La Chine a appelé jeudi les habitants de Taïwan à faire « le bon choix » lors de l’élection présidentielle samedi, critiquant le candidat favori comme « un grave danger » pour ses positions en faveur de l’indépendance.
Le vice-président sortant Lai Ching-te, issu du Parti démocratique progressiste (DPP), est le favori dans ce scrutin suivi de près par Pékin, qui revendique Taïwan comme une de ses provinces, et Washington, principal soutien et fournisseur d’armes de l’île.
Le résultat de cette élection à un tour sera crucial pour l’avenir de leurs relations et les Etats-Unis ont indiqué qu’ils enverraient une « délégation informelle » à Taïwan après le vote.
« S’il (Lai Ching-te) arrive au pouvoir, il continuera à promouvoir les activités séparatistes liées à l’indépendance de Taïwan », ce qui est « une voie néfaste », a estimé un porte-parole du bureau chinois responsable des relations avec l’île, Chen Binhua.
Il a dit espérer que les habitants de Taïwan fassent « le bon choix » et jugé que Lai Ching-te représente « un grave danger » pour les relations entre la Chine et Taïwan.
« Franchement, Pékin devrait cesser de se mêler des élections des autres pays et organiser les siennes », a rétorqué le ministre taïwanais des Affaires étrangères Joseph Wu sur le réseau social X, fustigeant « les ingérences répétées » du pays communiste.
Depuis plusieurs années, la Chine fait monter la pression, diplomatique et militaire, sur Taïwan.
Et si elle dit privilégier une réunification « pacifique » avec l’île, dont les 23 millions d’habitants sont gouvernés par un système démocratique, elle n’exclut pas le recours à la force si nécessaire.
« Propos irréfléchis »
Le statut de Taïwan est l’un des sujets les plus explosifs de la rivalité entre la Chine et les Etats-Unis, premier soutien militaire du territoire.
Les Etats-Unis ont d’ailleurs prévu d’envoyer « une délégation informelle » à Taïwan après l’élection, a indiqué mercredi une haute responsable américaine.
« Il serait provocateur de la part de Pékin de répondre (au résultat de l’élection) avec plus de pression militaire ou des actions coercitives », a aussi mis en garde cette responsable, qui a requis l’anonymat.
Cette semaine quatre ballons chinois ont franchi la ligne médiane séparant l’île autonome de la Chine, selon le ministère taïwanais de la Défense, tandis que 10 avions et quatre navires de guerre ont été détectés.
La responsable américaine a ajouté que Washington s’opposait à toute tentative d' »ingérence » extérieure dans le processus électoral de l’île, processus dans lequel les Etats-Unis ont « toute confiance ».
Les Etats-Unis ne doivent « pas se mêler des élections de la région de Taïwan, sous quelque forme que ce soit, afin d’éviter de nuire gravement aux relations sino-américaines », a réagi jeudi Mao Ning, une porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères.
« La Chine est fermement opposée à toute forme d’échanges officiels entre les Etats-Unis et Taïwan », a-t-elle ajouté, fustigeant les « propos irréfléchis » de Washington au sujet du scrutin.
Plus tôt cette semaine, de hauts responsables militaires chinois avaient affirmé à leurs homologues américains que la Chine ne ferait « jamais le moindre compromis » sur Taïwan et exhorté les Etats-Unis à « cesser d’armer » l’île, lors de discussions militaires organisées à Washington.
« Allié fidèle »
Mardi, Lai Ching-te avait dénoncé à nouveau les tentatives d’ingérence de Pékin « par tous les moyens », dont « l’intimidation politique et militaire ».
Jeudi, son principal opposant, Hou Yu-ih, du Kuomintang (KMT) – qui prône traditionnellement un rapprochement avec Pékin -, a lui promis de ne pas « vendre » l’île à la Chine et de maintenir une relation forte avec les Etats-Unis, son « allié fidèle ».
Face à la presse étrangère, il a rejeté les accusations du DPP d’être un candidat « pro-Chine et qui veut vendre Taïwan ».
La question de la « réunification » ne sera pas au programme s’il est élu, a-t-il promis. « Quoi qu’en pense la Chine, ce que l’opinion publique à Taïwan veut que nous fassions c’est maintenir le statu quo ».
Le président chinois Xi Jinping avait assuré, dans son discours du Nouvel An, que la Chine serait « sûrement réunifiée ».
Ces dernières années, face à la pression croissante de Pékin, la présidente sortante Tsai Ing-wen (aussi du DPP), au pouvoir depuis 2016, a augmenté le budget de défense et les achats d’armes auprès des Etats-Unis.
S’il est élu, Hou Yu-ih « non seulement augmenter(a) les achats » d’armements, « mais aussi renforcer(a) la coopération militaire entre Taïwan et les Etats-Unis », a-t-il assuré jeudi. Et « quoi qu’il arrive ici, les Etats-Unis resteront toujours notre allié fidèle ».
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