispositifs répond à cette question.

Restaurer la mémoire, contrôler un exosquelette avec la pensée ou communiquer à travers un ordinateur… Les implants cérébraux promettent de redonner leurs facultés cognitives et motrices à des personnes avec des handicaps, voire d’augmenter les capacités innées de notre cerveau. Mais la sécurité de ces dispositifs pose encore question, une inquiétude essentielle qui devra être étudiée en profondeur avant que ces appareils quittent les laboratoires, puisqu’ils interfèrent directement avec un organe aussi indispensable que le cerveau.

Un début de réponse a été révélé le 13 janvier 2023 dans le journal Neurology par des chercheurs de l’Hôpital général du Massachusetts (États-Unis), en collaboration avec plusieurs autres centres de santé et universités, dont celle de Harvard.

L’essai clinique le plus long à ce jour sur les interfaces cerveau-machine implantées
Comme leur nom l’indique, les interfaces cerveau-machine cherchent à connecter le cerveau humain avec des machines telles que des ordinateurs ou des membres robotiques, en envoyant les informations du cortex cérébral vers ces appareils pour ainsi les contrôler avec la pensée. Ce qui permettrait par exemple de contourner des parties du corps abîmées par des accidents (comme des traumatismes de la colonne vertébrale chez des tétraplégiques) ; de remplacer des organes manquants ou non fonctionnels, tels que des bras ou des jambes, par des prothèses connectées ; voire de redonner la parole à des personnes paralysées.

Le pionnier dans ce domaine est BrainGate, qui a commencé à tester ces implants au début des années 2000. C’est donc sans surprise que les premiers résultats solides sur la sécurité de ces appareils viennent d’un essai clinique utilisant leurs dispositifs. L’étude publiée dans Neurology compile toute l’information de sécurité issue des essais réalisés avec les implants BrainGate dès 2004 à 2021.

Pas d’effet indésirable grave lié à l’appareil
Un total de 14 personnes (11 hommes et 3 femmes), âgées de 18 à 75 ans, ont participé dans ces études (l’âge médian au moment de l’implantation était de 51 ans). Ces participants souffraient d’une variété de conditions paralysantes : tétraplégies à cause de traumatisme de la colonne vertébrale, maladie de Charcot ou accident vasculaire cérébral. Ils ont porté l’implant pendant environ deux ans (certains dépassant les cinq ans).

Aucun participant n’est décédé à cause de l’implant (six participants sont décédés, mais à cause de la progression de leur maladie), aucun n’a dû quitter l’essai clinique à cause d’un problème de sécurité de l’appareil et aucun n’a eu besoin que l’implant soit retiré avant la fin de l’étude auquel ils participaient. Il n’y a eu donc aucun effet secondaire grave, selon les critères de l’étude.

Cependant, il y a eu bon nombre d’effets indésirables durant les essais : environ 21 par participant, mais la majorité (80%) ont été jugés non associés à l’appareil, mais causés par leur condition médicale (tels que des infections urinaires ou des pneumonies). Donc le taux d’effets indésirables liés à l’implant était d’environ deux par participant, dont la plupart étaient des irritations ou autre inconfort cutané dans la région de l’incision ou en contact avec la partie extérieure du dispositif.

Il y a un cas d’infection superficielle au niveau de la peau, mais aucune infection à l’intérieur du crâne. Les effets indésirables les plus graves liés à l’appareil ont été des crises d’épilepsie chez trois participants (dont deux avec un historique de traumatisme cérébral). Les trois personnes ont été traitées pour ces crises et ont pu continuer dans l’essai.

Une étude limitée qui s’applique uniquement aux implants BrainGate et leur protocole
Les auteurs admettent que leur essai clinique est limité, car elle n’a pas de groupe contrôle (avec une chirurgie, mais pas d’implant) avec lequel comparer les conséquences de l’implant indépendamment de celles de la chirurgie. Aussi, ils préviennent que leur étude ne permet pas de prendre en compte des événements rares, tels que les infections intracrâniennes. Cependant, ils sont convaincus que leurs résultats montrent que le bénéfice de ces dispositifs serait plus important que les risques potentiels. Des risques qui devraient en plus diminuer grâce aux avancées technologiques récentes (comme les systèmes entièrement implantés, ce qui réduirait le risque d’infection cutanée).

« Ces données suggèrent un ratio bénéfice/risque favorable chez certaines personnes bien sélectionnées pour poursuivre les recherches actuelles », affirme Daniel Rubin, neurologue à l’Université de Harvard, dans un communiqué. Mais ces conclusions s’appliquent uniquement au protocole utilisé avec les implants de BrainGate et ne peuvent pas être étendues à d’autres dispositifs comme celui de Neuralink, pour lequel il y a des doutes sur la sécurité lors des essais animaux et encore aucune donnée chez l’humain.

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