L’ouverture partielle du ciel algérien dès le 1er juin a ravivé l’espoir des familles algériennes des deux côtés de la mer.
« C’était la première fois de ma vie que j’attends le communiqué d’un conseil des ministres. D’habitude, ça ne me disait rien du tout. » Ahmed, la cinquantaine, habitant la banlieue est d’Alger, électronicien dans une société publique, sourit à pleines dents, racontant cette fin de journée du dimanche 16 mai, quand les autorités ont annoncé, enfin, la réouverture partielle des frontières, fermées depuis mars 2020. Toute la journée de ce dimanche, les Algériens des deux côtés de la Méditerranée, en proie à un insoutenable ascenseur émotionnel, scrutaient réseaux sociaux et sites d’information pour traquer la moindre fuite, rumeur, indice, sur la possibilité de la réouverture des frontières.
Saut de joie
Quand le ministre de la Santé, Abderrahmane Benbouzid, a déclaré, le 13 mai, qu’il y aurait possibilité de laisser entrer, par avion, Algériens et étrangers, Ahmed n’y a pas trop cru. « C’était trop beau pour être vrai. On se disait qu’ils continueraient la fermeture jusqu’à l’après-été, après la généralisation des vaccinations en France et ici », confie-t-il dans ce café algérois.
Ahmed n’est pas le seul et beaucoup n’y ont pas cru, laissant fatalité et colère envahir leurs pronostics pessimistes : « C’est un leurre pour calmer les gens à l’approche des législatives [du 12 juin prochain] », « ça concerne uniquement les entrées des étrangers », « ils ne vont jamais ouvrir tant que les variants ne sont pas maîtrisés en Europe », etc.
L’officialisation, le 16 mai, de la reprise partielle des vols commerciaux – à raison de cinq dessertes de et vers Alger, Oran et Constantine, dès le 1er juin – a « fait sauter de joie » Ahmed, qui passa une bonne partie de sa soirée de dimanche accroché à l’écran de son téléphone.
« Ne ramenez rien, juste venez »
« J’ai tout de suite appelé sur WhatsApp ma sœur qui habite à Colombes [nord-ouest de Paris] », raconte Ahmed. Amina, sa sœur, son mari et leurs trois enfants, installés en France depuis une quinzaine d’années, ne sont pas rentrés en Algérie depuis plus d’un an. « On a mis la vidéo et on a vu toute la famille de ma sœur dans leur salon crier de joie, nous, on faisait de même tout en pensant à ma grand-mère partie cette année sans que ses petits-enfants puissent assister à son enterrement, cela a été une épreuve terrible », témoigne Ahmed.
Débordant d’enthousiasme, sa sœur, aide-soignante, et son beau-frère, gérant d’une agence d’intérim, planifiaient leur retour, les visites à la famille à Alger et en Kabylie, en direct sur l’écran sautillant de main en main entre Ahmed, son épouse et ses deux enfants.
« Ne ramenez rien, on leur a dit : “Juste, venez”, dit Ahmed, qui poursuit : « Le soir même, mon beau-frère a commencé à chercher des billets sur le site d’Air Algérie, sans succès et le lendemain, il s’est pointé à Opéra [l’agence d’Air Algérie boulevard de l’Opéra dans le 1er arrondissement parisien, NDLR], mais, là, rideaux baissés. »
De fait, les Algériens des deux côtés de la mer se sont lancés, dès le 16 mai au soir, dans la quête de la précieuse réservation de billet. Mais Air Algérie n’a pas encore ouvert ses programmes de vols, attendant que se précisent les modalités de la reprise. Les autorités ont annoncé que de plus amples précisions seraient dévoilées en début de semaine prochaine.
La perspective du retour ne concerne pas seulement les Algériens. « Je peux enfin rentrer après des mois de blocage à Paris », soupire une Française vivant entre les deux pays depuis près de vingt ans : « Alger, ses gens, ma maison, mes amis… Ça m’a tellement manqué. » « Je n’ai pas vu mes parents depuis Noël 2019, raconte, pour sa part, une Française mariée à un Algérien et installée à Alger. J’avais désespéré de les revoir cet été, mais, là, on va bientôt voir le bout du tunnel. »
Des priorités à définir
Le rush s’annonce massif tant ont duré les séparations et les frustrations, et déjà fusent les appels à rationaliser autant que possible l’appétit des départs et des retrouvailles.
« Soulagé et content pour les Algériens qui sont ailleurs. Bienvenue chez vous, auprès des vôtres. Les vols sont insuffisants et l’urgence n’est pas la même pour tous. Ce serait bien de faire preuve de solidarité et de laisser les premiers vols aux bloqués, aux nécessiteux, aux sans ressources, aux cas urgents et aux malades. Je sais que le manque vous tiraille tous, mais pour certains, c’est aux dernières heures d’une mère mourante qu’ils souhaitent assister ou pour manger à leur faim. Ne reproduisez pas le même mépris et égoïsme avec lesquels vous avez été traités », écrit, sur sa page Facebook, l’auteur et militant Sidali Kouidri Filali.
D’ailleurs, selon un membre du comité scientifique, le professeur Riad Merhaoui, la première étape de l’ouverture du ciel algérien concernera, « dans un premier temps, les gens à rapatrier, les malades, ceux qui ont un contrat de travail, des études, moyennant une autorisation ».
L’autorisation exceptionnelle de sortie pour des déplacements à l’étranger, disponible sur le site Web du ministère algérien de l’Intérieur, resterait donc de vigueur.
Des labos dans les aéroports
Par ailleurs, l’attente se fait ressentir pour l’ouverture, non encore programmée, des frontières maritimes et terrestres. Des centaines d’Algériens sont bloqués des deux côtés de la Méditerranée avec leurs véhicules depuis des mois et s’impatientent, espérant le retour des liaisons maritimes entre l’Algérie, la France et l’Espagne. « Mais vu la proportion importante de ces flux, les autorités préfèrent temporiser et gérer prioritairement la première étape de l’ouverture aérienne en imposant le test PCR d’au moins 36 heures avant le départ et un test antigénique à l’arrivée afin d’éviter l’aggravation d’une situation pandémique qui reste, pour le moment, contrôlée [en Algérie] », explique une source officielle, qui précise que les « aéroports algériens seront très vite équipés de laboratoires d’analyses pour préparer la reprise des vols ».
Devant son café refroidi, Ahmed prend son mal en patience : « Cinq vols par jour, c’est encore peu, mais c’est déjà ça », lâche-t-il, fataliste, avant de sourire : « J’ose même pas imaginer l’émotion quand je prendrai mes neveux dans mes bras, et rien que cela, c’est énorme ! »
Source: lepoint.fr
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