Réforme des retraites : accord de la commission mixte paritaire, à la veille d’un vote décisif

La commission mixte paritaire (CMP), composée de sept députés et sept sénateurs, est parvenue, mercredi, à un accord sur une version commune du projet de loi réformant le système de retraites en France. Cet accord ouvre la voie à un vote définitif sur le texte jeudi matin au Sénat, puis dans l’après-midi à l’Assemblée nationale, où le gouvernement ne dispose pas d’une majorité absolue.

Députés et sénateurs sont parvenus à un accord, mercredi 15 mars, en commission mixte paritaire (CMP), sur une version commune du projet de réforme des retraites, qui devra encore obtenir un vote favorable du Sénat et de l’Assemblée jeudi pour être adoptée, sauf si le gouvernement décide de recourir au 49.3.

Cet accord, obtenu par 10 voix contre 4, était attendu : la commission mixte paritaire réunissant 7 députés et 7 sénateurs étant composée majoritairement de parlementaires favorable au recul de l’âge légal de 62 à 64 ans.

Si le projet de loi devrait être voté jeudi matin par le Sénat, qui l’a déjà approuvé en première lecture, son adoption par l’Assemblée reste incertaine.

L’accord trouvé mercredi entre les sénateurs et les députés en commission mixte paritaire (CMP) sur la réforme des retraites montre qu’il est possible de « bâtir ensemble des solutions », a affirmé la Première ministre, Élisabeth Borne, aussitôt après l’annonce de ce compromis.

« Après l’examen par chaque assemblée, 7 députés et 7 sénateurs de diverses sensibilités se sont accordés et proposent un texte commun pour préserver notre système de retraites. Par ce compromis, ils répondent à la demande des Français de bâtir ensemble des solutions pour le pays », a-t-elle écrit sur Twitter, sans évoquer le vote qui est prévu jeudi à l’Assemblée nationale.

La cheffe de file des députés La France insoumise, Mathilde Panot, a dénoncé « un accord qui était déjà ficelé » et « une ambiance lunaire, comme s’il n’y avait pas de mouvement social ».

Le projet, sur lequel Emmanuel Macron joue aussi en partie ses galons de réformateur, doit maintenant être soumis à un vote jeudi matin au Sénat, où droite et centristes devraient lui assurer une victoire, puis l’après-midi à l’Assemblée, où le suspense demeure.

Les voix des députés du parti de droite Les Républicains, eux-mêmes divisés, sont cruciales pour le camp présidentiel qui ne dispose que d’une majorité relative à l’Assemblée. Si une majorité absolue n’était pas garantie, l’exécutif pourrait être tenté de dégainer l’article 49.3 de la Constitution qui permet d’adopter un texte sans vote.

Emmanuel Macron « souhaite aller au vote » jeudi à l’Assemblée nationale sur sa réforme contestée des retraites, a déclaré l’Élysée à l’AFP mercredi soir à l’issue d’une réunion du chef de l’État avec Elisabeth Borne et des ministres.

« Nous devons mobiliser tous les parlementaires dans un esprit de responsabilité », « les consultations se poursuivent demain pour continuer la mobilisation », a-t-on dit dans l’entourage du président à la veille de ce vote décisif et encore incertain quant à l’existence d’une majorité en faveur de la réforme.

Pas de 49.3 « à ce stade »
Bien qu’en retrait publiquement sur ce dossier qui déterminera en partie la suite de son second quinquennat, le chef de l’État suit au plus près les tractations. Il devait réunir mercredi soir à l’Élysée la Première ministre, le ministre du Travail, Olivier Dussopt et celui des Relations avec le Parlement, Franck Riester.

« Le président de la République est déterminé à ce qu’on puisse aller à un vote comme la Première ministre le souhaite. Il veut s’assurer que les conditions sont bien réunies pour y aller », a expliqué à l’AFP son entourage.

Selon un cadre de la Macronie, « à ce stade, on ne va pas vers un 49.3 », mais il n’est pas exclu. Aucune décision n’est attendue avant jeudi, peut-être à la dernière minute.

Au cœur des interrogations, la décision de plusieurs frondeurs de LR, menés par le député Aurélien Pradié qui conditionne son vote positif à l’inscription sans ambiguïté d’une durée maximale de 43 ans de cotisation pour tous les travailleurs.

Un compromis a été trouvé en CMP sur ce sujet crucial des carrières longues. Mais, de l’aveu même du patron des députés LR Olivier Marleix, il y aura toujours certains travailleurs qui devront cotiser « un tout petit peu » plus que 43 ans, et certains élus de droite « ne souhaiteront pas voter » la réforme.

« Jusqu’au dernier moment, il y aura une incertitude », relève ainsi auprès de l’AFP une source gouvernementale. « Il vaut mieux un 49.3 que pas de réforme du tout », a estimé le patron des sénateurs LR, Bruno Retailleau.

Y avoir recours serait toutefois perçu comme un geste politique très risqué, susceptible de durcir le mouvement comme ont averti plusieurs leaders syndicaux. Utiliser le 49.3 expose aussi l’exécutif à une motion de censure.

Sur le front social, pour la huitième journée de mobilisation, la CGT a dénombré 1,7 million de manifestants en France et le ministère de l’Intérieur 480 000, soit davantage que samedi dernier mais bien moins que le 7 mars. À Paris, le syndicat a dénombré 450 000 manifestants et la police 37 000.

« Ne votez pas »
À l’issue de ces manifestations, l’intersyndicale a appelé « solennellement » les parlementaires à voter contre la réforme.

Cette loi « est déconnectée de la réalité concrète du travail », a appuyé le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, présent dans le rassemblement parisien. Le gouvernement « essaye de rouler tout le monde », notamment la droite, a dénoncé le leader de la France insoumise, Jean-Luc Mélenchon.

Malgré un essoufflement des manifestations, des grèves reconductibles se poursuivaient, même si on est loin d’une « France à l’arrêt ».

À la SNCF, quelque 15 % de grévistes étaient recensés à la mi-journée selon une source syndicale, en nette baisse par rapport au 7 mars. Dans la fonction publique d’État, on comptait moins de 3 % de grévistes, contre près de 25 % il y a huit jours.

Quelque 7 000 tonnes d’ordures s’amoncellent à Paris où les éboueurs ont voté la poursuite de leur mouvement au moins jusqu’au 20 mars.

AFP

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