Afghanistan : les talibans ont pris Kaboul, panique internationale

Des dizaines de combattants talibans ont pris le palais présidentiel à Kaboul, clamant leur victoire sur le gouvernement afghan, selon des images télévisées.

« Notre pays a été libéré et les moudjahidine sont victorieux en Afghanistan », a déclaré du palais un insurgé à la chaîne de télévision Al-Jazira. Les combattants se sont emparés du bâtiment après la fuite à l’étranger du président Ashraf Ghani, qui a reconnu que les talibans avaient « gagné ».

Des dizaines de combattants talibans ont pris le palais présidentiel à Kaboul, clamant leur victoire sur le gouvernement afghan, selon des images télévisées ce dimanche. Le chef de l’ONU a appelé les talibans à « la plus grande retenue ». Les droits des femmes en Afghanistan « doivent être protégés », a-t-il dit.

Auprès de l’Agence France-Presse, trois de leurs hauts responsables ont affirmé que les insurgés s’étaient également emparés du palais présidentiel, après la fuite hors d’Afghanistan du chef de l’État, Ashraf Ghani. Ce dernier a dit avoir fui son pays pour éviter « un bain de sang ». « Les talibans ont gagné », a-t-il déclaré. Le président Ghani, qui n’a pas précisé où il était parti, s’est déclaré convaincu que « d’innombrables patriotes auraient été tués et que Kaboul aurait été détruite » sil était resté en Afghanistan. « Les talibans ont gagné et sont à présent responsables de l’honneur, de la possession et de l’autopréservation de leur pays », a-t-il ajouté dans un message sur Facebook.

La priorité : la sécurité des Français, selon l’Élysée

Le ministère français des Affaires étrangères a annoncé dimanche que Paris déployait des renforts militaires aux Émirats arabes unis (EAU) pour faciliter l’évacuation de ses ressortissants, après avoir déplacé son ambassade à l’aéroport de Kaboul face à l’avancée des talibans. Une « priorité absolue » pour l’Élysée. Emmanuel Macron, qui suit « la situation heure par heure », s’exprimera lundi à 20 heures, a indiqué l’Élysée. Le président doit auparavant présider un conseil de défense en visioconférence à midi.

Les armées françaises ont lancé dimanche soir l’opération d’évacuation des ressortissants français : deux avions de transport de l’armée de l’air, un C130 et un A400M, avec à leur bord du fret et des personnels, doivent décoller dans la nuit et lundi matin pour la base aérienne d’Al Dhafra aux Émirats arabes unis, a indiqué le ministère des Armées. « Le dispositif comprenant des éléments de protection, de transit aérien, d’accueil, de soutien médical et de commandement et de coordination effectuera des norias entre Abou Dhabi et l’aéroport de Kaboul ».

La première rotation est prévue dès lundi. Les ressortissants seront ensuite « transportés vers la métropole par d’autres avions de l’armée », ont précisé les autorités militaires. Le quai d’Orsay avait décidé dimanche après-midi de « relocaliser l’ambassade sur le site de l’aéroport de Kaboul pour procéder notamment à l’évacuation de l’ensemble de nos compatriotes qui se trouveraient encore dans le pays ». Les autorités françaises assurent être « en contact avec les Français qui se sont signalés » et rappellent que ces « opérations d’évacuation méthodique de nos ressortissants sont en cours depuis des semaines ». Les Français présents en Afghanistan avaient été invités dès le mois d’avril à quitter le pays et un vol spécial avait été affrété par les autorités françaises le 16 juillet.

Des visas délivrés

Paris fait valoir que la France est « l’un des rares pays » à avoir maintenu sur le terrain « les capacités de protéger les Afghans qui ont travaillé pour l’armée française, ainsi que des journalistes, des militants des droits de l’Homme, des artistes et personnalités afghanes particulièrement menacées », et a réitéré sa volonté de « continuer de mettre en protection les personnalités de la société civile afghane menacées pour leur engagement ». « Tout est mis en œuvre actuellement pour maintenir, autant que possible, une capacité de délivrance des visas depuis l’aéroport de Kaboul », a assuré le quai d’Orsay. Selon les autorités françaises, 625 Afghans employés dans les structures françaises présentes en Afghanistan et leur famille ont été accueillis depuis mai. La France a suspendu depuis juillet les expulsions de migrants afghans déboutés de leur demande d’asile.

En à peine dix jours, les talibans ont pris le contrôle de la majeure partie du pays, après une campagne militaire d’une rapidité stupéfiante qui les a menés aux portes de Kaboul. « La priorité immédiate et absolue dans les prochaines heures est la sécurité » des Français, appelés à quitter l’Afghanistan, a indiqué l’Élysée ce dimanche. Les talibans veulent prendre le contrôle du pouvoir en Afghanistan « dans les jours à venir » par un transfert « pacifique », a déclaré un de leurs porte-parole à la BBC ce dimanche, alors que leurs troupes encerclent la capitale.

