Dans la bande de Gaza, enclave palestinienne où plus de deux millions de personnes s’entassent sur 365 kilomètres carrés, une des densités de population les plus fortes au monde, les guerres se succèdent et le blocus dure depuis quinze ans. Plus qu’ailleurs, les inégalités entre les femmes et les hommes y sont énormes. Malgré les obstacles, malgré les règles, certaines dansent la dabkeh pour conjurer l’adversité.
Dans cette salle privée aux abords de la ville de Gaza, une vingtaine de jeunes filles pratiquent la dabkeh, cette danse traditionnelle du Levant. Elles se tiennent la main, sautent et tapent au sol frénétiquement avec leurs pieds, en musique, répétant les mêmes gestes à la perfection, sous les encouragements de leur coach Mohammad Obaid, surnommé « Samara ».
Malgré les obstacles d’une société plutôt conservatrice, malgré les règles imposées par les autorités locales de cette bande de terre côtière qui leur interdit cette pratique après un certain âge, ces filles et leur entraîneur continuent. Une manière de résister, de s’affirmer, de prouver qu’elles peuvent, elles aussi, avoir les mêmes droits.
« L’un des aspects les plus importants de la culture palestinienne, c’est la dabkeh, expose Mohammad Obaid. Donc, les élèves veulent l’apprendre, c’est un message fort et une manière de préserver le folklore palestinien. Mais à Gaza, c’est très dur pour les femmes, enfin pour les filles en général. Nous sommes le seul club ici à les accueillir. »
Car le Hamas, au pouvoir dans l’enclave depuis 2007, a fixé une règle stricte. Il interdit aux filles de plus de douze ans de participer à des représentations publiques. Elles ne peuvent pas danser la dabkeh lors de festivals en extérieur, ni faire de représentations sur la plage.
C’est ce qu’explique Khawla, treize ans : « Parfois, ça m’énerve, et puis après, je me dis qu’un jour ça va changer et qu’on va nous laisser, nous les filles, danser hors de cette salle. Je voudrais savoir pourquoi les autorités nous empêchent de danser. Il devrait y avoir une égalité entre les filles et les garçons, on devrait tous avoir les mêmes droits. »
Alors, elles dansent malgré les obstacles, font des vidéos, des spectacles devant leurs familles. Et elles espèrent en inspirer d’autres. « C’est aussi une forme de résistance, et grâce à ça, on a de plus en plus de demandes de filles qui veulent rejoindre l’équipe », confie l’entraîneur.
Dans ce groupe, il y a aussi deux garçons. « Car la dabkeh, conclut Samara, même si les autorités ne veulent pas en entendre parler, traditionnellement, c’est mixte ».
RFI