Ce dimanche 22 octobre, dix-sept camions d’aide, dont six citernes de carburant ont traversé le terminal égyptien de Rafah en direction de la bande de Gaza, bombardée et assiégée par Israël. C’est le deuxième convoi en deux jours destiné au territoire palestinien depuis le début de la guerre entre Israël et le Hamas, a constaté un correspondant de l’AFP.
Après la première livraison d’aide humanitaire parvenue à Gaza, hier samedi 21 octobre, l’ONU parle de « goutte d’eau dans l’océan ». Malgré un deuxième convoi de dix-sept camions, ce dimanche, les besoins restent considérables et les Gazaouis sont toujours largement privés de carburant. Les premiers camions-citernes chargés de carburant sont cependant entrés dans la bande de Gaza selon un journaliste de l’AFP et un responsable palestinien du terminal de Rafah.
Les autorités israéliennes, qui rechignaient jusqu’à présent à de telles livraisons estiment que le Hamas pourrait détourner ces stocks de carburant. Et utiliser le diesel pour alimenter ses réseaux souterrains, éclairer ses tunnels et ses bunkers afin de poursuivre ses opérations militaires. En temps de paix, après traitement dans les raffineries de Haïfa, dans le nord du pays, l’État hébreu fournissait l’essence aux Gazaouis. Aujourd’hui, les responsables israéliens parlent de décision tactique qui vise à affaiblir les capacités de l’ennemi.
Châtiment collectif
La communauté internationale, l’Organisation mondiale de la santé, l’Office des Nations unies pour les réfugiés, répètent que la manque de carburant pèse avant tout sur les populations civiles de Gaza. Car, pour que les hôpitaux fonctionnent, il faut de l’électricité. Or, l’unique centrale électrique de l’enclave palestinienne a fermé. Il ne reste plus qu’une source d’énergie. Ce sont les générateurs.
Et ces générateurs ont besoin de carburant pour fabriquer du courant. Qui sert aussi à pomper l’eau, à la dessaler et à la distribuer dans l’ensemble de la bande de Gaza. En matière de droit international, Israël emprunte un chemin très étroit. Car, si ces mesures de restriction de carburant se prolongent trop longtemps, elles pourraient être assimilées à un châtiment collectif. Notamment prohibé par les Conventions de Genève.
« Même s’ils en avaient envoyé 200, ça aurait été insuffisant »
Samedi 21 octobre, après le passage du premier convoi de 20 camions, l’ONU avait estimé que sa cargaison n’équivalait qu’à 4% des importations quotidiennes de Gaza avant le début de la guerre et qu’au moins 100 camions par jour seraient nécessaires aux 2,4 millions de Gazaouis, pour moitié des enfants, privés de tout.
Mais cette aide est nettement insuffisante, juge Shirine Hilal. Cette Palestinienne de Cisjordanie a de la famille dans la bande de Gaza avec laquelle elle échange quotidiennement:
C’est le début d’une bonne nouvelle, mais on ne sait pas ce que ça cache : Israël a ses propres motivations, c’est très étrange. Même s’ils en avaient envoyé 200, ça aurait été insuffisant : on parle de plus de 2 millions de personnes. J’espère qu’ils ne nous le feront pas payer. Il s’agit de 20 gros containers, il en faudra beaucoup, beaucoup plus.
Et pour être honnête le problème n’est pas la nourriture pour le moment, c’est les médicaments, l’essence, l’énergie, parce que tout repose sur l’énergie, c’est ce dont ils ont besoin. Les médicaments, je sais qu’ils rentrent, mais il n’y en a pas assez, car beaucoup de services médicaux ont cessés de fonctionner.
Selon la Palestinienne Shirine Hilal, ces 20 containers d’aide humanitaire «sont une bonne nouvelle», mais «il en faudra beaucoup, beaucoup plus» et «le problème sont les médicaments et l’énergie»
Guilhem Delteil
Même analyse pour Richard Makepeace. Ce membre du conseil d’administration de l’ONG britannique Medical Aid for Palestinians et ancien consul général britannique à Jérusalem salue le passage de ces camions citernes, mais regrette que cela soit largement insuffisant vue la gravité de la situation. L’ONG alerte notamment sur la situation de 130 bébés prématurés sous couveuses et les morts qu’un manque d’énergie pourraient engendrer.
« C’est un geste symbolique, mais il faut beaucoup plus de carburants pour les générateurs des hôpitaux », au risque de tuer « les bébés dans les incubateurs » et « les patients quand il n’y aura plus d’électricité », regrette Richard Makepeace de l’ONG Medical Aid for Palestinians.
«C’est un geste symbolique, mais il faut beaucoup plus de carburants pour les générateurs des hôpitaux», au risque de tuer «les bébés dans les incubateurs» et «les patients quand il n’y aura plus d’électricité», regrette Richard Makepeace de l’ONG Medical Aid for Palestinians
Six camions citernes remplis de carburant entrent dans Gaza
Des sources égyptiennes et des responsables de l’agence des Nations Unies pour les réfugiés palestiniens (UNRWA) ont indiqué à l’Agence France-Presse que six camions citernes remplis de carburant avaient été livrées à Gaza dimanche 22 octobre pour atteindre les hôpitaux, dont les générateurs manquent d’énergie, rapporte notre correspondant au Caire, Alexandre Buccianti.
Alors que des sources israéliennes continuent pourtant à démentir que les générateurs d’hôpitaux manquent de carburant, la totalité des camions d’aide, également avec du matériel médical, nourriture en boîtes, tentes et vêtements, a été inventoriée par le Croissant rouge égyptien. Celui-ci a remis leur chargement à l’UNRWA coté Gaza, avant de rentrer au Sinaï.
Par ailleurs, des avions-cargos porteurs d’aide humanitaire atterrissent à un rythme croissant à l’aéroport d’al-Arich, situé à une cinquantaine de kilomètres de Gaza : parmi eux, il y a deux avions algériens, deux qataris, trois turcs et un indien sont arrivés dimanche 22 octobre. Il faut y rajouter quelque 200 camions venus d’Égypte et qui attendent depuis plus d’une semaine pour certains.
RFI