Partis en convois de toute la France, des milliers d’opposants au pass vaccinal ou au gouvernement convergeaient vendredi vers Paris en dépit de l’interdiction décrétée par la préfecture de police et de la fermeté affichée par les autorités.
Dès le lever du jour, des cortèges de plusieurs dizaines de voitures particulières, camping-cars et camionnettes se sont constitués à Lille, Strasbourg ou Vimy (Pas-de-Calais). Dans l’ouest, 280 véhicules selon la gendarmerie, plus de 400 selon l’AFP, sont partis dans la matinée de Châteaubourg (Ille-et-Vilaine).
Quelque 2.600 véhicules, selon la police, faisaient route en début d’après-midi vers la capitale. C’est une action “d’une ampleur phénoménale”, a dit à l’AFP un coordinateur du mouvement.
“Il y a des gens de tous horizons, pas du tout que des fachos. On est des citoyens, on a des familles, on travaille, on est juste solidaires contre le gouvernement”, résume, depuis Vimy, Sarah, une tatoueuse de 40 ans venue de Lens saluer le convoi.
Rassemblement hétéroclite d’opposants au président Emmanuel Macron et de “gilets jaunes” qui ont protesté contre son gouvernement en 2018-2019, le mouvement s’est constitué sur les réseaux sociaux et les messageries cryptées sur le modèle de la mobilisation qui paralyse la capitale canadienne Ottawa.
Les manifestants exigent le retrait du pass vaccinal et défendent des revendications sur le pouvoir d’achat ou le coût de l’énergie.
“Ne pas déranger”
Réfutant toute volonté de bloquer la capitale, les participants espèrent s’y retrouver en soirée, y passer la nuit puis grossir samedi les rangs des cortèges contre le pass vaccinal organisés chaque semaine.
“C’est important de ne pas déranger les autres usagers, de garder la population de notre côté comme au Canada”, a lancé Robin, depuis un parking à Illkirch-Graffenstaden, en banlieue de Strasbourg.
Le Premier ministre Jean Castex a rappelé que si le droit de manifester était “un droit constitutionnellement garanti”, le blocage était en revanche interdit. Les participants seront arrêtés “s’ils bloquent la circulation ou s’ils entendent bloquer la capitale, il faut être très ferme là-dessus”, a-t-il déclaré au journal télévisé de la mi-journée sur France 2.
Des manifestants entendent ensuite atteindre Bruxelles pour une “convergence européenne” prévue le 14 février. Les autorités belges ont toutefois décidé de leur interdire l’accès de la capitale, faute d’avoir formellement déposé une demande de manifestation.
Vendredi se répandaient aussi des appels à occuper des ronds-points en régions samedi.
“Je lance un appel à rejoindre toutes les grandes villes pour les occuper, multipliez les points de rassemblements”, a ainsi indiqué dans une vidéo postée sur les réseaux sociaux l’un des initiateurs du mouvement, sous le pseudonyme de Rémi Monde.
Réactions politiques
La préfecture de police de Paris a ainsi décrété jeudi l’interdiction dans la capitale de cette mobilisation pour “risques de troubles à l’ordre public”.
Un “dispositif spécifique”, notamment composé de “task forces” et d’engins d’enlèvement doit être mis en place “pour empêcher les blocages d’axes routiers, verbaliser et interpeller les contrevenants”, qui encourent six mois de prison et 7.500 euros d’amende”, a insisté la préfecture.
Si des participants s’affichent comme des citoyens “apolitiques” et “apartisans”, le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal a mis en garde vendredi contre la “tentative d’instrumentalisation” politique de la “lassitude des Français” vis-à-vis de la pandémie de Covid-19, à deux mois de l’élection présidentielle.
Les convois n’en ont pas moins maintenu leur cap, animé par un esprit de convivialité et de lien social similaire à celui qui avait imprégné le début du mouvement des “gilets jaunes”.
“On n’a jamais peur du peuple quand on gouverne”, a assuré le ministre de l’Économie Bruno Le Maire sur CNews. Des candidats à la présidentielle ont apporté leur soutien à ce mouvement, dont pour l’extrême droite Marine Le Pen et Eric Zemmour. “Je pourrais les soutenir, oui bien sûr, je vais voir comment tout cela se met en place”, a indiqué pour sa part celui de LFI, Jean-Luc Mélenchon.
A contrario, d’autres comme Les Républicains (LR, droite) ou le candidat écologiste Yannick Jadot ont pris leurs distances.
“Je ne soutiens pas cette manifestation, en revanche, je soutiens le droit à manifester mais je comprends parfaitement l’État de ne pas vouloir que Paris soit bloqué”, a-t-il déclaré sur BFMTV, jugeant la situation à Ottawa, la capitale canadienne, “inacceptable du point de vue démocratique”.
Le chef de file des Patriotes Florian Philippot, dont les troupes défilent chaque samedi à Paris contre les restrictions sanitaires, a prévu d’accueillir vendredi après-midi les manifestants place Denfert-Rochereau, dans le sud de la capitale.
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