Les citoyens afghans et étrangers qui veulent fuir l’Afghanistan « doivent être autorisés à le faire », ont plaidé les États-Unis et 65 autres pays dans un communiqué commun, avertissant les talibans qu’ils doivent faire preuve de « responsabilité » en la matière.

« Étant donné la situation sécuritaire qui se dégrade, nous plaidons et travaillons à assurer, et appelons toutes les parties à respecter et faciliter le départ sécurisé et ordonné de tous les citoyens étrangers et afghans qui souhaitent quitter le pays », indique le texte. « Ceux qui se trouvent en position de pouvoir et d’autorité dans tout l’Afghanistan portent la responsabilité […] de la protection des vies humaines […] et pour la restauration immédiate de la sécurité et de l’ordre civils, souligne-t-il.

« Il serait presque impossible pour Ghani de rallier les forces de sécurité pour défendre Kaboul »

Une poignée de villes mineures sont encore sous le contrôle du gouvernement. Mais elles sont dispersées et coupées de la capitale, et n’ont plus une grande valeur stratégique. La déroute est totale pour les forces de sécurité afghanes, pourtant financées pendant 20 ans à coups de centaines de milliards de dollars par les États-Unis, et pour le gouvernement du président Ashraf Ghani.

Celui-ci se retrouve sans autre option que de devoir choisir entre capituler et démissionner, ou poursuivre le combat pour sauver Kaboul, au risque d’être responsable d’un bain de sang. « Il serait presque impossible pour [Ghani] de rallier les forces de sécurité pour défendre Kaboul. Toute perspective de combat dans la ville elle-même déclencherait une catastrophe humanitaire majeure », a déclaré à l’AFP Ibraheem Thurial Bahiss, un consultant de l’International Crisis Group (ICG), estimant que la pression devait monter sur le chef de l’État pour qu’il démissionne.

1 000 soldats américains de plus à Kaboul

Joe Biden a décidé d’envoyer 1 000 soldats de plus à Kaboul pour sécuriser les évacuations. Face à l’effondrement de l’armée afghane, le président américain avait plus tôt porté à 5 000 soldats le déploiement militaire à l’aéroport de Kaboul pour évacuer les diplomates américains et des civils afghans ayant coopéré avec les États-Unis qui craignent pour leur vie.

Lundi, le gouvernement américain a annoncé avoir « sécurisé » l’aéroport et ses environs. « Nous pouvons confirmer que l’évacuation en toute sécurité de tout le personnel de l’ambassade est maintenant terminée », a déclaré dans un communiqué le porte-parole du département d’État Ned Price. « Tout le personnel de l’ambassade se trouve dans l’aéroport international Hamid Karzai, dont le périmètre est sécurisé par l’armée américaine », a-t-il ajouté.

Une réponse « rapide et forte » des Américains en cas d’attaque

La Russie fait partie des pays ayant reçu des garanties de la part des talibans quant à la sécurité de leurs ambassades, a expliqué par ailleurs Zamir Kaboulov, émissaire du Kremlin pour l’Afghanistan, cité par l’agence de presse Interfax. La Russie œuvre aussi avec d’autres pays pour la tenue d’une réunion d’urgence du Conseil de sécurité de l’ONU sur l’Afghanistan, a-t-il indiqué, assurant que la réunion devrait se tenir bientôt.

Joe Biden, le président américain, a menacé les talibans d’une réponse « rapide et forte » en cas d’attaque qui mettrait en danger des ressortissants américains lors de l’opération d’évacuation. Mais il a aussi défendu sa décision de mettre fin à vingt ans de guerre, la plus longue qu’ait connue l’Amérique, lancée dans la foulée des attentats du 11 septembre 2001.

L’Allemagne et le Royaume-Uni réagissent

L’Allemagne, de son côté, va entamer dimanche soir l’évacuation des membres du personnel de son ambassade à Kaboul, actuellement présents à l’aéroport, a annoncé le ministre des Affaires étrangères. « Une partie d’entre eux vont décoller de Kaboul plus tard dans la journée », a dit Heiko Maas, au cours d’une conférence de presse à Berlin.

Londres a parallèlement annoncé le redéploiement de 600 militaires pour aider les ressortissants britanniques à partir.

Pressé d’agir face à l’arrivée des talibans à Kaboul, le Premier ministre britannique Boris Johnson a assuré dimanche que sa « priorité » était l’évacuation des ressortissants britanniques en Afghanistan, appelant les Occidentaux à adopter un front uni avant toute action. Le chef du gouvernement conservateur a réuni dimanche après-midi une réunion interministérielle de crise, dite « COBR », la deuxième en trois jours sur le sujet. La « priorité » de Londres, a-t-il expliqué après la rencontre, est de « remplir ses obligations vis-à-vis des ressortissants britanniques en Afghanistan et de tous ceux qui ont contribué aux efforts britanniques en Afghanistan depuis 20 ans »

Plusieurs pays occidentaux vont réduire au strict minimum leur présence, voire fermer provisoirement leur ambassade.

Source: lepoint

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